I'm getting buried in this place ◬ Aurore & Dakota

Âge : 20 ANS (26/06/2001) ◬ trop jeune pour tout comprendre

I’m getting buried in this place.

Aurore x Dakota

« T'es virée, Aurore. »
« Quoi ?! Mais… »
Elle ne finit même pas sa phrase. Elle a rien à rajouter après, de toute façon. Mais rien du tout, putain. Évidemment qu'elle est virée. À arriver toujours en retard parce qu'elle a des horaires trop rudes, à mal écrire les noms des gens, à pas sourire à ses clients. Évidemment, qu'elle est virée. Parce qu'elle est pas capable de faire ça bien, elle en a beaucoup trop rien à foutre. Parce qu'on lui en laisse même pas la possibilité, pour être honnête. Et pourtant faut bien qu'elle continue. Elle peut pas payer ses études, elle peut pas payer son appart, elle est livrée à elle-même maintenant, incapable d'aller à la banque pour signer pour les comptes d'Arnaud. Et la précarité étudiante, personne n'en a rien à carrer.
Alors ouais, bien sûr, évidemment qu'elle est virée. À travailler ses cours trop tard, à sortir pour le Cercle la nuit, à rallier l'Hydra quelquefois quand elle est tellement en colère qu'elle s'en fout de sur qui elle tape. La vie c'est pas conçu pour être simple. Et, franchement, il manquait plus que ça.
Aurore fixe sa manager et ravale toutes ses belles excuses.
Karen aurait au moins pu éviter de faire ça devant les clients. Elle aurait au moins pu attendre qu'Aurore soit en pause, peu importe. Au lieu de sauter sur la première des occases, un latte macchiato raté, et de lui tomber dessus comme ça. Elle aurait pu attendre, cette conne, un endroit où c'était possible pour Aurore d'éclater un peu, que ce soit de rage ou de larmes. Mais non.
« Ouais, ok. » qu'elle lâche d'un ton plein d'amertume.
D'un geste de colère contenue, la blonde délace son tablier vert, retire sa casquette, lâche ses cheveux et défie sa boss du regard.
Si on était dans un film, elle ferait un dernier coup d'éclat, un truc pour montrer qu'elle est pas d'accord et qu'elle s'en ira pas sans rien. Elle volerait un café, ou bien tous les cafés du monde, elle garderait son tablier ou bien une affiche pour la promotion du pumpkin spice latte, avec un regard de provoc et un vieux je garde ça amer.
Mais non. Non, on est pas dans un film, et puis t'façon ça sert à rien. Aurore baisse simplement la tête, elle serre les poings et, sans un bruit, elle se demande silencieusement quand l'histoire d'horreur prendra fin.
« Bonne journée, Karen. » elle finit par lâcher.

Deux minutes dans l'arrière boutique, il lui en faut pas plus pour récupérer son sac à dos, ce vieux truc en tissu usé qui mérite même plus ce nom-là. Y a plus rien d'important dedans, puisque de toute façon les trucs importants elle les perd ou elle les fait fuir. Comme tous les trucs, puis comme les gens aussi. Pas étonnant qu'elle soit virée.
Elle croise à peine le regard d'une meuf, une cliente, qui la dévisage, et manquerait de lui balancer une remarque acerbe dans les dents. Mais faudrait pas rajouter ça à son dossier. Si la blonde veut garder l'espoir d'être rembauchée quelque part un jour, faut pas qu'elle commence à cogner dans tout et dans n'importe quoi.
Alors elle a juste un sourire avant de détourner les yeux, et son vieux sac sur une épaule elle va pour quitter le café.

Buried
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DakotaXAurore

Il fait froid dans cette ville. Je ne pensais pas que Phoenix changerait si vite mes habitudes mais Seattle me semble un trou gelé. J’ai l’impression d’être un cactus perdu sur la côte ouest, ne demandant qu’une chose : retourner dans son désert. Bon, c’est peut-être aussi dû à ma dernière réunion avec des investisseurs du coin pour mon projet de nouvelle boutique à Seattle qui m'a foutu une sale douche froide. À ce qui paraît, ma marque n’est pas encore assez visible, assez marquante. Il me manquerait une campagne publicitaire emblématique. Ouais, bah à vous il manque un cerveau et du charisme et j’ai rien dit alors allez vous faire foutre. Ça m’apprendra à ne pas amener Isra pour les convaincre à sa manière. Mais c’est l’occasion : je vais leur montrer. Un shooting pour les détruire tous. Une pub tellement bien que tous les marketeux du monde se retrouveront au chômage. Une campagne tellement iconoclaste que j’aurai même plus besoin d’eux. J’ai déjà le photographe, j’ai les bijoux - ils sont parfaits mes bijoux, il me manque plus qu’une égérie.

Il me faut un café pour me réchauffer et me rendre un peu d’énergie. Un endroit qui m’éloigne de ses snobs qui refusent de me faire confiance. Un Starbucks, ouais, c’est bien ça, le café est bon, c’est rapide et… et les baristas se font virer apparemment. J’entre au moment où la blonde enlève sa casquette en détachant ses cheveux. Je m’arrête dans l’ouverture, retenant un « Wow. » Sa jeunesse, son dédain, sa tristesse déterminée, sa force, sa beauté : j’ai mon égérie rebelle. Le parfait mélange pour attirer et repousser, pour définir la beauté selon Boss Jewels. Et, visiblement, elle va chercher un job.

