nodding my head like yeah ♫ orphic (hammer)

27 novembre 2021

« SHAKE THAT BOOTY FOR ME, BACHMANN !!! »
Il crie par la fenêtre ouverte, sourire tendu à son ami, tandis que la paume de sa main écrase le klaxon de sa caisse. Tous les voisins vont l’entendre dans l’air frais du samedi matin, mais Orpheus en a entre peu et rien à foutre. Il vient juste de réobtenir son permis de conduire et, en cassant toutes ses tirelires, s’offrir une vieille C-max bleu électrique : l’occasion parfaite de convier son blond préféré pour un week-end à ne rien faire.
Le voyage n’est pas teinté de la même détresse que celui qu’ils planifient tous les trois, il ne ressemble même pas à une fuite : juste un bon moment entre potes comme ils en ont vécu quelques-uns au cours des derniers mois.
Le zouwu passe devant son capot avec un petit dandinement caractéristique, et un large sourire s’étale sur le visage du conducteur.
« Yeaaah, THAT’S what I mean ! »

Y a pas d’hiver à la Nouvelle Orléans et encore moins à Miami. En chemise à fleurs trop grande et jeans troué, les lunettes de soleil perchées sur son nez et la clope coincée dans les lèvres, Orpheus a tout d’un vacancier au beau milieu du mois de novembre. Alaric n’est pas mieux ; le brun le regarde dans le rétro charger son sac dans le coffre avant de se laisser tomber à la place du mort.
« Got everything ya need? Sunglasses, alcohol, your worst behavior? » qu’il lance dans un sourire complice.
Il est rarement aussi en forme à neuf heures du matin, mais l’excitation de partir pour une aventure comme celle-là a eu raison de ses défenses. Sans doute que le café joue un peu, aussi. Mais il ne l’admet pas, Orphy, préférant se cacher derrière la perspective d’un vrai week-end entre bonhommes à filer droit vers la Floride.
« Calculated the exact travel time to Miami so I could make us the dopest playlist, man. » annonce-t-il avec des grands airs de conspirateurs en calant, tant bien que mal, son smartphone au-dessus de son volant pour pouvoir voir le GPS tout en ayant accès au double jack. Ça va jamais tenir, il va tomber un million de fois pendant le trajet, mais y a que comme ça que ça fonctionne.

Derrière eux, y a tous ceux qu’ils aiment et dont la rudesse de la vie les fait ployer l’échine souvent.
Devant eux, y a beaucoup d’alcool.
C'est tout ce dont ils ont besoin.

tw : pipi, caca, mention de sekse, descriptions dégueu de toilettes publiques
N.B. l’anecdote dépeinte dans ce RP est absolument et totalement véridique – toute ressemblance avec des faits réels serait donc réelle. Ce post a été écrit dans un devoir de mémoire et de compassion. Merci.

« How dare you question my musical taste? In my own car? »
Évidemment, le zouwu aurait pu les transporter là-bas en un clin d’œil – mais alors, où aurait été le plaisir ? Toujours est-il qu’entre les quelques parois de tôle, Orpheus règne en seigneur et maître. Quiconque déroge à ses règles s’expose à une terrible sentence : écouter durant tout le trajet l’intégralité de la discographie de Justin Bieber.
Tout en déboitant de la place où il s’était garé, le brun tente une enième allusion à leur épisode favori : celui de leur rencontre.
« May I remind you that you are in my debt, forever, Bachmann? »
Le ton est joueur mais derrière le visage souriant se cache un réel traumatisme.

Le lecteur ou la lectrice avisé.e se demandera peut-être la raison pour laquelle Alaric Bachmann se trouverait être en dette permanente face à quelqu’un d’aussi peu dégourdi qu’Orpheus Diego Astraea. Que ceux qui lisent ces lignes ne s’inquiètent pas : la narratrice a pensé à tout.
Pour comprendre la dette inaliénable qui lie le zouwu à son aîné, il faut remonter de quelques mois en arrière, dans une boîte de nuit mal éclairée où, sans même se connaître, nos deux protagonistes avaient décidé chacun de leur côté de passer la soirée. L’histoire ne raconte pas la raison pour laquelle Orpheus avait jeté son dévolu sur ce bar, plutôt que sur un autre, pour y passer son samedi soir.
Toujours est-il qu’il était là.
Il est arrivé le moment de te décrire, lecteur, lectrice, de quel là précisément nous parlons. Un endroit dont l’hygiène parfois déplorable a entraîné bien des occlusions intestinales et dont l’éclairage bleu-violet ne laisse aucune doute sur les activités parfois formidablement illicites qu'il accueille. Vous l’aurez compris : les toilettes.

Orpheus est aux toilettes.

Il convient de préciser que ce bar, cette boîte de nuit, peu importe, n’a pas les fréquentations les plus sages de toute la Nouvelle-Orléans. Ainsi, Orpheus a eu grand mal à se dénicher une cabine de libre, entre les déjà ivres qui vomissent et cette stalle d’où émanent des gémissements qui ne laissent pas vraiment de doute quand à l’activité à laquelle ses occupants s’adonnent. La seule cabine de libre, donc, était la plus à gauche, la plus éloignée de la porte d’entrée, et Orpheus s’est laissé tomber sur le trône avec la grâce imaginaire d’un marsouin échoué sur une plage.
Si Orpheus s’est assis, vous pouvez aisément imaginer qu’il n’est pas là pour faire la petite commission, comme on dit dans le milieu. Absolument pas. Ses intestins semblent se rebeller contre quelque chose : peut-être que le guacamole n’était pas exactement très frais. Pour tenter de couvrir la douleur qui lui tiraille le ventre et les claquements très désagréables que ses voisins font subir à la paroi en contreplaqué, le guitariste a sorti son smartphone et parcourt avec application les stories de ses proches sur Instagram.
D’aucuns argumenteraient que le fait de chier dans un lieu public requiert un courage sans faille, une confiance en soi et une maîtrise de ses sphincters hors du commun. Peut-être ses personnes ont-elles raison, et qu’Orpheus est toutes ces choses. En vérité, le brun n’a jamais eu le moindre problème pour se soulager quel qu’en soit l’endroit – et, si quelqu’un devait rougir en sortant de son box WC, ce serait probablement les deux tourtereaux en proie à un coït endiablé qu’il entend par-dessus le brouhaha de ses pensées.
La porte des toilettes s’ouvre tandis qu’Orpheus est dans sa dernière poussée. Quelques pas pressées retentissent, puis la porte de sa stalle pivote elle aussi sur ses gonds. Confus (n’avait-il pas fermé cette porte ?) et indigné (qui vient ruiner son meilleur coulage de bonze ?), Orpheus lève les yeux de son téléphone sans comprendre.
« What the- »