And I'm damn sure I never would’ve danced with the devil / Dyzzys II

And I'm damn sure I never would’ve danced with the devil

Les genoux de Vanth, sur le sol, ont le goût de la défaite. Le sel des larmes semblent aussi permanents que la malencontreuse immortalité, la fureur des hommes brise les rêves comme les illusions. L’ombre de l’aigle impérial passe sur les ailes illusoires d’une fausse déesse, les couronnes se brisent sous les bottes rustres et ennuyeuses, les couleurs se fadent et, déjà, le Purgatoire maudit revient. Le sol, dernier repère, disparaît pour que les genoux rejoignent le reste du corps dans un vide absolu, un néant de solitude que je sais avoir mérité. Une seule certitude :à mon retour, mes genoux ne fléchiront plus par soumission.

Les genoux de Dihya retrouvent le sable brûlant un millénaire plus tard. La défaite coule à nouveau à mes pieds et le reflet qu’elle me renvoie m’horrifie. Les crimes et les morts, les blessures et les destructions pâlissent en comparaison de mes précédents efforts et créations. Mes trésors dépassent la mortalité et je peux régner, à ma manière, sans craindre le trépas. Je dois être autre, je dois ne pas me laisser entraîner dans les conflits inintéressants des humains. Je ferme les yeux et laisse mes genoux à nouveau repartir.

Quand le genou de Caterina touche le sol du château Saint-Ange, tout a bien changé. Les vœux de pacifisme ont fané alors qu’un soleil blond se levait sur l’Italie. La soumission n’a plus le même registre quand on se bat aux côtés de Dizzalyr Borgia. Les genoux au sol n’ont pas la même douleur quand ils sont à côté du corps sans vie d’Alexandre VI. Ma foi chrétienne n’est pas choquée le moins du monde par le meurtre de cet incapable catalan. Tout ce qui compte, c’est le règne de ma reine, c’est la couronne que je lui tend par dessus le cadavre de notre ennemi.

La couronne de fer est tienne, ma reine. Les faux empereurs, les aigles rapaces de Rome l’ont toujours refusée mais, toi, tu l’as méritée. Ils nous ont trahi, ils ont corrompu notre pays et l’ont livré aux barbares mais, toi, tu nous rapporteras la paix. Ils ont laissé la mort comme maîtresse, mais, toi, immortelle espoir, tu es là pour nous. Savoure ta victoire, reine Dizzalyr.

Bientôt, tous leurs genoux seront à leur place : au sol face à Dizzalyr. Et, si Alexandre n’est que la première victoire, il ne sera pas la dernière.

Et, moi, je serai ta dernière défaite, Dizzalyr. Tu t’agenouilleras devant moi, Enfys Kirke.

Lun 27 Mar 2023 - 18:08

and I'm damn sure I never would’ve danced with the devil

Dizzalyr | Enfys II

Sigrid avait pris les armes, autrefois. Derrière le bois vermoulu du gouvernail de son drakkar, elle avait observé haches et massues s’abattre sur le corps des hommes qui avaient pensé les défier. Au cœur des hurlements sauvages, elle avait elle-même enflammé des flèches à l’empennage rouge sang pour les propulser dans des gorges qu’elles transperçaient en gargouillements.
Lorsque Synin était partie, ne laissant derrière elle qu’une jeune adulte désarmée dans le corps d’une femme déjà haute, Sigrid avait nimbé de flammes le village entier de sa mie. Tout à sa rage d’être si seule, elle avait senti la chaleur envelopper son corps gelé, comme si le brasier ranimait ce qui en elle n’existait plus.
Lorsque Pabésobek l’avait trahie, lui, à son tour. Quand elle était venue le trouver, la fleur au fusil, la grandeur à portée de bras, et qu’il lui avait mis dans la tête que jamais leur race ne pourrait régner comme le voulait la blonde. Quand il avait nié leur suprématie sur les Hommes et qu’il avait plaqué sa face contre les osselets de sa table, incrustant dans la peau de l’immortelle les instruments de devin qu’elle sentait, parfois, dans les pires de ses rêves. De sa botte elle avait tiré l’instrument d’une mort abrupte, et répandu le sang mortel sur tout le sol de la maison.