Je croise son regard alors qu’elle sort. Elle me sourit, je lui souris, mais je ne trouve rien à dire. J’ai pas l’habitude de recruter des gens à la sortie d’un Starbucks. Qu’est-ce que je vais bien pouvoir lui dire ? Cependant, alors que j’hésite, elle sort. Je la suis presque en courant et l’appelle d’une voix forte : « Excusez-moi ! » Tu peux plus reculer, là, Dakota, t'es au milieu dela rue. « Je viens de voir ce qui s’est passé. » Ouais, bravo ça, retourner le couteau dans la plaie, gé-nial. Je me souviens des fois où, moi aussi, j’avais été virée à cause de mon tempérament ou de mon attitude : j’aurai pas aimé qu’une inconnue vienne mêler son nez dans mes affaires, et encore moins qu’elle foute mon nez dans la farine. « Pardon, je voulais dire que vous étiez très belle. » Nope. Non, non, non, Dakota, ce n’est pas comme ça qu’on aborde quelqu’un. Mais bon, ça m’a clairement échappé car elle est, vraiment, vraiment très très belle. « OK, OK, je reprends, désolé, je suis nulle à ça. » Je me tords un peu les doigts en me forçant à la regarder dans les yeux. « Clairement, ils vous méritaient pas. Et je veux vous proposer mieux. Vous avez déjà pensé au mannequinat ? Je dirige une entreprise de vente de bijoux, Boss Jewels, et j’ai besoin d’une égérie. Et je voudrai que ce soit vous. » Direct, dans le but et sans hésitation : là on est dans de la négociation, là ça se passe mieux. « Je vous paye un verre ou un café où vous voulez si vous êtes prête à écouter ma proposition. Ah et... » Je sors mon téléphone portable. « Notation du Starbucks de Seattle 5th Street. 1 étoile. Karen, la manager, est une personne odieuse. À cause d’elle, je ne peux même plus penser à boire du café. J’espère qu’elle sera sanctionnée ou, mieux, virée. » Je lui fais un sourire, un peu orgueilleux, un peu cruel, un peu amical. Un résumé de ce qui l’attend.

KoalaVolant

Mer 5 Jan 2022 - 11:32

I’m getting buried in this place.

Aurore x Dakota

Ça aurait pu en rester là. ça aurait pu en rester là, elle serait sortie du café après un regard échangé, un sourire à une inconnue. Ça aurait pu en rester là, elle aurait continuer à maugréer, à pester contre l’univers qui fait jamais rien comme il faut et pousser la porte du café avec suffisamment de force pour que la poignée en métal revienne lui cogner les phalanges. Ça aurait pu n’être qu’un mauvais début de journée, et le reste aurait enchaîné, chaque pas plus grisonnant que l’autre jusqu’à ce qu’elle rentre le soir avec encore, une fois de plus, cette vague envie de tout caner.
Mais les gens, quand vous leur souriez, ils pensent toujours que c’est une invitation à interagir ; Aurore n’a aucune envie de parler, à qui que ce soit, plutôt de frapper des trucs suffisamment fort pour se péter elle-même les doigts. Pourtant la meuf vient l’accoster, et elle doit se mordre les lèvres pour ne pas qu’un soupir agacé les franchisse.
L’autre femme n’a pas l’air tellement plus âgée qu’elle. Elle a les cheveux d’une couleur cheloue, mais Aurore trouve ça assez beau, en fait.
Oui, elle a vu ce qui s’est passé, en même temps il aurait fallu être sacrément aveugle pour ne pas le voir ; mais la blonde ne lui réplique rien, elle se contente de hausser les épaules. Ouais, elle s’est faite virer. Tant pis. Elle trouvera mieux. Ou pire. Elle trouvera quelque chose, n’importe quoi, au pire elle volera des trucs à la supérette du coin et les lancera sur son proprio quand il réclamera le loyer. D’une pierre deux coups, hein.
Et puis, sans qu’Aurore comprenne trop comment, elle se mange un compliment dans les dents. Elle était si peu préparée qu’elle reste un instant interdite, la bouche bée, à fixer son interlocutrice sans comprendre ce qu’elle lui a dit. Je voulais vous dire que vous étiez très belle. C’est quoi, en fait, le plan ? De la drague ? Cette meuf s’est vraiment dit qu’elle venait de se faire virer, que c’était le meilleur moment pour venir tenter de pécho ? Mais n’importe quoi, en fait. La Chasseresse fronce les sourcils, prête à répliquer qu’elle est attendue quelque part, lorsque l’autre poursuit encore.
Mannequinat. Le terme est posé sur la table, et elle a l’impression qu’il éclate comme un pétard mouillé dans son crâne toujours en colère. Mannequinat. Mannequinat, comme dans porter des trucs, faire la pose devant des appareils photos ? Clairement, l’autre sait pas à qui elle a affaire. Et ses petits commentaires sur tripadvisor changeront rien à ces choses-là.

« Ecoute. » balance-t-elle, d’un ton agressif. « J’sais pas t’es qui, mais, genre, j’viens de m’faire virer, et j’ai autre chose à foutre de ma journée que tes espèces de bails chelous, là. »
Mannequinat. On dirait presque un code, une façade. Et si en fait, la meuf aux cheveux colorés, c’était une pimp ou un truc du genre, qu’en fait elle la trouvait vraiment jolie mais qu’elle voulait pas une égérie, plutôt … ew. Elle est pas stupide, Aurore, elle sait très bien que c’est un vrai truc, les filles qui se prostituent pour payer leurs études. Surtout aux Etats-Unis où le coût des facs équivaut probablement à celui d’un nourrisson vendu pour pièces sur le marché noir. Et puis Boss Jewels ? Dans l’esprit de la française, ça sonnait tout de suite suspicieux.
« J’vais me trouver un vrai taf, et toi tu d’vrais pas aborder les gens de manière aléatoire comme ça. »
Son accent français ressort quand elle s’agace, et là elle a juste une envie : que l’inconnue lui lâche la grappe. Elle resserre sa prise sur son sac à dos et pousse ouverte la porte du Starbucks.

