The floor hits hard | Juni II

5 février 2022, 11 jours après ce RP

De sa chute, Jude ne gardait qu’un vague souvenir. Une peur , contraignante, si violente qu’elle avait été incapable se transformer pour échapper au sol, plus de cinquante mètres plus bas. Les fêtes, Jude ne les aimait pas, elle ne les avait jamais aimé, et celle-ci serait certainement le top 1 des pires fêtes qu’elle avait été forcée de voir. Elle était revenue à la Nouvelle Orléans pour son client. Elle avait compté sur sa présence dans la ville pour visiter quelques garages qui avaient l’air idéaux pour le projet de créer son club. Mais Jude était tombée.

Elle se souvient un peu de pourquoi. La dispute, les mains, Azur qui la pousse.  La force de la main du français sur le thorax de la dragonne. La balustrade du rooftop qui cogne dans le bas du dos, la sensation de vertige, le verre qui lui échappe de la main, et puis le vide.

Elle aurait pu mourir, elle aurait dû mourir. Pendant une fraction de seconde, elle s’était dit qu’au moins ça n’était pas la malédiction de Vanessa qui aurait eu raison d’elle. Mais même cette idée là n’avait pu la réjouir, pendant ces si longues secondes de chute libre. La mort était une perspective qui avait toujours effrayé la dragonne. Elle n’avait plus peur de la solitude, des blessures, de l’inconnu, du variable, mais la mort elle, était une ombre qui chaque soir sifflait à ses oreilles sa présence si proche, et si lointaine à la fois. Comme un souvenir récurent de l’incertitude du futur de Jude.

Mais elle n’était pas morte. Elle se souvenait de la douleur, intense, si forte qu’elle n’en avait pas senti la poussée de vent qui l’avait comme par magie freinée dans sa course vers la mort. Les cris, les gyrophares, l’ambulance, tout ça Jude l’avait oublié.

Il paraissait qu’elle était restée inconsciente plusieurs heures. Quand elle s’était réveillée, elle était déjà à l’hôpital. Elle n’avait pas mal, elle ne sentait pas sa jambe. Un médecin l’avait rassurée en lui disant que c’était à cause de la morphine. Pour vérifier, Jude du faire bouger des orteils. Ce fut douloureux, mais elle y parvint. Le médecin lui avait alors fait des radios. Jude avait le tibias cassé dans la jambe droite, et sa jambe gauche était en morceaux.

C’était un miracle disait les équipes de soin. Aucun nerf n’étaient touchés, et après quelques opérations, et une longue rééducation, Jude serait comme neuve.

Azur était venu, souvent, la dernière fois il y avait deux jours. Il s’en voulait, Jude au début avait été bien trop assommée par ses anti-douleurs pour réellement comprendre ce que le français lui expliquait. Il avait insisté auprès de l’hôpital pour que toutes les factures de soin de Jude soient envoyé à son adresse à lui. La mécano au début ignorait si c’était pour redorer son image à lui, ou par réel remord.

Parce qu’il paraissait que sa chute avait fait la une des infos locales. Un accident si grave dans une fête où tout le gratin de la ville était réunie, ça faisait du bruit. Le fait qu’elle aurait dû mourir mais avait été sauvée par un surnaturel. Au moins une chose qui mettait un bon point pour la cause… Jude avait été envoyée dans un hôpital surnaturel. Elle espérait que cela ne lui cause aucun problème, elle qui n’a jamais été recensée. Peut-être que si on disait aux humains que c’était parce qu’Azur l’avait demandé, cela passerait mieux.  Mais cela restait moins risqué que de se faire examiner par des humains qui ignoraient tout de sa condition.

Cela faisait maintenant dix jours qu’elle était admise à l’East Jefferson General Hospital. Un mois et demi plus tôt, elle passait devant pour se rendre au garage après avoir dis au revoir à Dani. Des au revoir qui, plus elle y pensait, plus sonnaient comme des adieux. Elle n’avait pas prévenu Dani. Qu’aurait-elle dit ? Quel aurait été l’intérêt ? Ses recherches pour retrouver Vanessa n’avait pour le moment abouties à rien. Et elles étaient en suspens depuis presque deux semaines… De toute façon, la dragonne ignorait toujours ce qu’elle ferait à Vanessa si elle la retrouvait.

Pendant sa convalescence, Jude avait pu appeler l’agence immobilière. Les photos du garage qu’elle avait vu était suffisant et elle avait annoncé son désir de l’acheter. L’agent avait accepté de mettre l’offre en réservation, le temps que Jude puisse sortir, visiter quand même, et signer les documents. Vu ses blessures, on avait assuré à Jude qu’elle passerait au moins quatre mois en chaise roulante, d’office plus si cela se compliquait ou si elle en faisait trop, trop vite, mais certainement pas moins.  En l’espace d’une semaine, elle avait subi quatre  opérations pour remettre ses os en place. On lui avait fait plusieurs autres examens pour s’assurer qu’elle ne souffrait d’aucun autre traumatisme. Et pendant tout ce temps, cet enfoiré de Chambort avait simplement disparu. Elle comptait bien le mettre sur sa liste noire de clients, Jude n’était pas assez payée pour subir le sexisme et l’insistance constante de ce con.