L’histoire de la reine aux cheveux de glace s’était forgée dans la violence. La neige avait eu beau couvrir les flots d’un sang prompt à la rage, les fondations de son royaume n’en demeuraient pas moins emplies de spectres qui auraient pu vivre.
Et elle, reine d’un échiquier de marbre dont le roi demeurait absent, voilà qu’une nouvelle échine venait s’abaisser devant elle.

Caterina.

Un tapis rouge sombre enveloppait avec douceur, d’une lenteur presque enivrante, le corps du roitelet de Catalogne. A son côté, un genou posé sur le sol, Caterina tendait doucement une couronne de fer qu’elle poserait, sans ménagement ni réserve, sur l’auréole de ses cheveux.
D’une main, Dizzalyr la saisit, venant glisser l’autre sous le menton de son alliée pour mieux la voir. Ses ongles parfaitement ronds caressèrent la peau tremblante où un cœur affolé battait.
« Relève-toi. » ordonna-t-elle à la brune.
Aussi souveraine qu’elle puisse l’être, Caterina n’avait sa place que debout, tenue à sa droite. Elle n’était pas de ces alliés dont on dispose comme d’un mouchoir. La puissance qui pulsait en elle valait bien celle d’une centaine d’autres.

Caterina faisait les choses avec autant de grâce que de force ; qu’il s’agisse de brûler des corps ou bien d’embraser des draps blancs.
Reine, elle n’aspirait pas à l’être. Dizzalyr se voulait impératrice, marchant sur les impurs mortels qui se pressaient à ses semelles. Que sa conquête des mondes fangeux débute ce jour, ici, à Naples ; elle ne s’arrêterait pas avant d’avoir atteint les lieux les plus célestes.
Alors, elle serait leur déesse.
Et Naples serait sa fidèle.

« Sans ton concours, Caterina, je n’aurais su y parvenir. Je m’emploierai à m’en souvenir. » reprit-elle, la gorge remplie d’un orgueil que l’une comme l’autre alimentaient. « En attendant, je crois qu’il ne te reste qu’une chose à accomplir pour pouvoir rester près de moi. »

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A-t-on déjà vu pareille souveraine ? Dans les vieilles rues de Rome où le marbre est souillé par des générations de sang, sur les rives de la Méditerranée, où chaque vague se souvient d’un conquérant superbe et éphémère, par delà les océans, dans ce vaste monde que les humains ne font que découvrir : aucun ne fait de l’ombre à Dizzalyr Borgia. Elle est, avec sa couronne sur sa chevelure dorée, plus resplendissante que tous les mythes que j’ai entendu au cours des siècles, que toutes les légendes que j’ai murmurées à l’oreille des puissantes et des orgueilleux. Elle est simplement sans semblable, serpentine statue qui siège sur le ciel. Mes yeux brillent d’admiration devant cette incarnation des vertus que j’ai tant chanté et jamais admiré auparavant. C’est avec prudence qu’elle a créé son plan, avec tempérance qu’elle l’a exécuté, avec justice qu’elle régnera et, surtout, avec force qu’elle prend mon menton dans sa main. Et, si mon cœur bat avec une force susceptible de le propulser hors de ma poitrine, ce n’est pas par peur. Car si elle cardinale, moi j’aurai toujours la foi en elle et l’espérance dans sa réussite. Et au diable la charité, on ne nous l’a jamais donnée à nous.

Comme tu te trompes Caterina...

Elle m’ordonne de me relever et je me replace face à elle, les mains doucement posées sur mes côtes pour tenter de masquer ma respiration, le cou tendu pour combattre la drastique différence de taille, les yeux éclairés par la fierté amenée par les compliments de ma reine. Mes lèvres ont déjà soif de goûter aux licences que nous permet notre nouvelle domination quand le sucré de la nuit qui s’annonce est rendu amer par la conclusion de la nouvelle déesse du Capitole.

C’est seule que tu es tombée dans ce piège, tu peux toujours t’en sortir !