Sam 15 Jan 2022 - 23:55

Buried
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DakotaXAurore

Il y a des jours où je m’épuise moi-même. Je me prends pour qui, une sorte de pro-gameuse, à vouloir uniquement jouer à la vie en mode hardcore ? Pourquoi je me mets des bâtons dans les roues à ce point ? Je viens en quelques instants de cocher toutes les cases afin que la belle n’en puisse plus de moi et refuse toutes mes propositions. Je grince des dents mais, en même temps, je jubile un peu : du challenge.

Le refus est assez glaçant. Elle me claque pas la porte du Starbucks au nez, mais c’est tout comme. Je voix dans ses yeux agacement et dégoût, et je ne peux que la comprendre. Si une nana au pif arrivait pour me complimenter de manière aussi étrange, ma réaction serait aussi, voire plus, terrible. J’ose pas imaginer tout ce qu’elle doit croire. Que je veux la pécho, la prostituer, l’ensorceler, la sacrifier. Depuis 2013, on sait plus trop ce dont quiconque est capable. Moi, je veux juste vendre des bijoux, et aider les autres autant que possible. Autant être claire.

Au moins j’en apprends un peu sur elle. Son accent est français, elle a de la colère et de l’estime de soi. Tout ça, c’est des qualités. Elle refuse de se faire avoir, de se faire rouler dans la farine, elle se méfie. C’est respectable, et je peux la comprendre. Moi aussi, on m’avait, lorsque j’étais étudiante, promis des jobs de videuse et j’avais fini à ce qu’on me demande d’aller servir des shots en mini-jupe à des traders tentant de s’acheter une vie sociale et sexuelle à coups de billets de 500$. Je peux que respecter, et même déjà un peu apprécier la blonde.

Je m’élance à sa suite, la suivant la rue. « Je suis désolée, je tente une dernière fois. J’ai très mal démarré, je vais essayer d’être moins maladroite. C’est pas des bails chelous, je veux juste te proposer un bon job. » Je me pose contre une voiture, faisant de son capot un bureau improvisé. « Tout d’abord, pour te montrer que je suis legit, voici le catalogue de ma dernière collection. » Je le sors de mon sac, je l’avais pour ma réunion de toute façon. « Tu pourras voir qu’on est une vraie marque, avec de vraie produits, et aussi te rassurer : les mannequins précédentes n’étaient pas à poil. »

Je suis clairement fière de ce catalogue. Les premiers bijoux sont clairement enracinés dans les cultures africaines, créoles et afro-américaines : une inspiration constante par ces femmes que j’avais admirées enfant et adolescente, ces images qui reflétait cette différence que je voulais revendiquer, ce passé que je voulais afficher comme mon futur. La seconde catégorie, plus classique, n’était pas une trahison de cet idéal. La connaissance des matériaux, des formes et de l’esprit des bijoux restait présente, mais je souhaitais l’ouvrir à un public plus large : à toutes celles qui souhaitaient les bijoux d’une « Boss ». Et j’espérais que l’énergie rebelle de la belle de Starbucks pouvait représenter ça.

« Et, évidemment, si y’a un truc qu’elles ont fait qui te plaît pas, t’es pas obligée de le refaire. Je voulais te parler de toute la réglementation plus au calme mais si tu veux déjà les grandes lignes pour mieux comprendre : t’as un droit de veto sur les tenues, je choisis bijoux et maquillage et tu es payée 2.000$ la séance de 6h. Alors, t’en dis quoi ? » Sans doute le double de ce qu’elle se fait en un mois à Starbucks. Je sais pas ce que je peux lui dire de plus. « Mais pardon, je suis trop conne, je me suis même pas présentée. » Je lui tends la main, grand sourire. « Dakota Williams, enchantée. »

KoalaVolant

Âge : 20 ANS (26/06/2001) ◬ trop jeune pour tout comprendre

I’m getting buried in this place.

Aurore x Dakota

Quelques pas dans la rue, toujours maussade de ce monde naze qui faisait rien qu’à l’écraser. Elle se dit que c’est pas possible, qu’il doit y avoir autre chose, parce que jusqu’ici à part des galères et des gens qui la laissent derrière elle a bien du mal à comprendre ce que les gens trouvent à la vie. Enfin, elle a pris l’habitude. L’habitude d’encaisser, de continuer à foncer, tête baissée, le ballon sous le bras, comme si tout n’était que rugby. Elle se dit qu’un jour, certainement, elle aura pris tellement de coups que tous ses neurones seront morts et ce sera sans doute pas plus mal.
La meuf la suit dans la rue, et instantanément elle voit rouge. C’est pas possible d’être aussi conne. Aborder une inconnue, qui n’a rien demandé, qui se fait virer, lui dire qu’elle est belle, la suivre dans la rue. Aurore commence presque à avoir peur, à se dire que l’autre meuf va la suivre chez elle, qu’elle lui claquera la porte au nez mais que l’autre restera quand même, assise sur son paillasson, à gratter le bas de sa porte jusqu’à ce qu’elle ressorte et que …
Stop.
Faut qu’elle se calme. La fille reconnaît ses erreurs, et Aurore s’arrête de marcher. Elle se campe face à l’inconnue, les bras croisés sur sa poitrine, et elle essaie de la toiser du haut de son mètre soixante-cinq pour lui faire comprendre que vraiment, aller la suivre jusqu’à chez elle, ce serait pas sa meilleure idée.
L’autre s’appuie sur une voiture pour sortir des photos. Des catalogues. Des filles avec des bijoux, sans doute ceux dont elle lui parlait, ceux qu’elle a designé elle-même. La blonde s’approche, toujours bras croisés, pour regarder un peu ce qu’elle montre. Elle n’est pas très sensible à ce qui brille, elle a toujours préféré gagner la coupe pour une compétition sportive qu’admirer les jolis rubis incrustés dans le métal doré. Mais elle doit avouer que c’est … joli. C’est original, pas commun. Y a différents styles, différentes matières, différentes textures, c’est équilibré.
« C'est pas mal. » qu’elle lâche.
Elle sait même pas pourquoi elle écoute cette meuf, pourquoi elle perd son temps avec elle. Elle est toujours en colère, Aurore, parce que c’est la seule émotion qu’elle parvient assez à gérer. Mais c’est vrai que c’est pas mal, et que l’idée fait son chemin dans son crâne encore épuisé.

