Voici les clés, ne les perds pas (jasper)

Mar 7 Mar 2023 - 22:02

Jasper Griffin-Knight

Zephyr Riverwood

I'm coming apart
at the seams

What a match, I'm half-doomed, and you're semi-sweet.

La boite ouvragée était couverte d’une fine poussière quand il reposa la main dessus. En bois clair, elle était décorée de motifs floraux ciselés délicatement. Elle n’était pas bien grosse, juste assez pour contenir quelques secrets sous la forme de souvenirs qu’il pensait enfouis pour toujours. Il avait mis la main dessus en cherchant un vieux pull qu’il pensait avoir perdu au fin fond de son placard. Il était maintenant assis en tailleur sur son lit, la boite posée entre ses jambes. Il ne savait plus ce qu’elle contenait mais s’il fermait les yeux, il se revoyait clairement entouré d’Euros, Notos et Borée. Tous les visages étaient graves et l’instant solennel dans leur minuscule chambre d’enfants. Chacun y avait mis quelque chose d’important et ils s’étaient jurés de n’ouvrir la boite qu’en cas d’extrême urgence, plus tard, quand ils seraient vieux. Mais ils ne seraient jamais vieux ensembles. Zephyr avait jeté l’objet dans le sac qu’il avait emporté en quittant la maison et la boite l’avait suivi irrémédiablement tout au long de ces errances jusqu’à finir perdue dans les méandres de sa penderie. Il n’y avait plus pensé depuis des années. Peut-être parce qu’il avait une nouvelle fratrie à présent et qu’il avait espéré que cela suffirait à oublier celle qu’il avait détruite. Mais sa route semblait aujourd’hui prendre le même tournant qu’à l’époque et ce rappel du passé était comme un signal d’alarme. Etait-il simplement en train de répéter les mêmes erreurs ?

Il fallait qu’il l’ouvre. C’était devenu une obsession et il savait qu’il ne pourrait se concentrer sur rien d’autre avant de savoir ce qu’elle contenait. Mais la boite était fermée et la clef n’avait pas autant voyagée. Il essaya en vain de triturer la serrure, mais rien ne semblait céder sous ses tentatives. Alors, il de leva, attrapa une veste, glissa la veste sous son bras et quitta la maison pour se rendre en ville. Il mit plusieurs minutes à retrouver l’endroit exact, mais un sourire éclaira son visage quand il se retrouva enfin devant la boutique à laquelle il pensait. Il était passé devant des dizaines de fois sans s’y intéresser. Mais un serrurier était ce dont il avait besoin à présent. Il poussa la porte, laissant le tintement d’une cloche annoncer son arrivée. L’endroit était rempli de clefs de toutes formes et pendant quelques instants, il se contenta de les observer avec curiosité. C’était un objet si commun qu’il fut étonné de le trouver beau, cette fois. Peut-être était-ce l’accumulation, peut-être était-ce parce qu’il s’agissait actuellement du seul objet qui pourrait l’intéresser. Avec précaution, il s’approcha du comptoir, déposa sa boite. La pièce était vide, aussi il appela. « Il y a quelqu’un ? »

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gitano

Lun 20 Mar 2023 - 20:07

sous le pont des soupirs

jasper & zephyr

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Are you deranged like me? Are you strange like me? Lighting matches just to swallow up the flame like me? Do you call yourself a fucking hurricane like me? Pointing fingers 'cause you'll never take the blame like me?

23 février 2022

TW : dissociation, crise d’angoisse, auto-dépréciation

Des grains de poussière volètent dans les rayons d’un soleil déclinant. Par la fenêtre de ton atelier, une marée de lumière glaciale se déverse sur ton visage. Même l’approche d’un nouveau printemps ne t’apporte aucun réconfort, aucune réjouissance. Les arbres vont produire des fleurs, et les fleurs vont s’ouvrir en grand pour capter assez de soleil pour survivre une courte saison. Et puis, les fleurs deviendront des fruits, ou bien des pétales sur le sol, tandis que les jours se retirent comme un accordéon froissé.
Implacables, les saisons s’enchaînent, sans aucune pitié pour ton âme qui en a vu passer bien trop. Tu voudrais trouver une clé qui t’ouvre la porte d’un monde où se trouve la félicité, mais tout semble désespérément clos. Les battants que tu te prends dans le nez, les murs de verre qui t’emprisonnent. Tu as beau chercher activement, rien ne semble pouvoir te guider à la sortie de ce dédale où chaque jour t’enfonce un peu plus.

