We all grew up, shit got tough - Nikki et Sieq

Sieq n’était pas un amoureux de la nature, il n’avait jamais cherché les retrouvailles avec des espaces sauvages et insoumis, la verdure ne l’émouvait pas plus que le bruit battant d’une cascade. L’herbe, la mousse, les champignons et les fleurs étaient juste du décoratif sur son chemin. Pas qu’il appréciait plus la ville ; ça faisait partie de sa personnalité ; montagne ou plage, ville ou campagne, nature ou modernité, rien ne tirait de sa tronche contrite un sourire.

Il n’avait donc pas les clés pour comprendre l’attachement du benjamin Sem pour ces petites vies enracinées dans des pots, immobiles et prenant plusieurs heures à bourgeonner quand cela arrivait enfin. Une véritable épreuve de survie pour ne pas mourir d’ennuie. Epreuve qui malgré tout demandait aussi une rigueur insoupçonnée pour faire prospérer les plantes, les nourrir, les tailler, veiller à leur bien-être.  

Si Edgeston ne connaissait pas Nikki Sem, il dirait que seuls les plus équilibrés mentalement pouvait être capable d’une telle prouesse : son propre esprit était bien trop volcanique pour qu’il puisse tempérer ses ardeurs et s’occuper avec douceur et minutie d’un organisme qui ne lui rendrait que des feuilles grasses et du pollen en récompense. Mais aucun membre de cette famille qu’il connaissait ne pouvait être qualifié d’équilibré et il parlait en étant un des moins à même de juger la stabilité de quiconque.  

Et malgré tout, il fallait avouer que ça avait presque un côté reposant de regarder le Zouwou s’occuper de ses plantes, loin des énormes conneries de Roman et plus largement du conflit qui agitait leurs vies de révoltés. Ce n’était pas rare que le résistant fasse le tour de ses protégés pour vérifier que tout était en ordre et Nikki faisait partie de ce petit groupe qu’il gardait à l’œil. Par la vitrine de la fleuristerie, il le regardait s’agiter alors que machinalement il faisait le mouvement pour amener une clope à ses lèvres avant de se rappeler qu’il était en train d’arrêter ; pour la troisième fois cette année. Si frustrant.  

Alors que la pause méridienne aurait dû amener le plus jeune à quitter son poste, Sieq entra dans la petite boutique en faisant carillonner les lieux. Le zouwou était-il du genre à oublier de se nourrir ? Vu sa carrure, probable. Vu que le plus âgé était là, c’était peut-être l’occasion pour lui de proposer au discret benjamin de mettre quelque chose dans son estomac surement rabougrie.  



“Hey. Pas parti manger ? Ca tombe bien, j’avais une question. Comment on dit en langage des fleurs : Arrête de faire de la merde ? C’est pour une connaissance commune, j’aimerais lui acheter un beau bouquet. Et au passage, c’est quelle plante représente le mieux le lâche tes pétunias, je t’emmène manger un truc avant que tu fasse un putain de malaise ?.” Se rappelant qu’il parlait à Nikki, il décida de clarifier son idée. Sinon, ils étaient encore là pour des jours, le cul dans les ronces. “Ca c’est pour toi, et ça veut dire ; viens bouffer, je t’invite et je n’en ai rien à foutre si ça ne te tente pas.”