Elle est toujours en colère, et elle a l’intention de le rester.
Elle a l’intention de rester en colère, c’est plus simple que de passer à autre chose, d’essayer de mettre des mots sur des trucs qui bougent dans son bide. Vraiment, elle avait l’intention. Jusqu’à ce que l’autre lâche son prix.
Deux mille dollars. Deux mille dollars, c’est le double de son loyer, ça paierait une partie de l’emprunt qu’elle a fait pour ses frais de scolarité exorbitants, ça lui permettrait d’être pas mal pendant facile un mois tranquille. Deux mille dollars c’est énorme, et la meuf balance ça comme ça, comme si c’était rien.
Un peu sous le choc, la frenchie fixe bêtement la main que l’autre vient juste de lui tendre. Si elle lui serre la main, est-ce-que ça compte comme un contrat ? Est-ce qu’elle devra tenir parole, est-ce qu’elle pourra être suivie en justice ? Méfiante, elle toise encore un peu la meuf, qui sourit tout maladroitement comme pour s’excuser pour plus tôt.
Elle décide que peut-être, en fait, elle va pas rester en colère. Elle décroise les bras sans défroncer les sourcils et elle saisit brusquement la main que l’autre lu avait tendue.
« Aurore. »
Et puis elle reprend sa main et son air renfrogné, parce qu’il faudrait pas que l’autre croie qu’elle est aussi facile que ça, qu’il suffit de promettre de la thune pour qu’elle se mette à faire ses trucs.
« Mais j’suis pas mannequin, en fait. Et j’suis mineure, encore. Je sais pas comment ça marche, tes trucs, mais chuis pas sûre que c’est légal. »
Impossible vraiment de dire lequel des deux elle espère, si c’est que oui elle puisse le faire ou que non elle ne le puisse pas. Mais elle reste méfiante, c’est dans sa nature. Elle est pas ce genre de princesse qui se pâme au premier venu, non.
Elle est de celle qui frappent si fort qu’elles battent le dragon à mains nues.

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DakotaXAurore

Elle est prompte à la colère et lente à la réconciliation, cette blonde égérie. Elle dit peu de mots et s’exprime surtout avec ses bras et ses sourcils. Ses yeux sont noirs, sa posture est fermée, ses dents serrées. Parfait, princesse : je ne veux pas d’une Pénélope qui reste sur Ithaque à coudre, j’ai besoin d’une Médée, prête à vaincre elle même Talos et le dragon de Colchide. Boss Jewels, ce n’est pas les bijoux des timides, des obéissantes, des faibles. Il y a une raison s’il y a Boss dans le titre : on représente celles qui ont du se battre pour arriver où elles en sont, celles dont la rage a été le carburant vers le succès. Alors, garde ta colère, frenchy : ça fera du très bon marketing.

Pourtant, je ne peux m’empêcher d’avoir une piqûre au cœur. Parce que cette colère, je la reconnais. C’est celle qui a été ma seule compagne pendant presque une décennie. Celle qui me rongeait, nuit après nuit, à noyer ma frustration dans la violence aveugle. Et parce que je sais que sans Isra, cette colère m’aurait mené vers le pire. Elle m’avait coûté des lendemains heureux, des relations saines, un joli sorcier médecin. Alors, une partie de moi se dit qu’elle devrait plutôt aider la belle, la guérir de sa colère plutôt que de l’utiliser afin de vendre plus de colliers en argent. Mais comment je ferais ça ? Je suis pas Sol moi, je suis pas psy. Je peux juste être sympa avec elle. Et la payer pour son taf.

Aurore. J’ai quelques bases de français, toujours utile dans le luxe. Et je ne peux m’empêcher de sourire parce que la poésie de nommer une belle blonde par le moment de la journée où le Soleil est le plus beau est franchement poétique. « C’est joli comme prénom. » Je garde mon sourire quand elle reprend sa main brusquement. Encore une fois, je ne peux que la comprendre d’être méfiante et c’est à moi de l’amadouer. « T’inquiète, c’est pas sorcier. Tant que tu sais écouter et garder les yeux ouverts. Et pour ton âge, t’as bien seize ans ? Parce que, si tu peux être exploitée par Starbucks, tu as tout autant le droit de gagner dix fois plus avec moi. Si c’est ce que tu veux. » Je devrai peut-être y réfléchir à deux fois. Pourquoi est-ce que je recrute une amateur complète ? Même pas une amateur, parce qu’elle a même pas l’air d’aimer ça. Pourquoi ? Parce que j’ai un instinct là dessus : je connais ma marque, je connais mes bijoux. Et je sais qu’ils brilleront sur elle.

Je lui tends mon téléphone. « Tiens, note moi ton numéro. Je t’envoie dans la journée ton contrat et le lieu du shooting. On se dit… Demain 15 heures ? » Mon sourire s’élargit, joueur. « Comme ça, pas le temps de stresser. » Je rit un peu, officiellement pour la rassurer, officieusement pour relâcher ma propre pression. « Non, honnêtement, stresse pas. Mais je pense que j’ai même pas besoin de te le dire. Si t’as la moindre question, le moindre problème, tu me le dis et je le règle. Ça va être bien. » Je récupère mon téléphone, lui dit au revoir d’un signe de la main, puis commence immédiatement les préparatifs. Moins de 24h pour préparer un shooting : un mardi classique.