Evidemment, que Scarlett est partie. Ça a quelque chose de logique, au fond. Tu peux pas dire que t’as été pris en traître ; pas cette fois. Tu t’es inventé marionnettiste alors que t’étais qu’un pantin, balloté des flots d’un courant qui t’emmène toujours vers ta perte. Tu sais pas pourquoi tu continues à avoir de l’espoir que les choses puissent marcher pour toi. T’amouracher d’elle, croire que quelque chose serait possible une fois ton masque dénoué, c’était une gigantesque connerie. Tu l’as privée de vérité, cajolée avec tes mensonges. Scarlett, c’est pas ça qu’elle voulait.
Evidemment, que Jade t’en veut. Tu n’as même pas souvenir d’un temps où ton frère ne t’en voulait pas. Pourtant, cette fois c’est comme une limite invisible que t’as franchie sans faire exprès. Ou bien peut-être, en faisant exprès. Pour te condamner à nouveau, chercher à mériter la haine que t’as vue lorsqu’il te regarde. T’as voulu porter son visage comme un pied-de-nez à ce qu’il est, mais tout ce que tu as gagné c’est une peur bleue des miroirs.
Evidemment, que Morrigan te méprise. De toute façon, tu ne lui as donné que l’arrière de ton crâne à voir, agenouillé, baisant ses pieds comme un enfant prie tous les soirs. Tu n’avais qu’une seule chose à faire, garder ton nom absent des lèvres, et tu as échoué. La réaction de la blonde te hante, tu revois le regard glacé qui transperce ses prunelles sombres.
Encore et encore, inlassablement, tu déçois tous ceux qui te croisent.

Evidemment, que tu te détestes pour la personne que t’es devenu. T’avais des espoirs d’être quelqu’un. Même personne, juste quelqu’un de bien. Sauf que l’acide, ça ronge le cœur. Le sel, ça attaque les muqueuses. A l’intérieur de ton myocarde, les chairs pourrissent et se nécrosent.
Tu es aussi creux qu’une serrure dont on aurait perdu la clé.

Tu te fais tirer de tes pensées par une voix dans la boutique. Aussitôt, tu réintègres ton corps tremblant, les mains serrées sur tes cheveux. L’air rentre et sort de tes poumons à un rythme un peu trop rapide ; mais c’est pas grave. Les clients ne posent pas de questions.
Ils se font de plus en plus rares, les clients, préférant recourir à ces enseignes qu’on trouve dans les galeries commerciales des grands magasins plutôt qu’à de petits artisans forts de plusieurs siècles d’histoire. Aujourd’hui, la boutique vivote plutôt qu’elle ne prospère, et tu n’as même pas l’énergie de faire quelque chose contre ça.

« Bonjour. » tu lances d’un ton morne en apparaissant au comptoir.
Face à toi se tient un jeune homme, l’air perdu et les traits tirés. Tu lis tout de suite sur son visage l’air de ceux qui ont connu la misère. La privation, ça laisse des marques que même le meilleur des fonds de teint ne parvient pas à rattraper.
Puis, ton attention est attirée par la boîte qu’il a placée sur le comptoir, sa main encore posée dessus avec la nervosité des biens précieux qu’on a du mal à confier.
« Joli coffret. » tu hoches la tête, remarquant l’émeraude à son annulaire droit. « Vous êtes un Riverwood, n’est-ce pas ? Qu’est-ce-que je peux faire pour vous ? »

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Jasper Griffin-Knight

Zephyr Riverwood

I'm coming apart
at the seams

What a match, I'm half-doomed, and you're semi-sweet.