La dragonne était allongée dans son lit. Un plâtre jusqu’à la jointure avec sa hanche pour la jambe gauche, la jambe droite seulement jusqu’au genou. C’était au moins ça. Deux fois par jour, on la mettait sur une chaise pour qu’elle prenne l’air. Mais pas aujourd’hui, aujourd’hui Jude avait plus mal que d’ordinaire. On avait diminué sa dose d’anti douleurs, et elle avait l’impression que ses jambes étaient entaillées d’une centaine d’éclats de verre. Il y avait des bips constants dans sa chambre, une perfusion dans son bras droit et d’autres trucs, capteurs et machins-choses dont elle ignorait encore l’utilité. « Pour surveiller une septicémie des plaies de l’opération » avait baragouiné une infirmière. Enfin, rien que Jude puisse comprendre, elle était mécanicienne, pas médecin. Elle regardait par la fenêtre à sa droite. Il faisait vraiment moche, il pleuvait et ventait, mais elle voyait le lac Pontchartrain de sa chambre, alors ce n’était peut-être pas si chiant… Elle avait toute la journée pour regarder les bateaux passer.

Quelqu’un toqua à sa porte, Jude souffla un « entrez » en s’attendant à voir une infirmière, ou Azur.  Elle tourna la tête vers l’entrée de la chambre.

T'as jamais été du genre à suivre les infos. Elles te paraissent toujours faussées, ou ponctuées d'ajouts inintéressants. Quitte à choisir, tu préfères regarder le film de ton choix, ou te perdre dans tes lectures. Alors, t'aurais pas pu savoir. N'est-ce pas ? C'est ce que tu te répètes, tout en ayant du mal à y croire. Depuis le départ de Jude, ta vie a plus ou moins repris son cours. Concerts, quêtes divines... ton lot habituel, en plus de tes recherches liées à la malédiction qui touche la motarde. Pour l'instant, tu n'as rien trouvé. Les sorcières qui s'y connaissent vraiment ne courent pas les rues, et c'est pas comme si tu pouvais passer une annonce dans le journal. Mais tu n'abandonnes pas, ce n'est que le début. T'as pas vraiment eu de nouvelle de la brune, si ce n'est lors de son départ de la Nouvelle-Orléans. Au fond, ça te permet de mariner correctement au sujet de tout ce qu'elle t'a dévoilé. La pilule est dure à avaler, mais tu travailles aussi là dessus. Accepter tout ça sera la première étape, avant de savoir quoi en faire. Tu te demandes souvent à quoi peut penser Jude. À toi ? À cette nuit que vous avez passé ensemble ? Tu te questionnes sur son moral, et même sur les petits détails qui ont pu changer depuis votre séparation. T'as imaginé beaucoup de choses, ces derniers jours. Plein de scénarios aussi délirants les uns que les autres. Ceux dans lesquels vous la libérez de son fardeau. Comme ceux plus malheureux, qui te donneraient presque envie de fuir à nouveau. Mais pas ça.

Tu l'as appris par la force des choses, en passant devant l'hôpital. Ton crâne est devenu douloureux, et t'as pas eu d'autre choix que de foncer à l'intérieur. Il est rare, que tes intuitions soient si violentes, mais c'est déjà arrivé. Parfois, il ne s'agit que d'un appel à l'aide d'une autre personne. Et vu l'endroit où tu te trouves, ce ne serait pas étonnant. D'ailleurs, il ne s'agit pas de la première fois que tu es attirée ici. Celle-ci semble juste différente des précédentes. Pendant quelques instants, ton estomac se tord sous l'adrénaline semblable à celle d'une chute. Puis, tu as l'impression d'être paralysée, entourée par un voile blanc et quelques lumières. La vision n'est pas agréable, mais tu comprends facilement qu'un accident a eu lieu, ou va avoir lieu. Tu n'en sais pas plus, sauf que l'urgence qui agite ta poitrine est puissante. De toute évidence, c'est très important, et tu vas tâcher d'en découvrir plus. T'abandonnes donc tes plans pour la journée, et tu fonces à travers les couloirs en ignorant les appels de l'infirmière à l'accueil. À quoi bon lui parler ? Tes pas te guident déjà dans la bonne direction. Il s'agit d'un hôpital pour surnaturels, alors ça ne devrait étonner personne. En plus, t'es pas dans l'état de redouter un contrôle. Ça parait insignifiant, face à... ce que tu découvriras. Tu t'arrêtes finalement devant la porte d'une chambre, qui ne laisse rien entrevoir de ce qu'il y a à l'intérieur. Ton poing vient se heurter au bois de la porte, et la voix qui retentit depuis l'autre côté te fige soudainement sur place. Comment... ? Tu as du mal à y croire. Tu ne le veux pas, même, mais c'est bien Jude que tu retrouves en poussant la porte. Elle est allongée sur ce lit d’hôpital, et a l'air clairement amochée. Les lèvres entrouvertes par la surprise, ton regard finit par capter le sien. « Jude ? Je te pensais repartie depuis des jours... » murmures-tu d'abord, encore essoufflée par ta course. « Comment c'est arrivé ? Pourquoi tu es tombée ? » ajoutes-tu ensuite, cherchant à mettre des explications sur les bribes de souvenirs que tu as vu. Entre temps, tu as fait quelques pas en sa direction, laissant la porte se refermer derrière toi.