Le lendemain

Heureusement, mes contacts à Seattle sont réactifs. Tout est prêt à temps pour Aurore. Décidément, c’est ici que je veux ouvrir ma prochaine boutique. Un petit peu nerveuse, je vérifie que tout est bien à sa place avant de tout dissimuler derrière un sourire quand la blonde entre. « Bienvenue Aurore ! » Je dois résister pour ne pas sautiller gaiement vers elle et attraper des deux mains la sienne. Je suis vraiment, vraiment très enthousiaste à propos de ce shooting. C’est donc d’un pas seulement enjoué que je m’approche d’elle, et une seule main qui s’avance vers elle. Je pense toutefois qu’elle peut voir les étincelles dans mes yeux. « Je suis très heureuse que tu ais acceptée le contrat. Viens, qu'on commence maquillagependant que je te fais découvrir les bijoux. » Je passe devant la maquilleuse, oubliant totalement de la présenter à Aurore tant j’ai hâte qu’elle fasse connaissance avec notre collection.

« Tiens, pour commencer tu vas porter ce choker argenté. Il est simple mais a un côté puissant et rebelle. On va te faire porter avec un maquillage métallique et un pantsuit rouge. On va te transformer en femme d’affaires ! Ensuite, il y a ces boucles d’oreilles tombantes. J’adore le contraste entre les motifs végétaux et le métal doré. C’est clairement une pièce pour des soirées, donc tu porteras cette robe de gala bleue et le maquillage de tes lèvres et de tes yeux sera sur le même thème. On va surtout se concentrer sur la partie au dessus de tes épaules, évidemment, parce que c’est ce sur quoi les photos vont porter. Et puis, enfin, le clou de la collection : ce collier de diamants. On va l’accompagner de chaînes argentées qui vont pendre de tes oreilles, un maquillage fin mais expressif et, surtout, on va sortir le grand jeu niveau robe ! Regarde cette merveille, j’ai eu un mal fou à la trouver. Y'a un mélange d'héroïne grecque, de noble européenne et de modernité, tu trouves pas ? Ça va dégager ton cou et ta poitrine tout en te donnant l’air le plus majestueux. »

Je m’interromps. J’ai tout déballé presque sans respirer, sans même guetter sur les yeux d’Aurore une réaction. Sans même regarder Aurore, vraiment. Et s’il est normal que je sois enthousiasmée par ma collection, il faut quand même que je reste attentive aux rapports humains. « Ça… Ça te va ? Et ça va d’ailleurs ? Depuis… hier ? » Heureusement, le maquillage va être long et nous avons un peu de temps pour faire connaissance. Ou j’ai du temps pour l’ennuyer avec mes terribles capacités sociales. On va bien voir.

KoalaVolant

Mer 9 Mar 2022 - 21:00

I’m getting buried in this place

Aurore | Dakota

Est-ce-que cette meuf sait dire des trucs qui soient pas des aberrations ?
Aurore a presque envie de lever les yeux au ciel. C’est pas sorcier. Bah encore heureux, tiens. Manquerait plus que ces connards de Surnaturels viennent leur dérober ça. Comme s’ils avaient pas déjà assez pris. Et puis là, elle lui dit : 16 ans et la blonde soupire bruyamment. Elle a vraiment l’air d’avoir moins de 16 ans ? Vraiment ? Les arguments en face sont valides, au fond. Et la femme a l’air de bonne foi. Dakota, qu’elle s’appelle.
La française regrette un peu de lui avoir serré la main, peut-être qu’elle s’est engagée trop vite. Elle songe qu’elle aura qu’à glisser son spray au poivre dans son sac à dos et si le moindre truc tourne mal elle le fera payer à quelqu’un. Son corps s’est renforcé avec les horaires de dingue qu’elle fait, les entraînements chez les Chasseurs, le rugby qui la porte toujours et les combats à l’Hydra Club. Elle se laissera pas kidnapper, ou prostituer, ou une connerie comme ça. Jamais.
Elle note son numéro et Dakota lui sourit. Elle sourit trop. Tout le temps. Elle fait sans doute partie de ces gens qui sont tout le temps joviaux, la race qu’Aurore ne comprend pas, et qu’elle ne comprendra jamais.
Demain, 15 heures.
Elle perdait pas de temps, mais quelque aprt c’était pas plus mal. Au moins, Aurore aurait le cœur net. Foncer d’abord, agir après. Elle se débrouillerait pour le reste.
« Ouais, ok. A demain. »