« Bonjour. » Il répond d’un ton tout aussi plat que celui employé par l’homme qui apparait devant lui quelques instants après qu’il l’ait appelé. Il l’observe un peu, il ne semble pas avoir déjà croisé sa route. Commentaire sur son coffret, commentaire sur sa famille. Zephyr s’est habitué à ce qu’on le reconnaisse, malgré sa difficulté à l’accepter, lui qui a passé tant d’années à être invisible. Plus que son visage, il a compris avec le temps qu’il aurait mieux fait de choisir un bijou plus discret pour son catalyseur. Si c’était à refaire, il rajouterait une pierre à la chaine qu’il porte également autour du cou. Il avait voulu faire différemment, cette fois-ci. C’était ridicule, il aurait tout aussi bien pu retirer la bague, elle lui était inutile maintenant que le sérum coulait dans ses veines. Mais comme les breloques qui pendaient sur son torse, il s’y sentait si attaché qu’il n’avait pas la force de l’enlever. D’un geste réflexe, il pose néanmoins sa main gauche sur la droite, masquant l’éclat de l’émeraude. « Oui. Zephyr. » Il répond simplement sans savoir si son prénom est aussi connu que son nom. Il n’a pas l’impression d’être le premier Riverwood auquel les gens pensent. Il est loin d’avoir l’aura de ses mères ou de ses adelphes. Il est cette pièce rapportée un peu cabossée que l’on tente de faire rentrer quand même dans l’engrenage.

Ses pensées se perdent quelques secondes avant que le regard posé sur lui ne le fasse revenir à la réalité. Il n’est pas là pour parler de sa famille. Il ne sait pas si le serrurier est trop curieux, juste poli ou ce que sa question sous entendait. Mais il n’avait pas la force de creuser plus loin, pas l’envie non plus. D’un geste délicat, il pousse le coffret dans sa direction. « J’ai perdu la clef. » Il dit simplement en haussant les épaules. « Je me demandais si vous auriez la possibilité de l’ouvrir ? J’aimerais récupérer ce qui est à l’intérieur. » Il était factuel car il n’avait pas besoin de se justifier plus que ça. L’homme était un inconnu et pourtant il était peut-être sur le point d’ouvrir l’un de ses plus profonds souvenir. Il semblait perspicace, peut-être que Zephyr était en train de faire une erreur. Peut-être qu’il n’avait pas envie d’étaler son passé sur le comptoir d’un parfait inconnu. Pourtant, quelque chose sur le visage de l’homme l’empêcha de prendre son coffret te de quitter la boutique sans se retourner. Il n’aurait pas su mettre des mots dessus, mais d’une certaine façon, il avait l’impression de déceler dans ses traits des choses qu’il voyait d’habitude dans le miroir. S’il n’avait aucune confiance en lui-même, cette idée le poussa pourtant à rester.

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gitano

sous le pont des soupirs

jasper & zephyr

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Are you deranged like me? Are you strange like me? Lighting matches just to swallow up the flame like me? Do you call yourself a fucking hurricane like me? Pointing fingers 'cause you'll never take the blame like me?

TW : un peu d’autodestruction hein

Riverwood.
Tu sais même pas pourquoi t’as dit ça. Machinalement, sans doute. T’en as pas grand-chose à faire, en fait, de la famille gardienne de la ville. Les dragons, ils se gardent eux-mêmes, tâchent de protéger les humains. Mais les autres, ça leur échappe totalement. On peut pas confier le contrôle de l’ordre à une poignée d’individus ; le monde tend bien trop au chaos pour ne pas leur cramer les doigts quand ils tentent de le retenir. Les gardiens, avec leurs portails dorés, ils ont qu’à venir voir dans la fange si leurs actions ont un impact. Alors, peut-être, vous pourrez parler.
Pourtant, à la manière dont il articule Zephyr comme s’il le faisait pour s’excuser, tu sens que t’as frappé quelque part où il n’y avait rien d’assuré. Tu hausses discrètement un sourcil quand il cache son catalyseur : cette expression, sur sa trogne, tu la connais un peu trop bien. C’est l’expression de celui qui se sent pas digne d’avoir sa fierté dans la poche, qui préfèrerait croupir dans l’ombre où il a pourri trop longtemps. Tu te sens proche de ce mec-là, alors tu dis rien. Tu te contentes d’un regard inexpressif avant qu’il reprenne la parole.
Le bois massif crisse un peu au contact du verre de ton comptoir, comme le fait sa voix chancelante contre ton moral désaxé. C’est comme deux pièces de puzzle qui ne vont pas spécialement ensemble mais qui s’emboîtent parfaitement bien, ces anomalies de la nature pas prévues par Ravensburger. Ton œil s’attarde à peine trop longtemps sur lui avant de se fixer sur la boite.