La surprise est trop grande pour en dire plus. Pourtant, tu aurais un millier de questions à lui poser, en commençant par lui demander comment elle se sent. Avec deux jambes dans le plâtre, ce n'est certainement pas la joie, mais si elle souffre, tu veux pouvoir l'aider. Tu veux comprendre, car une telle chute ne peut se faire d'une moto. C'est autre chose, et pour qu'un être pourvu d'ailes comme un dragon, s'éclater au sol te parait pas normal.

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Elle cligna plusieurs fois des yeux, ne croyant pas à la personne qui se trouvait en face d’elle. De tous les êtres sur terre, Dani était la personne que Jude aurait voulu voir ici, elle ne voulait pas que la sorcière la voie dans un état pareil… et pourtant, la voilà, dans l’encadrement de la porte, aussi surprise que la dragonne, et pourtant essoufflée comme si elle avait couru jusqu’ici.

Elle se serait bien relevée ou redressée pour l’accueillir, mais là Jude ne pouvait simplement pas bouger de son matelas. Il y avait un fauteuil juste à la droite de son lit, elle espérait que Dani s’y assiérait, qu’elle se rapproche. Mais Jude ne le lui proposa pas, toujours concernée par l’arrivée de la sorcière. Leurs regards se croisèrent, Dani fut la première à parler, sortant Jude de sa surprise.


L’histoire était longue, mais quand il s’agissait d’affaire, Jude renonçait rarement. C’était ce qui rythmait principalement sa vie après tout. Dani l’assailli de questions, autant qu’en avait Jude, mais cette dernière n’eut le temps d’en poser aucune. Elle tenta de se redresser quand même, saisissant la poignée en triangle au-dessus de son lit pour se tirer vers le haut du matelas dont elle redressait en même temps la tête. Elle n’aimait vraiment pas être couchée comme ça. Les mouvements provoquèrent un peu de douleur qui lui tirèrent une grimace, mais ce fut vite oublié une fois qu’elle fut correctement installée. Heureusement pour elle, le plâtre de la jambe gauche n’entravait pas les mouvements de sa hanche.  Dani s’est rapprochée, la porte se ferma doucement derrière elle, dans un claquement étouffé à peine audible et aussitôt, tous les bruits du couloir s’arrêtèrent. A présent, les seuls sons dans la pièce étaient les voix des deux femmes, et les bips des machines auxquelles était reliée Jude.

Jude reposa son regard sur Dani. Tentant de remettre de l’ordre dans ses idées, répondre à ses questions. La dragonne était gênée de la situation, mais elle ne pouvait pas non plus foutre Dani dehors. Et soyons honnêtes, même si elle le pouvait… elle ne le ferai pas. Au final, c’était une bien meilleure visite que celles que Jude avait cru avoir. Et elle avait même l’impression qu’il faisait plus agréable dans la pièce maintenant que Dani était là…


L’humour, encore de l’humour. Dani finirait par comprendre qu’elle faisait ça quand elle se sentait en insécurité. Irait-elle jusqu’à avouer que c’était d’un toit d’immeuble que Jude était tombée ? En tout cas, elle ne tomberait pas dans le panneau du trait d’humour. Alors le visage de Jude se fit sombre à nouveau quand elle détourna le regard pour observer la fenêtre, de l’autre  côté.


Azur en savait plus. Jude devait lui redemander les détails de l’évenement. Étrangement, elle avait bien plus confiance en ses dires à lui qu’à ce que Tyler pourrait avancer comme connerie pour conserver son image. Le français avait arrêté de parler de l’accident quand Jude le lui avait demandé. Mais la dragonne n’avait toujours pas compris la totalité des faits. Peut être avait elle bien fait de ne pas parler de la hauteur du toit. Personne n’aurait survécu  à une chute d’une telle hauteur. Même moitié plus petite. Jude poussa un soupire, elle était en vie. Elle avait eu si peur. Encore maintenant, l’idée que sa vie avait pu s’arrêter d’un coup si le français n’avait pas été là la terrifie. Elle n’en dormait plus tellement. Son soupire fut saccadé. Mais elle tourna la tête vers Dani.


Jude ne l’avait pas prévenue de son hospitalisation justement pour que la sorcière ne la voie pas ainsi, et sans doute aussi pour éviter que le cœur de la dragonne ne s’emballe trop à nouveau. Et si Dani avait suivi les infos, elle serait arrivée bien plus tôt que seulement onze jours après l’accident. Alors Jude ne quitta pas le regard d’ambre de la sorcière, autant pour s’y noyer que pour attendre sa réponse.