Le lendemain à 15h07

Sac à dos sur l’épaule. Regard énervé sur la gueule. L’envie d’en avoir le cœur net, et, si elle est un peu sincère, de pouvoir payer son loyer. Aurore se tient devant la porte. Boss Jewels est écrit sur la sonnette. Et sur la porte, aussi. Au cas où l’un des deux se fasse enlever par des voleurs d’enseignes, certainement.
Elle a fini par signer le contrat, après l’avoir lu en long, en large et en travers. Elle l’a même fait relire à Hel, voir s’iel y trouvait un truc louche. Mais non, c’était clean. Ça avait l’air clean.
Elle prend une grande inspiration avant d’entrer, et certainement qu’elle a bien fait puisqu’à a seconde où elle pose le pied à l’intérieur, elle se fait happer par un tourbillon aux cheveux colorés qui la traîne derrière elle partout.
« Bonj- … »
Non. Pas le temps pour les bonjours. Dakota la prend par la main et la fait passer devant toutes sortes de personnes. Des gens qui sentent bon et qui jouent face à des miroirs, des gens qui regardent leur patronne avec une telle admiration qu’Aurore se dit que finalement, c’est peut-être vraiment une secte. Sa nouvelle boss lui montre des bijoux, des robes, elle balance mille informations dans des termes qu’Aurore comprend pas et l’assomme de considérations que la blonde ne pensait pas avoir.
Elle se sent conne, elle se sent ridicule, elle a l’impression que son crâne est une putain de maracas dans laquelle les mots de Dakota résonnent comme des grains de semoule pas cuits. Ça va jamais finir, ça va jamais s’arrêter, elle lui montre des trucs et la tête lui tourne et elle peut pas ouvrir la bouche, elle tente juste de tenir l’allure et de faire un peu bonne figure.
Et puis, elle finit par s’interrompre, et par demander si ça va.
Aurore a la tête qui bourdonne, les tympans prêts à exploser. Une femme avec un pinceau en poil de blaireau de ses morts la dévisage avec un sourire. Et ça fait un peu trop pour elle. Perdue, elle fixe Dakota, ou ce qu’elle pense être Dakota puisque c’est de ce visage-là que proviennent les mots, en pagaille, pour venir l’assommer gaiment.
« Oui, je … Heu … »
Ça paie, bien, Aurore. Fais ce job.
Elle se dit qu’elle devrait au moins se sentir soulagée que ce soit pas un réseau de drogue ou de prostitution, qu’il s’agisse vraiment de bijoux et de décors, de prêt-à-porter. Elle se dit aussi qu’il y a erreur sur la personne, que son cou a rien de majestueux et que des boucles d’oreilles tombantes, c’est pas très pratique pour courir. L’œil inquiet, elle jauge les issues, se dit qu’au pire du pire, ici, les gens ont pas l’air assez vif pour la rattraper dans le temps qu’elle mettra à parvenir à la porter d’entrée.
« Je … y a beaucoup d’infos, je … j’y connais rien. J-je vais m’asseoir. »
Et, avant qu’on ne lui réponde, elle s’assied en tailleur par terre, juste à côté de la robe d’héroïne européenne et de moderne noble grecque. Pourquoi est-ce qu’elle a dit oui, déjà ?
« Je … peux avoir un verre d’eau ? »

code by underratedboogeyman

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DakotaXAurore

Soyons honnêtes : je ne devrais rien en avoir à foutre d’Aurore Lecomte. Mes chargées de com’ vont s’arracher les cheveux en apprenant que j’ai confié ce poste à une ex-serveuse de Starbucks au lieu d’appeler Georgia Fowler, Pamela Reif ou même Pokimane. Et le fait que la française soit actuellement assise par terre à bégayer au lieu de se préparer devrait confirmer qu’elles ont raison. Je devrais lui dire qu’elle pourra boire quand elle aura mérité sa paye, qu’elle se reposera une fois qu’elle aura été productive et que des opportunités comme ça ne tombent pas du ciel. Mais ce serait hypocrite. Parce que c’est moi qui lui suis tombée dessus.

Et, je vais être honnête, j’en ai marre de voir mes bijoux portés par celles que mes employées choisissent. Les marques de luxe peuvent garder leurs super-modèles et leur charme élitiste et surhumain. Les marques faussement bobos peuvent garder leurs influenceuses et leurs agendas dissimulés. Mes bijoux sont pour celles qui souhaitent être des boss mais surtout celles qui n’en sont pas encore. Mes bijoux sont pour celles dont leur fougue les fait virer de Starbucks, celles dont leurs valeurs les font passer pour des briseuses d’ambiance en soirée, celles dont l’intelligence et le courage sont vues comme des défauts par les lâches et les stupides. Mes bijoux sont pour Aurore Lecomte.

Alors moi aussi je m’assied par terre, après avoir demandé au stagiaire de nous amener deux bouteilles d’eau. Elle a bien raison, je suis posée là, assise en tailleur au milieu de mes belles tenues : ça me donnerait presque envie de me remettre devant la caméra. Mais, encore une fois, il faut que j’arrête de penser uniquement au travail pour me concentrer sur Aurore et ses troubles, au risque de laisser s’enfuir la blonde opportunité qu’elle représente. J’essaie d’adoucir ma voix, de ralentir mon rythme et baisser mon ton.

« Tu sais, c’est l’avantage de ce taf : t’as pas besoin de connaître la moindre chose. Tu es... » La phrase « concordance entre tes qualités génétiques innées entretenues par l’exercice avec les goût contemporains » me paraît trop technique et formelle. « Tu es tout à fait capable. Il suffira d’un peu écouter le photographe mais c’est comme de la direction d’acteur, tu sais. On passe nos vies à être qui les autres souhaitent qu’on soit, aimer ce que d’autres veulent qu’on aime, faire ce que d’autres demandent. Ici, je te demande juste de paraître et je te paye pour ça. Parce que t'es capable et que tu mérites. » Je ne sais pas quoi, mais quelque chose me dit qu’Aurore, derrière son aspect brut, est une bonne actrice.

Après un sourire, je me relève pour lui laisser de l’espace. Lui tournant le dos, je prépare les différents éléments dont on aura besoin, depuis les derniers contrats jusqu’aux outils de maquillage en passant par des références de précédents shootings pour se donner des idées. J’ai toute confiance en Aurore : elle se lèvera, elle suivra. Va savoir pourquoi j’ai une telle foi.