Professionnel, tu t’accroupis un peu pour observer le trou de serrure. Serrure à goupilles. Classique. Ça va te prendre environ une fraction de seconde une fois que tu auras les bons outils : insérer le panneton, le crochet, s’assurer que les goupilles soient bien alignées, et basculer.
Dans un sourire maussade, tu lances à ton nouveau client.
« Je reviens. »
Le coffret entre les mains, tu te rends dans l’arrière-boutique où une vieille table en désordre te tient office d’établi. Les instruments raclent le bois déjà lourdement entamé par les aléas du métier.
Panneton. Crochet. Goupilles.
Clac.
Le couvercle de bois sursaute, et tu le fais précautionneusement basculer vers l’arrière, découvrant une collection de babioles hétéroclites auxquelles tu n’accordes guère d’intérêt. Dans un pas leste, tu rapportes à son propriétaire l’objet. Y a un siècle et demi de ça, t’en aurais tiré de la fierté ; maintenant, ça t’apporte qu’un vague sentiment un peu evanescent, celui d’être pas foncièrement inutile. T’es peut-être pas bon, pas gentil, mais tu sais ouvrir des boîtes. Avec un peu de chance, les boîtes deviendront des loquets, et les murs deviendront des portes pour t’emmener vers des havres gris où tu n’auras plus à songer à cette vie de pacotille.
L’âme figée dans un candélabre, tu rends le coffret au dragon.
« Tenez. » Puis, parce qu’il faut bien tenter de survivre. « Est-ce-que vous voulez que j’essaie d’y refaire une clé ? »

Parce que parfois, on trouve d’autres pièces ; même si c’est pas celles qu’on pensait, le casse-tête se remboîte quand même.

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Jasper Griffin-Knight

Zephyr Riverwood

I'm coming apart
at the seams

What a match, I'm half-doomed, and you're semi-sweet.

Il a l’air de savoir ce qu’il fait. C’est ce que se dit Zephyr en le voyant prendre un air concentré alors qu’il observe sa boite sous toutes les coutures. Il a cette impression très spécifique d’être en train de se faire scruter tandis que les yeux de l’inconnu se posent sur chaque rainure de bois. C’est comme s’il était à nu, lui aussi, sur ce comptoir. Il n’avait pas envisagé que cet échange soit aussi personnel et cherchait à tout prix à se cacher derrière un air faussement dégagé. Il était un Riverwood. Cette boite ou une autre, ça ne devait pas avoir d’importance. L’inconnu disparaît, emmenant ses souvenirs avec lui et pendant quelques instants, Zephyr est à nouveau seul dans la boutique, tendant l’oreille pour être sur de ne pas entendre le bruit d’une scie à bois qu’on allumerait. Ses doigts se promènent sur des objets qui traînent à côté de lui et qu’il ne prend pas le temps d’identifier. Il n’est pas là pour acheter, il ne craquera sur rien. Il est là pour la boite, pour le passé qu’elle renferme entre secrets et babioles collectées par des gamins qui n’avaient rien d’autres.

L’inconnu revient, bien plus rapidement que le dragon ne l’avait envisagé. Ses yeux sont rivés sur ses mains et cette boite, parfaitement ouverte qu’il dépose devant lui. Pendant quelques instants, il ne l’écoute plus, le regard scotché sur le contenu. Des morceaux de papier pliés, un chouchou qu’il reconnaît comme ayant appartenu à Borée, le premier scoubidou que Notos avait réussi à terminer, un bonhomme en bâton de glace assemblé par Euros, un ruban tressé à quatre fils qu’il avait lui même fabriqué et tout un tas d’autres objet sans valeur si ce n’est celle que des enfants leurs avaient donné, des années auparavant. Les souvenirs affluent par centaines et l’émotion envahie sa poitrine. Voilà des années qu’il traverse sa vie sans croiser la route de cette famille qu’il a laissé un jour sur le bas côté mais sans jamais oublier ce qu’ils ont autrefois représenté. Ses sœurs et son frère avaient été tout ce qu’il avait. Aujourd’hui ils n’étaient plus qu’un tas de souvenirs rassemblés dans une boite et étalés sans cérémonie devant un parfait inconnu.