Je m’y attendais, évidemment. Son autorité avait été claire, ses commandements explicites ; mais si je ne suis pas bonne à quelque chose, c’est bien à me contenter de ce que l’on me dit, à obéir aveuglement. Ma gorge est un peu sèche quand je tente l’argument le plus important de mon immortelle existence.

Restons stratégique, ô mon immortel printemps. Notre victoire aujourd’hui, si elle emplie mon cœur d’une joie qu’aucune autre ne pourra égaler, n’est que la première d’une longue route. J’ai vécu plus d’un millénaire en utilisant à son maximum les puissances de notre race angélique, en apportant la lumière dans tous les coins du monde encore inconnu. Imagine l’effet que cela pourrait avoir quand ce ne sera plus les maigres lueurs humaines que je transmettrai mais bien ton aura toute-puissante.

Puis, me rapprochant encore plus, je glisse mes doigts le long de ses bras, mon nez depuis son épaule jusqu’à son menton.

Et, pour passer une éternité de délices, autant la vivre dans des corps que nous ayons choisi, dans des corps pleins d’attraits.

Ce ne sont plus les vertus que je cherche à exciter dans les yeux de Dizzalyr à présent. Il y a d’autres moyens de se faire entendre des puissantes.

Et tu vois ici, ma douce Perséphone, comment une folle se fait piéger en pensant être plus futée qu'un monstre.

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Dizzalyr | Enfys II

TW : violence, sensualité pas vraiment consentie, sang, pression psychologique

Les jointures lentement blanchissantes, Dizzalyr appréciait le fer de la couronne contre sa paume. Ce n’était pas un ornement particulièrement travaillé ; là où bon nombre de ses cousines brillaient par leur joaillerie et l’éclat singulier de leurs découpes, celle-ci ne possédait pour elle que le goût gorgé de soleil qui lue apportait d’être prise. Lourde est la tête destinée à porter couronne, l’avait-on mise en garde. Les ombres spadassines lui susurraient que le pouvoir ne s’obtenait qu’en se prenant, et que plus difficile encore était la lutte pour le garder.
D’un bras, elle dissipait ces questionnements, purgeait de doutes ses propres lames.
Si aucun instrument sur terre ne suffisait à l’honorer, elle deviendrait elle-même forgée dans les flammes de sa volonté. Elle limerait chaque aspérité jusqu’à n’offrir aucune prise, passerait sous chacune de ses robes les armes qui tombaient le monde. Elle prendrait les jouissances promises par les yeux avides de posséder avant de crever leurs poitrines de lames qu’ils pensaient lui éviter.
Son règne serait immortel, à défaut de n’être encore pas.
A ses côtés, comme à présent, se trouverait Caterina.

Aucune ridule ne déforma le visage froid devant les mots de sa comparse. Si, dans les plus profondes abîmes, son corps hurlait à frissonner, Dizzalyr demeurait de marbre. Les doigts de Caterina sur ses bras, son souffle blotti dans son cou, n’étaient que de ces distractions dont elle-même usait trop souvent. De la pommade pour faire passer l’amertume tapie dans ses mots. Un parterre de fleurs sous lequel gisait la désobéissance.
D’un geste qui paraissait tendre, la blonde enfouit l’une de ses mains dans les cheveux de son amante. Les longues mèches ondulées s’enroulaient entre les phalanges glacées, et Dizzalyr prit un instant pour jouer avec le rideau miroitant de sa camarade. Puis, elle referma le poing, bien serré, forçant Caterina à ployer la nuque vers l’arrière, les lèvres entr’ouvertes de surprise et le regard rivé au sien.
« Il est vrai. » susurra-t-elle d’une voix sifflante.
La traction qu’elle lui imposait par les cheveux n’était pas suffisante pour lui faire mal ; pas réellement. Elle l’était juste assez pour que la djinn devint maîtresse des mouvements de l’autre immortelle. Son poignet seul pouvait donner l’impulsion qui la guiderait.