La première phrase de Jude est vite mise de côté dans ton esprit. Elle est partie, puis elle est revenue, l'explication te suffit. Tu te doutes que ça a rapport avec le travail, mais tu sais surtout que la brune n'a aucun compte à te rendre. Au fond, t'aurais aimé être au courant, mais tu es aussi celle qui a voulu garder une distance entre vous. Impossible de te plaindre à présent, et l'état de la dragonne est de toute façon ce qui t'inquiète le plus. Tu t'es approchée, et tu n'oses même pas la toucher en la voyant se redresser difficilement. Avec toutes ses blessures, tu craindrais presque de lui faire mal en l'effleurant. Heureusement, la brune semble soulagée une fois correctement installée. Sans réellement t'en rendre compte, tu l'as assailli de questions qui auraient certainement pu attendre. L'important est qu'elle soit en vie, l'important est qu'elle guérisse. Les pourquoi ne peuvent plus être changés, de toute façon. Malgré tout, la motarde ne semble pas offensée, et elle finit par te répondre d'une manière qui te laisse pantoise. À nouveau, l'humour te dérange pas, mais t'étais pas prête. Pas maintenant, dans cette situation. Tu sais que c'est la façon de Jude de gérer tout ce qui lui tombe dessus, de gérer ta présence, certainement. Son visage finit par s'assombrir, et son regard se détourne. Pendant qu'elle recommence à parler, tu te décides enfin à t'approcher, ayant remarqué le siège à côté de son lit. Tu l'avances un petit peu pour pouvoir lui faire face, avant de t'y poser. Au moins, ça lui fera comprendre que tu comptes pas repartir de suite. Qui sait, ça t'aidera peut-être aussi à organiser un peu tes pensées.

L'apaisement est de courte durée, toutefois. Ta stupeur est certainement visible quand la brune t'apprend que quelqu'un l'a en fait poussée. « Quelqu'un ? Qui ça ? » réponds-tu après quelques secondes. Tu peux entendre qu'un désaccord puisse être agaçant, mais de là à en venir aux mains... Tu ne le diras pas, mais une pointe de rancoeur est née au creux de ta poitrine. Que quelqu'un puisse causer à Jude autant de souffrances volontairement, tu as du mal à l'avaler. Malheureusement, ta vision ne t'a pas procuré ce type d'informations. D'ailleurs, même si c'est déjà pas mal, la chute d'un toit te parait moins impressionnante que celle que tu as plus ou moins expérimenté à travers ton intuition. Mais, faut dire que t'as jamais vécu ça dans la réalité, et tu ne vas pas remettre en question ce que Jude a pris la peine de t'expliquer. Elle te semble si fatiguée, vue de près. Comme si la douleur l'empêchait de fermer l'oeil.

Sous le coup de la compassion, tu viens glisser ta main dans la sienne. Pour l'avoir vue bouger tout à  l'heure, celle-ci ne doit pas être douloureuse. « Ça fait partie de mes pouvoirs. Je peux... voir ou sentir certaines choses. » réponds-tu dans un soupir. Tu aurais tellement voulu que ça soit une prémonition. De pouvoir la retenir avant la chute. T'es censée être là pour ça, et tu te sens terriblement inutile à ses côtés, alors qu'elle est coincée dans ce lit d'hôpital. Mais il n'est pas question de te plaindre, à nouveau. C'est Jude qui est dans le pire état, et désormais, tu es là pour elle. « Je ne vais pas te demander si ça va, vu ton état... mais est-ce que je peux faire quelque chose ? » Si c'est en ton pouvoir, t'essaieras de lui apporter tout le nécessaire. Que ce soit du soutien, des sucreries ou même de quoi l'occuper un peu. Les journées doivent être bien longues, ici !  « Tu en as pour combien de temps avec tout ça ? » oses-tu demander ensuite. Pour ses jambes, ça a l'air plutôt sérieux, et en plus elle ne réside même pas ici, ce qui pourrait compliquer les choses pour elle à l'avenir. C'est un besoin de savoir, tu le nies pas, mais c'est aussi dans l'intérêt de l'aider si besoin. Dans tes souvenirs, elle n'est plus proche de sa famille depuis bien longtemps, alors pas sûr qu'elle les ait prévenu, encore moins qu'ils se pointent.

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Jude n’avait pas remarqué que la sorcière s’était approchée, jusqu’à en déplacer le fauteuil pour être plus en face. Ainsi, quand la dragonne tourna la tête de nouveau vers l’intérieur de la pièce, elle ne cacha pas sa surprise en la voyant soudainement si proche. Il en fallu peu à la blonde pour demander l’idendité du type à l’origine de sa chute, Jude fit un mouvement vague de la main.


Elle poussa un long soupir, disant mentalement adieu à la tonne de chiffre d’affaires qu’elle n’allait plus revoir une fois qu’elle aurait rompu son contrat.