KoalaVolant

Âge : 20 ANS (26/06/2001) ◬ trop jeune pour tout comprendre

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Aurore | Dakota

Elle s’est jamais bien habillée, ou n’a jamais cherché à l’être. Rapidement, elle a vécu avec juste son père, et c’était pas vraiment le style à aimer les robes en dentelle. Ses vêtements étaient fonctionnels, efficaces. Et elle portait peu de bijoux. Souvent, le même schéma se répétait. On lui offrait une bague ou un collier, un bracelet, des boucles d’oreilles. Et puis, pour son entraînement, Aurore était contrainte de l’enlever, histoire de ne pas faire de mal à elle ou à son adversaire. Et puis souvent, elle oubliait. Juste, comme ça. Et les trucs passaient en machine, ou restaient perdus dans un sac avant qu’elle les retrouve, un milliard d’années plus tard, couverts de miettes et de peluches.
Donc, non.
Aurore, c’est pas vraiment son truc. Vêtements, bijoux et maquillages, un terrain inconnu pour elle. Inconnu et presque hostile, étant donné la quantité de mots complexes et jargonneux que lui a servis Dakota en bourdonnant dans la grande pièce.
Alors elle reste assise par terre, les yeux résolument baissés vers ses baskets, en se disant que ça y est. Ça paie bien, mais elle a déjà tout gâché. On va la prendre par les aisselles, la foutre dehors, l’engueuler pour la perte de temps et ce sera un zéro pour elle. Le retour à la case départ. Pas d’argent pour payer le loyer. Elle se demande si, à force, elle ne devrait pas demander à vivre ailleurs, chez un copain. Mais elle n’a pas beaucoup d’amis, et ce n’est pas chez les Nightshade qu’elle trouverait le meilleur refuge. Oui, bonjour, c’est moi, je traque les êtres comme vous avec une arbalète, mais non non, ne vous dérangez pas pour moi. Putain de bordel de merde.
Elle est toujours dans sa spirale quand Dakota s’assied près d’elle. Sa voix est plus posée, plus calme. La petite blonde relève le nez.
Je te demande juste de paraître. Oui, mais est-ce qu’elle en est capable, c’est ça la question, finalement. Est-ce qu’elle ne va pas enfiler une robe à l’envers, frotter son ombre à paupières avec ses poings, faire quelque chose de déplacé. Elle a l’impression d’être entrée dans un univers parallèle, celui où sa féminité est quelque chose d’intéressant, elle qui était plutôt fardeau pour tacler ou marquer des points.
« Moui. » articule-t-elle tout doucement, mais Dakota est déjà partie.

Un adulescent boutonneux vient lui apporter une bouteille, et elle s’abreuve à grandes lampées le temps de retrouver son calme. Elle est capable. Elle est capable. C’est juste un jeu. Un jeu, où elle peut faire semblant, elle a le droit de faire semblant. C’est même tout ce qu’on lui demande.
Alors elle se relève, Aurore, pour avancer vers Dakota.
Elle se dit qu’elle a rien à perdre, de toute façon, le pire qui puisse lui arriver c’est de chercher un nouveau job chez MacDo ou bien KFC. Le pire qui puisse lui arriver, c’est que les Chasseurs la rejettent parce qu’elle a montré son visage sur de trop grandes publicités … mais ils feraient pas ça, si ? Ils ont besoin d’elle, un petit peu, et surtout elle n’est pour l’instant qu’en bas de l’échelle hiérarchique. Aucune raison que l’exposition de ses traits déclenche le moindre esclandre.
« Ok. » qu’elle dit, d’une voix plus forte. « Ok, je veux bien essayer. Je dois faire quoi, là, maintenant ? Je dois mettre … ça ? »
Du bout du doigt, Aurore désigne la première des tenues citées, que l’autre a appelée pantsuit. Elle n’est pas bien sûre de son coup, mais tandis qu’elle tente de sourire, elle se dit que la moindre des choses, c’est de faire preuve de volonté.
Elle n’est pas la plus forte, sans doute, ni même plus expérimentée. Mais elle peut essayer, au moins, de remplir sa part du contrat.

Et, pour le professionnalisme, on repassera.

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Buried
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Dakota Aurore

Aurore acquiesce, Aurore se lève, Aurore tente de sourire. Le mien, de sourire, vient naturellement. J’avais raison. Elle a ce qu’il faut. Je vois comment mon jeune stagiaire la regarde, avec un mélange de fascination et de légère peur et je sais qu’elle est le modèle dont j’avais besoin. Elle est la boss pour mes bijoux. Je me sens un peu coupable de l’avoir faite paniquer avec toutes ces informations mais j’espère que la joie du shooting rattrapera un peu tout ça. Je vois quand même son sourire forcé alors je me permets d’insister.

« Tu n’as pas à sourire pour moi, Aurore. Il n’y a qu’une personne pour qui tu dois faire semblant : c’est la caméra. Ici le client est pas roi comme à Starbucks, c’est toi la reine et nous on est juste là pour te faire scintiller. »

Je suis pas sûre d’être vraiment rassurante. J’essaye au moins d’être honnête. Mais ma reine-boss semble toujours effrayée par ses sujets les atours rutilants. Mon sourire se fait joueur, avec toujours les mêmes accents de confiance dans la gorge.

« Écoute, porte ce que tu veux. » J’ouvre les bras pour montrer toute la penderie qui nous entoure. « Je t’ai présenté mes idées, tu es libre de mixer tout ce que tu veux. Si tu veux mettre un pull Adidas avec une jupe Balmain, je te suis. » Si je dis qu’Aurore sera ma mannequin normale, je dois la laisser porter des vêtements réels. Si je dis qu’Aurore guidera les gens de tous les jours vers Boss Jewels, je ne peux la vêtir de soieries designées au millimètres près. Le regard de mes assistantes est moins certain que le mien mais je ne suis pas arrivée où je suis en écoutant la peur. « Bon, euh, juste, garde mes bijoux parce que, euh, c’est le but quand même. »

Laissant avec un dernier sourire Aurore dans le dressing, je me place derrière la caméra. Je jette un œil distrait et enjoué au shooting car ce n’est plus mon champ d’expertise et j’ai bien d’autres choses à régler. Je vois bien qu’Aurore n’est pas la plus professionnelle, et clairement pas la plus souriante. Mais je suis ravie par ses choix et son interprétation. Je note déjà quelques idées pour la branche marketing : ces photos seront une mine d’un or aussi brillant que les cheveux de la blonde.