A son tour, Dizzalyr se pencha pour apposer son souffle clair dans le cou de sa partenaire. Langue déliée, elle traça des lignes brillantes dans le cou de Caterina. De plus en plus douces. De plus en plus pressantes. La dernière la fit échouer à la lisière de son visage ; elle entreprit de l’embrasser tout le long de sa mâchoire blanche, serrant plus encore les cheveux pour que sa tête tombe en arrière. Satisfaite des frissons qu’elle sentait chez la somptueuse, elle finit par adjoindre ses lèvres à la sienne.
Avant de la mordre jusqu’au sang.
Goût métallique dans la bouche, Dizzalyr sourit en triomphe. Elle se sépara du corps de Caterina, main arrachée à ses cheveux et lèvre inférieure rouge de sang. S’il fallait qu’elle creuse dans la terre pour trouver la racine du mal, elle n’avait pas de temps à perdre. Son regard implacable se calqua sur celui de la brune.
« Ta place n’est pas au Purgatoire. Ta place n’est pas dans les ombres ni dans l’anonymat. Ta place est ici, à mes côtés, pour œuvrer à ces mille victoires que tu promets à demi-mots. »
Le poing serré, elle sentit lentement le métal de la couronne creuser sa peau.
« Ne vois-tu pas comme les corps ont peu d’importance ? Ils ne sont que des vaisseaux inintéressants, des armures de chair et de sang. Que t’importe-t-il de revêtir celui-ci ou celui d’un autre, tant que tu es là, à ta place, drapée uniquement de ta gloire ? »

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J’aurais du me douter que les caresses de la diablesse blonde cachaient la violence des Borgia. Stoïque, je la laisse jouer avec mes cheveux, avec ma nuque, avec mes lèvres, avec mon contrôle et ma liberté. Il faut bien que souveraine s’amuse, n’est-ce pas ? Puis elle fait preuve d’une violence inhabituelle, même pour elle et s’oppose clairement à mes plans. Il n’en faut pas plus pour remplir mes yeux d’outrage et de défi. Je sers mais je ne suis pas servante, et il faudrait que Dizzalyr s’en souvienne.

Je projette une illusion d’incendie dans les yeux de la djinn. Simple et efficace, assez effrayant et soudain pour qu’elle me lâche et que je puisse me redresser fièrement face à elle, le port plein de mon aînesse et de mon bon droit. Il faut avoir, encore une fois, un argument impeccable. Mais cette fois-ci, je m’autoriserai l’insubordination. Le dessein est celui de la blonde, mais le pouvoir est le mien.

Ma reine, j’ai vécu assez longtemps pour savoir que la gloire rime seulement avec l’illusoire. Il ne m’apparaît que deux réalités : la puissance de mes illusions et la douceur de nos corps. C’est ainsi que Dieu nous récompense pour nos vertus, c’est ainsi que je vis. Le Purgatoire n’est qu’une prison pour ceux qui n’y voient pas...

Je m’interromps quand une pensée traverse mon esprit. Je souris un instant avant de refermer mon visage dans une posture plus diplomatique. Je prends encore des risques

Dis-moi, Dizzalyr, as-tu déjà connu le Purgatoire ?

Mer 6 Sep 2023 - 16:22

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Dizzalyr | Enfys II

Sa place, on avait tenté de la lui rappeler maintes et maintes fois. Dizzalyr avait été de celles qu’on laisse sur le bas-côté, l’aberration enfant au corps d’adulte, la matricide que l’on ne prend pas en considération. Maudite par Odin et Loki, elle n’avait gagné que de fuir sa contrée natale pour aller se faire écraser le visage sur les osselets de Pabésobek. Et puis, l’Italie avait déroulé sa tourbe sous ses pas, s’était ployée à ses désirs et elle s’était assurée que personne, personne, ne puisse plus jamais lui rappeler sa place.
Car sa place, elle était dans un trône de pierre érigé sur le sang des autres, elle était au-dessus des querelles des sorciers et des fiers dragons. Sa place, elle était haut ; suffisamment haut pour effleurer des galaxies qu’elle n’aurait plus qu’à conquérir.
Entre les lèvres de l’immortelle, dire à Caterina de rester à sa place n’était qu’une vengeance sur la vie, un moyen de rappeler à cette nouvelle vassale trop brune qu’elle ne ferait plus les mêmes erreurs et ne se laisserait guère duper par la couleur de ses beaux yeux. Lentement, Dizzalyr passa une langue pointue sur le rouge sang de son amante, imbibé sur ses lèvres claires.

