Homemade dynamite [Dakota]

CW : violence, racisme, sexisme, objectivisation de Dakota par le public, mention de drogues et d’alcool

Et tu vas passer… PAR DESSUS LA TROISIÈME CORDE !

Une bonne partie des spectateurs se lèvent et crient quand la jeune femme pas si impressionnante soulève l’énorme sac avec un german suplex et l’envoie bouler sur les sièges du premier rang. J’ai beau être heel, techniquement, ce soir, un paquet de mecs se mettent à m’applaudir. J’aimerai penser que j’ai convaincu un ou deux Macho McDummy que c’était pas la taille des muscles qui compte mais la technique, mais ils sont tous probablement assez torchés pour applaudir n’importe quoi. Je pourrai réciter du Corneille, debout dans un coin du ring, qu’ils crieraient toujours aussi fort et avec les yeux toujours loin de mes bras. Le moment d’euphorie passe de toute façon encore plus quand l’arbitre me murmure avec une haleine de Guiness qu’il faut conclure. Pas de temps à perdre : Tornado-DDT, un doigt d’honneur au public et frog splash.

AND NEEEEEEW, number one contender for the North-East Cost unified championship : Daaaaaaa-ko-taaaaaaaa !

Les huées sont faibles : le manager sera pas content. Je lui avais pourtant dit que c’était plus à la mode de me faire jouer la luchador dura au faux accent mexicain face au soit-disant « Perfect American ». Ça se voit bien quand même que je suis pas plus latina qu’El Generico ou Ariana Grande. Je boitille quand même jusqu’à mon stand de merchandising : c’est pas le putain de petit cachet qui me paiera de quoi oublier Gabriel quelques nuits de plus. Les dealers comme les bars sont trop chers à DC et je crois que même l’arbitre est mieux payé que moi. Il est pas nouveau lui, il a la même couleur de peau qu’Hulk Hogan et John Cena et on lui demande pas de raccourcir son short avant de monter sur le ring. C’est pas lui, pourtant, qui s’est pris une clef de bras d’une minute qui n’avait rien de simulée. Je sais pas pourquoi ils me l’ont fait gagner, ce match, mais mon adversaire m’en tenait clairement rigueur.

Respectueusement,…

Ohla. Je cherche le respect dans la proposition, parce que derrière la chaleur de la proposition il y a soit de la stupidité, soit une misogynie bien profonde. Soit… Oh. Un double facteur. Monsieur est complètement torché et monsieur est un militaire. Ma moue se teinte d’un mépris que je réserve d’habitude à mon personnage. L’un des problèmes principaux de la capitale est la présence en grand nombre de ses gringalets qui, parce qu’ils savent massacrer des populations civiles au M-16, pensent qu’ils sont les héritiers de G.I. Joe, Captain America et Solid Snake. Problème pour lui : j’ai toujours rêvé de mettre une Power-Bomb à G.I. Joe.

Si tu sais aussi bien te battre que tenir l’alcool, je devrai pas avoir de problèmes, Action Man. Faudra pas venir chouiner quand demain ta gueule de bois sera servie avec un supplément de bleus, tête à claques.

J’attrape un micro et m’élance au milieu du ring. J’ignore le regard noir du manager : de toute façon sa ceinture en carton a l’air dégueulasse. À quoi bon faire ce métier si on peut pas donner une leçon à des Tibo In Shape version Malibu ?

Oh, les gars ! Vous avez un Encore ce soir ! Je mets en jeu mon titre de prétendante n1 contre… T’es qui, en fait ?

Je lui tends le micro avec un air carnassier. Je sais pas avec quel diable il a parié, mais il est tombé sur la mauvaise fille, dans la mauvaise soirée. Parce qu’une boite entière est en train de le pousser à affronter une nana dont il ne doit pas savoir qu’elle est ceinture noire de judo, championne de MMA et formée au krav maga. Et, surtout, je n’ai plus un seul gramme de patience.