Le shooting se finit et j’attends Aurore, dévêtue de ses atours princiers mais toujours avec un côté altier que je suis peut-être la seule à imaginer. Une dernière fois, je lui souris. « J’espère que ça t’a un peu plu quand même. Ou, au moins, que ça n’a pas été une torture. Est-ce que tu voudras que je te recontacte si on a à nouveau besoin de toi ou est-ce que tu préfères que je supprime ton numéro de mon téléphone et ta tête de la mienne ? » Mes yeux sont toujours taquins, mes mots aussi maladroits et francs que lors de notre premier échange. Malgré le mutisme bougond de la blonde, j’ai envie de lui parler longtemps. Je me retiens, car ce n’est ni le lieu, ni le moment. Je sors simplement une petite boite. « Tiens, un cadeau en plus de ton paiement. » Il s’agit de deux boucles d’oreilles : un soleil en bronze, et un croissant de lune en argent. « Rapport à l’aurore et… Ouais, t’as compris. » La pauvre va finir plus gênée par sa patronne que par son job.

KoalaVolant

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Aurore | Dakota

C’est toi la reine qu’elle lui dit, Dakota.
Elle a pas vraiment la sensation d’être la reine, tout au plus d’être dans une arène, une fosse aux lions bien plus violente que ses longues mêlées au rugby. D’ailleurs, elle n’est pas vraiment reine, même si sa boss lui dit qu’elle suit, Aurore n’a pas de trône, de suite. Elle a simplement ces bijoux dont elle devra se montrer digne.
Alors elle serre les poings plus fort.
Ce job sera son prochain combat ; et Aurore n’aime pas perdre, jamais. Si elle doit apprendre, elle saura. Elle se jettera dans la mêlée pour récupérer un ballon qui ne sera qu’un objectif. Le dressing est immense, bondé, et elle ne sait pas s’orienter au milieu des tissus classieux. Bon. D’abord, les chaussures. Au milieu des mille escarpins aux hauts talons vertigineux, la Chasseresse déniche enfin une paire de Van’s noires à sa taille. Simple. Basique. Efficace.
Les tenues, maintenant. Les cintres semblent lui en vouloir, se prennent dans ses manches et ses cheveux tandis qu’elle tente de les essayer. Enfin, la blonde déniche deux ensembles avec pantalons, l’un arborant une chemise claire et l’autre un haut asymétrique. Enfin, parce que le rouge lui va au teint, elle sélectionne une combi-pantalon et une robe à carreaux. Des vêtements dans lesquels elle se sentira à l’aise, plus apte à être la princesse dont Dakota aura besoin sans se prendre les pieds dans le tapis. Lorsqu’elle enfile la première tenue, les premiers bijoux, elle a l’impression de revêtir une peau qui ne serait pas la sienne, comme un opercule transparent qui recouvre sa peau parfaite.
Aussi à l’aise qu’un oiseau dans un sous-marin, elle tente deux-trois poses avant que le photographe lui lâche un soupir excédé.
« Tu nous fais quoi, là ?! »
« Euh, ben … »
Elle lève son index et son majeur pour faire le V de la victoire, mais apparemment ça ne convient pas. Piteuse, Aurore baisse des yeux lourds vers le bout de ses semelles noires. Elle va se faire virer en moins de temps qu’il n’en faut pour dire australopithèque, c’est sûr.
« Je t’explique, la miss. » La frenchie va pour répliquer, mais on ne lui en laisse pas le temps. Les boucles d’oreilles sont lourdes, et la voix des reproches aussi. « Des jolies filles comme toi, y en a à tous les coins de rue. Mme. Williams pourrait nous en ramener tous les matins des nouvelles. T’es pas intéressante. T’es fade. »
Les mains d’Aurore se tordent dans le tissu. Elle cherche l’approbation de Dakota, mais celle-ci semble avoir déserté et la colère monte dans ses côtes comme un escalator sans fin.
« Ce que je veux voir, moi, c’est pourquoi t’es unique. Qu’est-ce qui fait que t’es différente, qu’est-ce qui fait qu’en portant des produits Boss Jewels, on deviendra des boss aussi. Là, j’vois pas une boss devant moi. J’vois une gamine. Alors, fais mieux. »
Une flamme crépite dans les yeux d’Aurore quand elle lève de nouveau la main. Cette fois-ci, seul le majeur est levé, bien fièrement face à ce connard qui se pense le droit de la juger. Pourtant, elle entend l’objectif s’enclencher, plusieurs fois, alors que son visage fermé flamboie des couleurs de sa colère.
« Voiiiiiiiiiiiiilà, c’est ça que je veux ! »
… c’est ça qu’ils veulent ? Qu’elle fasse la gueule et qu’elle ait l’air énervé ? Eh bien. Ça c’est à sa portée. Elle va s’en donner à cœur joie.
Aurore enchaîne les moues boudeuses, les poses contrariées, les sourcils froncés, elle change de tenue, de bijoux, mais garde sa hargne pour l’objectif qui n’arrête pas de l’immortaliser.
Le temps passe vite, une heure ou deux, avant que la séance s’achève et que Dakota ne revienne.

Aurore retrouve avec délice son jean troué et sa chemise à carreaux.
Lorsque se retrouvent dans sa paume une paire de petites boucles d’oreille, elle se mord la lèvre inférieure pour éviter de trop sourire. C’est un job un peu éreintant, clairement hors de sa zone de confort, et peut-être que Dakota sera déçue et mettra jamais les photos. Mais, en vrai, elle a bien aimé.
Alors elle lève son regard sombre vers les yeux ravis de sa boss.
« Non, c’était cool. » Elle hoche la tête. « Tu peux garder mon numéro. »
En gage de bonne fois, elle endosse instantanément les boucles d’oreille qu’on vient de lui donner. Elle a transformé l’essai, encore une fois ; pas plus laissée faire par des fringues que par un terrain de rugby. Aurore se sent belle, forte, et courageuse.
Elle serre la main de Dakota avec une poigne plus affirmée, avant de l’attirer vers elle pour une accolade d’une seconde. Gênée, elle finit par se détacher et lancer vaguement un merci avant de retrouver le palier, la cage d’escalier, le dehors.
Toute l’immensité qu’elle vaincra à force de mieux s’obstiner.

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