Les flammes, si elles lui imposèrent un mouvement de recul, ne lui firent rien craindre pour sa vie. Elle se contenta de rendurcir son regard de glace, incapable de se voir fondre sous l’assaut d’une chaleur factice. Le discours de Caterina se révélait toujours pointu, sincère sans jamais être franc, honnête dans ses nobles mensonges. Si elle tendait l’oreille, Dizzalyr aurait pu entendre le chuintement d’un serpent qui venait murmurer à son oreille en tentant de la faire bouger des convictions qu’elle poursuivait.
Sa place n’était pas au Purgatoire, pas plus que celle d’aucun des leurs. Le visage figé de la blonde afficha un rictus de mépris à la question de son aînée.
« Bien sûr que non. » exposa-t-elle dans des ondulations vocales qui rappelaient une lame de glace lentement passée sur des plaies. « Je me suis débarrassée de cette vaine obligation sitôt après en avoir compris l’imposture. »
Des flashs remontaient à la surface, rappelant la pierre, dans l’étable, qui s’abattait sur le crâne de sa mère jusqu’à ce que la vie sorte d’elle. Dizzalyr n’avait pas choisi de ne pas être au Purgatoire, et c’était bien là ce qui lui donnait sa folie. Trop d’années à errer, sans pause, sans ombres grises à cajôler ; son esprit craquelait sous le poids de siècles vécus, sous la force qu’elle ne possédait guère et, tâchant de s’en dépétrer, la djinn se plaisait à faire croire qu’il s’agissait de son dessein.
Non. Dizzalyr était prisonnière du plus long chemin à gravir, mais elle allait la tête haute tirer profit de cet état de fait. Dussé-t-elle faire tomber des têtes par son sceptre de pèlerine.
« Le Purgatoire n’est qu’une perte de temps. » reprit-elle. « Un affront fait à notre condition, à notre éternité. Tout comme l’est cet asservissement aux humains que nous devons contenter. Alors, quoi, ne sommes-nous fait que pour servir d’autres sans jamais pouvoir par nous-mêmes atteindre les sommets qui nous siéent ? »
La blonde secoua la tête, regard de métal toujours rivé sur sa rivale.
« Et je te propose justement de te débarrasser, une fois pour toutes, de ces deux fardeaux. N’as-tu pas envie d’observer le monde avec moi ? »

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Sam 23 Sep 2023 - 13:08

And I'm damn sure I never would’ve danced with the devil

Pas ici. Ce n’est pas dans la Ville qui m’a tant pris que je mettrai un autre genou à terre. Ce n’est pas sur la terre où les déesses m’ont accueillies en leur sein que je rejetterai mes ailes angéliques. Ce n’est pas aussi près de l’Olympe que j’ai tant fracassée que la déesse viking me soumettra. Dans mon regard brûle les royaumes que j’ai conquis les uns après les autres.

Enfin, Dizzalyr, elle s’agirait de se débarrasser des vieilles idoles telles que le temps ou les places. Nous avons vécu assez longtemps pour savoir que ni l’un ni l’autre n’ont d’importance. Qu’est-ce qu’une poignée de décennies en échange des amours fabuleuses de l’éternelle et de l’éphémère ? Est-ce que tu m’as un seul jour vraiment écoutée si tu crois que je sers Machiavel et non pas l’inverse ?

M’approchant de la belle, je place à nouveau mes mains sur ses hanches et mon visage proche du sien. Il n’y a de place dans la colère que j’ai pour elle que pour un amour brûlant et destructeur. Celui qui pardonne les menaces et les lèvres endolories, qui espère un règne immortel et des embrassades impériales.