Elle avait subi bien trop de fois la pression de Chambort. Jude avait raconté l’histoire comme elle pouvait, du mieux qu’elle pouvait avec le peu dont elle se souvenait. Pour autant, elle n’a pas voulu mettre Azur dans la sauce, même si ça n’était que Dani. L’homme avait pour le moment fait tout ce qu’il pouvait pour réparer les choses. Alors certes, il ne réparerait pas les jambes de Jude plus vite, mais au moins il s’était assuré qu’elle obtienne les meilleurs soins possibles. Un contact dans sa main la fit sortir de sa rêverie. Elle baissa les yeux vers son bras gauche et… Ho.

Elle resta les yeux posés dessus un instant, la bouche entrouverte, ne sachant que réagir. Mais le contact, chaleureux, faisait du bien, alors pour éviter que Dani ne retire sa main en interprétant la réaction de Jude de la mauvaise manière, cette dernière referma délicatement sa main autour de celle posée sur sa paume, la tenant comme on tenait un trésor, en même temps qu’elle lâchait les mains du regard pour s’intéresser à la réponse de Dani. Aussitôt, la curiosité ralluma le visage de la dragonne.


Jude se demanda si Dani avait déjà ces intuitions à l’époque, il y a des années. Avaient-elles guidé la sorcière dans leur relation ? Avaient-elles aidé Dani à oublier la dragonne ? Mais le soupire que Dani avait poussé empêcha Jude d’assouvir l’intégralité de sa curiosité. C’était, en y repensant, pas mal indiscret comme question… Elle rougit un peu de gêne et bafouilla.


Elle sourit d’un air voulu rassurant. Finalement, elle prit le temps de réfléchir.


Elle doutait que Rogus ne fasse à nouveau irruption au garage avec de nouvelles pièces de sitôt, la dernière fois était relativement récente. Et puis Jude avait promis qu’elle finirait par passer. Elle ne se souvenait pas de si le gamin avait un téléphone, pour le prévenir. Elle aurait bien aimé lui éviter de refaire toute la route depuis Phoenix jusqu’à Waco pour trouver un garage vide… Puis, son visage s’éclaira.


Elle rit, elle tuerait probablement pour un bon steak. Mais selon son médecin, elle sortirait bientôt. Comme faisant écho à cette pensée, elle répondit à la dernière question de Dani.


Les caisses prioritaires, les places de parking réservées, les accès spéciaux dans les transports… Jude cacha son désespoir en se raccrochant à la courte durée de sa convalescence. Elle qui avait vécu presque trois quart de siècles sans cesser de bouger, devait se coltiner seulement quelques mois totalement assise. Elle réussirait, ça serait pas compliqué.


Comme ça, elle quitterait la ville, et pourrait s’occuper de fonder son club sans grande difficultés depuis chez elle. Jude ignorait encore comment elle fonctionnerait la majorité du temps. Peut être qu’elle pourrait retourner bosser avant de pouvoir se relever. Certaines réparations ne demandaient pas à la mécano d’être debout, et ses capacités draconiques lui permettaient de réaliser bien souvent un diagnostique sans passer la moitié du corps sous le capot. Elle travaillerait moins ,c’est sûr, mais au moins aurait un revenu, et ne passerait pas six mois sur ses économies qui ne tiendraient certainement pas le rythme.

Le portrait que Jude te fait de son agresseur n'a rien de reluisant. Ce qui t'intrigue est qu'elle te dit avoir été poussée d'un building, alors que précédemment elle parlait d'un toit. Tu te dis qu'il s'agit sans doute d'une erreur dans l'un des deux cas. Après tout, la dragonne a subi un sacré choc. Qui plus est, la chute d'un immeuble te parait plus crédible vu ses blessures, mais ça ne fait qu'empirer le geste de celui qui l'a mis dans cet état. T'aimerais bien connaître son nom, même si tu ne saurais pas quoi en faire dans l'immédiat. Disons que si tu le croises un jour, tu saurais à quoi t'en tenir. Mais tu n'insistes pas, car de toute évidence Jude t'a dit tout ce qu'elle souhaitait dire. « T'as plutôt intérêt à lâcher ce sale type, ouais. Tu comptes pas le poursuivre ? » Bon, la loi est rarement du côté des surnaturels, mais si ce gars a agi comme ça avec une, alors il y a des chances pour qu'elle soit pas la seule. Néanmoins, tu comprendrais que Jude souhaite simplement se protéger après tout ça. Alors qu'elle te questionne sur ta présence ici, tu viens glisser ta main dans la sienne. Vu sa tête au départ, t'es pas tout de suite sûre que ce petit geste de soutien soit le bienvenu. Finalement, avant que t'ai pu bouger à nouveau, la brune referme sa paume sur la tienne. Un sourire s'esquisse sur tes lèvres, et tu finis par répondre à sa question. Elle sait déjà que tu es une sorcière, alors il est évident que des pouvoirs viennent avec.