« Je … Pardon, j’avais oublié ce qu’elle contenait. » Il dit doucement pour expliquer son long silence. Attrapant le scoubidou entre ses doigts il sourit en se rappelant le visage fier de son frère quand il lui avait montré sa réussite. « Oui une clef, ça serait bien. Vous pouvez faire ça ? » Alors il pourrait refermer la boite, renfermer les souvenirs dans cet espace où le bonheur avait existé à sa façon avant d’abandonner les lieux pour le laisser seul avec ses regrets et ses erreurs. « Ce sont des souvenirs que je ne pensais pas revoir. » Il rajoute pour lui même et pour expliquer son émotion. L’inconnu le prendrait peut-être pour un fou, le trouverait sûrement bizarre. A cet instant il s’en moquait, ça ne serait pas la première fois, après tout. « Merci beaucoup, … ? » Il demande se rendant compte que l’inconnu en était toujours un et que s’il lui avait rendu une partie de son passé, il n’avait pas encore daigné lui donner son nom.

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gitano

Mer 17 Jan 2024 - 12:16

sous le pont des soupirs

jasper & zephyr

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Are you deranged like me? Are you strange like me? Lighting matches just to swallow up the flame like me? Do you call yourself a fucking hurricane like me? Pointing fingers 'cause you'll never take the blame like me?

TW : description de relations très toxiques & malsaines, self-depreciation extrême

Le silence s’étire dans la boutique comme un chewing-gum un peu trop mâché qui a perdu de sa souplesse. Sur le visage du Riverwood, tu vois mille émotions transparaître : la peine, la joie, la nostalgie. Ainsi fonctionnent les objets. Ce qui n’a pas de valeur pour toi en a une colossale pour lui, à retenir les larmes de poindre dans des cils un peu trop immenses. Silencieux spectateur de moments qui sont trop privés pour que tu ne songes à intervenir, tu restes là, les mains jointes, le visage stoïque, à attendre que passe la tempête qui lui a ravi la parole.
Le sourire que Zephyr lui tend a quelque chose de changé, d’enfantin ; un truc qui suinte la culpabilité en même temps que l’émerveillement. Ce genre de sourire que t’as croisé un peu trop de fois dans ton miroir, quand t’essayais de te convaincre que la vie en valait la peine.
Il te remercie et t’essaie de te souvenir de la dernière fois où c’est arrivé. Les remerciements de Cesar sont souvent suivis de ratures, ses caresses laissent place aux morsures et ses baisers à des injures. Les remerciements de Morrigan sont absents ; si tu as réussi, elle en attendra plus, c’est tout. La défaite n’est qu’un contretemps – le succès, une obligation. Les mercis de tes clients se font de plus en plus rare, à mesure qu’ils prennent pour acquis un métier dont, sans doute, ils pensent qu’il pourrait être automatisé.
Mais ce merci là, avec toute l’émotion autour, ces grands yeux tristes qui te regardent et t’emmènent sur des îles secrètes où tu ne saurais pas douter de sa réelle sincérité, ce merci, ça fait des lustres que tu ne ‘las pas entendu. C’est ton tour de rester silencieux, bouche légèrement entrouverte, avant de reprendre la parole.

« Jasper. » tu jettes à la va-vite, comme honteux de dire ton prénom. Tu te racles la gorge et te reprends. « Je m’appelle Jasper. Mais ce n’est rien, vraiment, monsieur. Je ne fais que mon métier. »
Tellement persuadé d’être indigne de la moindre reconnaissance que tu l’évites lorsqu’elle t’atteint. Tu as fini par repousser toute la douceur de ton existence parce que tu ne vois que la tendresse qu’on t’appose à coup de cravaches, seulement l’affection qu’on te donne lorsqu’elle possède et qu’elle abime. Tu n’as rien mérité de mieux, de toute façon, à force de blesser tout ce que tu touches de tes mains souillées d’amertume.
Ça ne t’empêche pas d’avoir envie de l’aider, le Riverwood, parce que tu te revois un peu dans cet air perdu éperdu qu’il te sert face à ton comptoir.
« Pour refaire une clef, en revanche, je vais avoir besoin de garder votre coffret un moment, et je ne me vois pas vous demander de rester ici avec moi toute la nuit. » tu ricanes, gêné, sans même apercevoir la pointe de flirt maladroit qui s’est glissée dans tes paroles. « Cela étant, c’est tout à fait possible, et j'imagine que ce serait mieux. Les souvenirs, vaut mieux avoir un moyen de bien les conserver, sinon ils s’abîment. »

Tu parles d'expérience, Jasper.

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Voici les clés, ne les perds pas (jasper)

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