Je veux le sommet, et je veux y être avec ma reine, avec toi. Mais n’oublie pas que ton pouvoir vient du mien et que le mien ne vient que du Purgatoire. Avec chaque retour je suis plus puissante, nos illusions pourront toucher plus de monde. Je n’en ai pas assez, je ne peux pas en avoir assez.

C’est dur d’imaginer que nous sommes de la même race tant nous sommes différentes, tant les chemins que nous avons choisis sont opposés. Ils sont escarpés pourtant, et nous devrions choisir de nous allier pour les gravir. Mais, après avoir tant aidé la djinn dans son ascension, j’ai l’impression qu’elle m’abandonne. De dépit, je tente un compromis, une branche d’olivier à laquelle nous puissions toutes deux nous raccrocher.

De toute façon, si un jour je choisissais un corps éternel, je ne prendrai pas celui malade et infime de Machiavel. Il m’en faudrait un avec ta force et ta prestance, ne soyons pas ridicules.

Il ne reste plus qu’à voir où le chemin nous emmènera.

Mer 15 Nov 2023 - 14:13

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Dizzalyr | Enfys II

Insidieuse comme les doux poisons qui coulaient parfois à leurs pieds, Caterina ciblait la faille, comme toujours, dans ses raisonnements. Il était évidemment absurde, de la part d’une djinn puissante, de refuser les lourds pouvoirs qui venaient avec les années et les passages au Purgatoire. Insister pour chaque djinn sur terre tuât son humain sur le champ aurait mené à des illusions aussi peu solides que du sable laissé au milieu du désert à l’approche d’un cyclone de vent.
Pour autant, c’était son souhait le plus profond.
Dans ses aspirations à l’avenir, Dizzalyr ne voyait que l’immortalité et la violence ressentie alors qu’elle la traversait seule. Qu’importaient les illusions ; ils en avaient besoin maintenant, mais lorsque s’adviendrait leur règne, elles ne seraient plus d’aucun secours. Tout au plus plaisantes à apprécier, elles deviendraient inutiles au quotidien.
Le monde idéal de l’italienne était peuplé d’être comme elles, conscients que la vie éternelle était un cadeau trop précieux pour qu’on laisse le plaisir gâché par des soubresauts dans le noir et des asservissements sans fin. Nul Purgatoire, nulle humanité : seuls méritaient les immortels, ceux qui avaient vu de leur yeux trembler des civilisations.
Caterina était de ceux-là.

Aussi Dizzalyr éloigna-t-elle ses objections, quoi qu’éloquentes, d’un simple geste de la main. Si la brune était son amante, elle était surtout son alliée ; la perdre serait une tragédie pour la cause qui germait à Naples.
Tandis que, dans une valse tranquille, un pas se faisait en avant, elle-même accepta la concession.
« La prochaine fois, alors. » fit-elle d’un ton qui n’appelait pas de réplique.
Son corps s’éloigna de celui de l’autre, lui tournant presque le dos pour tremper ses jupes dans le sang. En haut d’une volée de marches, le trône que César s’était fait n’attendait plus qu’une nouvelle reine pour s’accorder l’éternité. Le Château Saint-Ange deviendrait bientôt sien pour toujours, et elle apposerait sa marque sur chacune des pierres de l’édifice qu’elle n’était pas seule à bâtir.
Gravies en quelques pas pesants les marches qui la tenaient plus haute que son interlocutrice, la blonde se retourna vers elle.
« Le corps de Machiavel n’est certes pas le plus intéressant ; cela, je peux le concevoir. Mais il est éphémère. Bien rapidement, tu regagneras le Purgatoire et, à sa sortie, une nouvelle enveloppe charnelle, un nouveau compagnon humain. »
Elle avait articulé ces derniers mots avec un détachement non feint, une sorte de mépris pour la race qui faisait se retrousser ses lèvres sur l’ivoire poli de ses dents.
« Quel que soit l’âge et la forme de celui-ci, tu le tueras. Tu emprunteras enfin une forme qui ne souffrira plus du temps, et abrègera les souffrances du pauvre imbécile que tu sers. Alors, seulement, tu me reviendras. »
La douceur d’albâtre de son ton avait du mal à cacher, sous ses mots polis, la menace.

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