En tout cas, son visage a changé d'expression, comme si aborder un autre sujet lui redonnait un peu le moral. Tu ne sais pas si c'est vraiment le cas, mais pas question de t'en plaindre, alors tu comptes lui offrir quelques précisions. « Non, ce n'est pas ça... J'aurais juste aimé arriver plus tôt. Ce n'est pas précis, j'ai juste eu quelques flash... un peu comme des visions, ou des souvenirs. Avec le temps, on apprend à les interpréter. » Tu ne veux pas qu'elle soit gênée, alors que tu n'as soupiré que par dépit. Ceci dit, ses rougeurs sont attendrissantes, car elle n'est pas du genre à s'empourprer facilement. Tu n'en dis pas plus sur tes pouvoirs, car c'est une histoire bien trop longue et compliquée pour aujourd'hui. Un jour, peut-être, elle en saura plus. Là, ce ne sera pas bien utile. Utile. C'est ce que tu aimerais être pour Jude, alors tu ne tardes pas à te proposer pour ce dont elle peut avoir besoin. À défaut d'être arrivée à temps pour la sauver, tu comptes rendre ses journées un peu moins pénibles si c'est possible. La dragonne te parle d'abord de son garage, qui est à priori déjà pris en charge, puis du fait que personne ne l'attend à part ça. C'est un peu triste, mais tu n'arrives pas à en être déçue. C'est égoïste, surtout vu ce que tu lui as dit la dernière fois, mais savoir qu'elle n'a personne dans sa vie est un peu... rassurant.
 
Son rire te réchauffe le coeur, et tu ne peux réprimer un sourire. En effet, il n'est pas rare qu'on se plaigne de la nourriture de l'hôpital... mais tu as peut-être une solution à ce sujet. « Et bien dis moi, qu'est-ce qui te ferait plaisir ?  » Tu pourrais aller chercher un plat à emporter, et lui déposer, un de ces jours. Même si elle sort bientôt, un bon repas donne des forces et peut égayer une journée. Vu ce qui l'attend, ça ne sera pas du luxe. Tu t'attendais à une longue convalescence, mais certainement pas à ce point. La moitié d'une année pour ses deux jambes, tout cela en fauteuil roulant... ça a de quoi changer toutes les habitudes d'une vie. Une vie durant laquelle la mécano doit se débrouiller seule... Tu te mords l'intérieur de la joue en l'imaginant repartir seule en taxi, et se retrouver chez elle sans pouvoir atteindre le placard du haut, ou conduire son propre véhicule. Ouais, ça sera vraiment compliqué. Malheureusement, t'as pas de remède miracle de sorcière pour l'aider. Faudrait que tu questionnes ta famille pour voir les possibilités. Tu as du mal à cacher ta gêne, lorsque tu réponds. « Chez toi ? Mais comment vas-tu te débrouiller seule ? » C'est une question rhétorique, car il y a bien des personnes handicapées qui vivent très bien seules. T'as juste du mal à accepter de la laisser partir ainsi. « Si tu restes par ici, je pourrais t'aider. Au moins pour tes repas, et que ça soit pas trop le foutoir autour de toi. » Elle aurait sûrement besoin d'aide pour d'autres choses encore... mais peu importe, dans l'immédiat et quelques soient les possibles conséquences, tu préfères te montrer présente. Tu n'as pas lâché sa main. Au contraire, tu as un peu plus serré sa paume dans la tienne, t'attendant à une réponse négative de sa part. Après tout, t'aurais certainement refusé à sa place. T'oublies bien vite que vous êtes des ex, et qu'à part vos récentes retrouvailles plus rien ne vous uni depuis un sacré temps.

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Le poursuivre ? Jude y avait pensé, a vrai dire c’était pas à proprement parler Chambort qui l’avait poussé du toit. Le seul qu’elle avait le droit de traduire en justice c’était Azur, qui avait effectivement poussé la dragonne. Mais  c’était un accident, et il faisait tout pour le réparer. Jude secoua la tête.


Elle savait même pas si elle dirait non au chèque. Encore fallait-il qu’on le lui présente.

Compréhensive face aux précisions sur le pouvoir de Dani, Jude hocha la tête, caressant inconsciemment le dos de la main de la sorcière avec son pouce. Elle lui fit un sourire rassurant.


Tu es là maintenant.

En y repensant, Jude ne savait pas, au final, si Dani aurait apprécié cette fête. Elle donnait des concerts maintenant, peut être que la foule lui était moins inconfortable. Mais ça n’était pas le même genre de foule, Jude en était sûre.  D’ailleurs la dragonne n’avait encore jamais entendu ses chansons d’aujourd’hui. Elle aurait pu faire un effort, et tenter de se renseigner. Au lieu de quoi elle avait pris les paroles de Dani, la dernière fois, au sérieux, et avait tenté de mettre une distance.

Et maintenant Dani était là. Et c’était bien mieux que n’importe quoi d’autre ces derniers jours.

Finalement, le sujet de la nourriture revint sur le tapis, Jude leva un sourcil.


