Un bordel.
Un bordel sans nom.
Un bordel sans nom.
L’Amérique était devenu un bordel sans nom depuis quelques jours. J’avais fixé la télévision, confus, incrédule. C’était un rêve, ou plutôt un cauchemar. Face à la situation, j’avais paniqué, j’avais espéré trouver une réponse, une solution. Le lendemain, j’avais été me faire recenser, calmement, paisiblement. C’était notre devoir de citoyen modèle. Sourire bien droit, chemise bien repassée, j’avais signé, j’avais fièrement dit que j’étais un humain, et soufflé intérieurement. C’était leur donner beaucoup de crédits, à leurs mensonges, à leurs fantaisies. Le monde n’était pas un film fantastique, et les déformations génétiques minoritaires prenaient beaucoup trop de place dans la vie politique américaine. J’aurai pu hocher la tête, hausser les épaules puis continuer ma quête paisiblement. Les laboratoires étaient chouettes, et je continuais à développer des synthèses botaniques des poisons naturellement trouvables dans des plantes. J’aurai trouvé un moyen d’accélérer le processus d’action. Le soucis du poison, c’est qu’il est instable, aléatoire. J’aurai pu le rendre foudroyant et infaillible.
Le poison ne suffisait plus. Son mode d’action était indirect, peu sécurisant. Je pouvais me promener avec des fioles de chloroforme dans la poche et des mouchoirs de tissus, j’étais vulnérable. Je pouvais avoir des seringues de strychnine dans mon sac. Il suffisait d’un mauvais freinage pour qu’elles se brisent et se répandent au fond, sur les sièges, sur mes mains. Je me rongerai les ongles par réflexe et j’allais mourir empoisonné.
Le poison ne suffisait plus. Je devais agir. Si la Présidente pouvait être visée, mise dans le coma, hospitalisée, prise pour cible par ces monstres, tout le monde le pouvait. Je déglutis. L’angoisse était revenue comme une vieille amie, alors que je l’avais chassée depuis le huit août. C’était quand elle avait reposé ses bagages quelque part sur ma cage thoracique que j’avais décidé que c’était trop.
« Oh, hi Isaac. » je dis calmement en me tournant vers Isaac quand il rentre.
J’avais mon speech dans la salle en tournoyant sur une chaise. Ecoute Isaac, j’en ai assez de servir à rien. C’est la honte. C’est très bien les laboratoires, mais je suis pas chimiste et la synthèse de poisons naturels, c’est pas les plus violents. J’ai cru comprendre qu’on me gardait par habitude, et par peur que je sois lâché dans la nature avec des informations compromettantes. J’étais triste, un peu désespéré.
Maintenant, j’étais en colère, et apeuré.
Ecoute, Isaac. Maintenant, t’es entraîneur, et tu peux m’aider.
« Oh, well ... But y’know, got a ton of money, really. » je ris pour détendre l’atmosphère, face à sa phrase très mystérieuse.
Ecoute, Isaac, je sais pas vraiment pourquoi tu me parles en énigme. J’ai juste peur, je veux que l’Amérique retrouve son calme d’avant. Avant 2013, tout le monde était joyeux, et depuis, c’est juste des nuances de gris. Le monde est devenu étrange, agressif, et je suis certain qu’on peut faire en sorte de les sauver, tous ces gens.
« So, here’s my point. I got some … Troubles since I’m here. I mean … You don’t know me, and that’s for a reason : I’m always in some labs, and I’m getting bored of it. That sucks, sometimes. These guys … God, did you see that ? The President ? I mean … What the fuck, man … So, I … I can’t get useful in contact fights because I … Feel them. And I’m weak-minded. »
J’ai des flashbacks de 2017, où la sensation poisseuse de l’autre m’avait poursuivi pendant des mois durant. J’avais enchaîné par la suite les rixes, avec d’autres collègues qui y avaient vu une ouverture pour me faire grandir, me faire monter les cercles. J’avais rencontré des personnes que j’appréciais vraiment, dans ce Cercle, comme Erin, qui m’avait abandonné, et Colton, qui m’avait menti.
C’était une sensation étrange, de continuer à courir dans un groupe auquel on a plus réellement confiance. J’aurai juste une efficacité individuelle, désormais. Je le veux. J’ai des balles sur la langue, et j’ai envie de les projeter.
« Now you’re a trainer, maybe you could train me to become more … Y’know, more useful ? I wanna protect this world, and all the people I love. It’s … It’s so fucking important, right now, I swear. Please. I beg you. Please, Isaac. »
Le poison ne suffisait plus. J’en avais plein la bouche, et c’était pas ça, qui sauverait les bonnes personnes. J’ai des cibles dans le crâne, des envies de poids dans les paumes.
Please Isaac, j’ai des proches à protéger, maintenant. Si la présidente a pu se faire attaquer, avec tous ses protecteurs, quelqu’un pourrait entrer et me tuer. Pire. La tuer.
Please Isaac, j’ai des cauchemars où je suis veuf sans être marié, et j’ai des plans sur des comètes qui explosent car des lézards géants génétiquement modifiés viennent la dévorer. Alors.
Please Isaac, aide-moi à devenir
Do you look like me
Do you burn like me
Do you turn into your effigy?
Do you burn like me
Do you turn into your effigy?