Non pas qu’elle ne croyait pas la sorcière capable de faire une telle chose, mais… ça lui paraissait aussi étrange qu’attendrissant, étant donné la douleur avec laquelle Jude était partie la dernière fois, sous les mots de la sorcière. C’était contradictoire, et elle ne savait pas quoi en penser. Mais la dragonne n’allait pas montrer son incompréhension. Il fallait éviter de mettre Dani mal à l’aise, et invoquer ce qu’il s’était passé le mois dernier était probablement la pire des choses, là maintenant, tout ce que Jude voulait ,c’était que la musicienne reste le plus longtemps possible.


Rien qu’à y penser, elle saliverait presque, s’imaginant croquer dans ce pain béni. Quand Jude évoqua sa future organisation, elle fu presque frappée par la gêne de Dani. Pourquoi cela l’inquiétait ? Elle partirait, s’éloignerait à nouveau, c’était ce que Dani avait voulu… Non ? Le désarroi de la dragonne s’afficha dans son regard.


Mais Dani répliqua aussitôt, proposant encore plus d’aide que ce à quoi Jude aurait pu prétendre. Cette dernière n’aimait pas du tout l’idée d’être assistée à ce point, après tout elle avait conservé une sacrée indépendance. Mais imaginer Dani l’aider adoucissait d’un coup beaucoup l’assistanat auquel Jude devrait se résigner à se soumettre. Elle savait qu’elle ne tiendrait pas six mois toute seule, ho ça elle le savait. Mais l’admettre ? Hoho jamais.

Elle soupira, plus par gêne que par ennui. Son pouce continuait de caresser le dos de la main de Dani.


Histoire de récupérer des fringues, et puis sa plante. Elle avait déjà galéré à la maintenir en vie (ne parlons pas des dizaines qui y sont passées avant) c’était pas pour l’abandonner à Waco. En même temps, son visage s’éclaira alors qu’elle repensait à son projet de club motard.


Elle avait une idée bien concrète de son club motard, elle avait hâte de lancer le projet, et en y repensant quit à être coincée à la nouvelle orléans, autant en profiter et bosser là-dessus !

Revigorée, Jude avait soudain mieux confiance en l’avenir proche, elle hocha la tête.


La confiance qui émanait de Jude rassurait cette dernière. Elle regarda à nouveau le lac à travers la fenêtre.


Rester à la Nouvelle-Orléans, quelques temps.

Acheter le silence de quelqu'un, ça te parait être une attitude méprisable. Il te semble difficile de respecter une personne qui utilise ses pouvoirs ainsi. Malheureusement et comme le soulève Jude, il est sûrement inutile d'essayer d'obtenir réparation via les voies légales. En plus, ruiner la réputation d'un tel homme pourrait bien lui attirer plus d'ennuis, et tu préfères la savoir tranquille. S'il s'agissait de toi, ce serait différent... mais en ce qui concerne la dragonne, tu n'aimes pas les prises de risques. Tu hoches donc doucement la tête, approuvant le raisonnement adopté par la brune. Comme toujours, elle fonctionne de la manière la plus logique. En te faisant la réflexion que certaines choses n'ont pas changé, un léger sourire vient esquisser tes lèvres. Il ne tarde toutefois pas à se faner avec tes brèves explications concernant tes pouvoirs, et les regrets que tu nourris par rapport à ton retard. Mais encore une fois, la blessée se montre pleine de chaleur, tout comme sa caresse sur le dos de ta main. Ce geste te parait presque trop naturel, au point de te faire oublier un instant tes remords. Bien sûr, Jude ne te fait pas le reproche de n'avoir lu l'avenir, mais t'auras malgré tout du mal à l'avaler, c'est certain. « Peut-être... » réponds-tu simplement, un peu perturbée par sa proximité et par ce que tu viens de réaliser. Peut-être que t'aurais pas aimé cette soirée, mais l'idée n'aurait sûrement pas été si terrible, aux côtés de Jude. Tu préfères mettre cette sensation de côté, te persuadant que cette faiblesse est due à la situation actuelle. La réalité ne pourrait être aussi simple, n'est-ce pas ? Votre récente discussion l'a bien démontré.

Changer de sujet et évoquer le repas que tu pourrais porter à Jude un de ces jours se révèle être une bouffée d'air frais. D'abord, car cette discussion est beaucoup moins lourde que la précédente, mais aussi parce que cette éventualité semble vraiment plaire à la dragonne. Tu ne t'attendais à vrai dire pas à ce que cette proposition fasse autant mouche, mais c'est tant mieux. Faut croire que la nourriture de l'hôpital est vraiment aussi peu ragoûtante qu'on le raconte ! Quelque peu amusée, tu hoches la tête à la question posée par ton interlocutrice. Oh oui, tu le ferais, et avec plaisir. Tu ne préfères même pas expliciter l'avantage de cette suggestion : la revoir bientôt.  « Un hamburger, c'est noté. » souris-tu sans surprise. Quoi de mieux qu'un peu de gras, pour reprendre des forces ? En plus, tu connais une bonne adresse qui propose les plats à emporter, et tu serais heureuse de la faire découvrir à la dragonne.

Ton regard se détache du sien dès que l'incompréhension s'y affiche. Bien sûr, ton inquiétude soudaine peut paraitre étrange. T'es celle qui a voulu la repousser, et il est évident que Jude saura se débrouiller quoi qu'il arrive. Comme beaucoup d'autres personnes dans des situations similaires, partout dans le monde. C'est vraiment un mauvais argument, et t'as rien à ajouter pour ta défense, si ce n'est proposer ton aide. Malgré tout, pas une seule seconde Jude ne met fin à ses caresses. Et contre toute attente, elle approuve même ta suggestion. Un peu surprise, tu hoches d'abord doucement la tête. C'est logique, toute sa vie se trouve là bas, il lui faudra sûrement récupérer quelques petites choses. Pour ça aussi tu es prête à l'aider. Tu n'as pas le temps de lui dire, car le visage de la brune ne tarde pas à s'éclairer. L'explication qu'elle ne tarde pas à t'apporter te permet aussi vite de comprendre pourquoi. Un club motard... ça lui ressemble bien. D'ailleurs, elle ne t'a pas parlé de ce projet la dernière fois, ni de la possibilité de le mettre en place ici. Tu ne sais pas comment réagir face à l'idée de la savoir ici pour le long terme, mais ce n'est clairement pas le moment de douter. Tu viens de lui proposer ton aide, et tu t'apprêtes à faire pire ! « Un club motard ? Ça devrait bien fonctionner dans le coin, et tu n'auras pas le temps de t'ennuyer. » souris-tu, heureuse de voir que ce projet lui redonne encore plus le sourire. La dragonne doit y penser depuis un bout de temps, de toute évidence. « Après, je me disais que pour le temps de ta convalescence, tu pourrais rester chez moi... » Comment l'aider correctement, si vous êtes quotidiennement éloignées par les endroits où vous résidez ? Et il te semble plus logique de la laisser venir chez toi, que de rejoindre l'hôtel. C'est bien plus tranquille, surtout pour une blessée comme elle. Tu ne sais pas exactement à quoi cette proposition t'engage. Tu veux même pas y penser, mais tu sais aussi que t'aurais pas pu quitter cette pièce sans la lui faire. Bien sûr, ce n'est pas sans une certaine gêne, qui te pousse à ajouter.  « Enfin... si tu veux... mais je ne suis pas beaucoup là, alors tu serais comme chez toi. » Tu te rendras disponible pour l'aider, mais entre les concerts et tes occupations obligatoires, la brune aura largement de temps pour elle. Pour être restée seule aussi longtemps, tu sais à quel point c'est précieux.

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Jude sourit un peu, mais ne répliqua pas, quand Dani mentionna le hamburger. Elle n’osa même pas demander si la sorcière en était capable, bien sûr qu’elle l’était. S’il était une chose que Jude ne pouvait pas remettre en question, c’était la parole de la chanteuse, qui d’aussi loin que la dragonne s’en souvienne, avait toujours respecté. Alors quand il s’agissait d’un pauvre petit sandwich ! Ho son ventre en grognerait presque d’avance, si elle n’avait pas encore dans le nez l’odeur de la purée de lentille qu’ils avaient servis à midi. Le sourire de Dani face à l’enthousiasme de la dragonne fit presque fit fondre le cœur de celle-ci, si ce dernier n’était pas déjà plein d’adrénaline à l’idée d’enfin lancer le projet qui lui tournait en tête depuis des mois.


Sourit-elle avec ironie. Ha Jude… Elle rirait moins quand les antidouleurs arrêteront de faire effet et qu’elle sentira les énormes broches vissées à ses os.

Elle tourna la tête vers Dani. Chez Elle ? la sorcière avait l’air d’hésiter, sa voix s’éteignant à la fin de sa phrase. Mais… elle n’aurait jamais proposé cela si elle était contre l’idée. Jude resta silencieuse un moment. Réfléchissant à toute allure sans quitter la sorcière des yeux. N’avait-elle pas une seule chambre ? Au fond, elle avait probablement raison, c’était bien mieux qu’un hôtel. Et puis…  C’était joli, chez Dani. Le silence dut se faire long, car Dani repris la parole, gênée, pour clarifier ses dire. Mais Jude était déjà décidée, alors en même temps que sa main serrait inconsciemment celle de Dani comme pour la rassurer, Jude hocha la tête.


Puis elle sourit et se détendit.


Avec toutes celles que Dani avait, peut être qu’elle pourra empêcher la pauvre plante de crever, rallongeant un peu son espérance de vie… ça serait bien. Mais Jude devait être prudente, rester loin des qui pro quo. Elle comptait bien respecter la demande de la sorcière. Elle ne l’avait pas oublié. Ni ses mots ni la douleurs qu’ils avaient provoqués.

Un énorme feu vert dans la face. L'expression te fit sourire. Ça ressemble bien à Jude, de réussir à tirer un parti positif d'une situation à l'origine mauvaise. Tu es contente pour elle, au moins elle ne passera pas sa convalescence à se tourner les pouces. Et comme tu l'as souvent constaté, avoir un objectif permet de guérir plus vite. Les mois à venir ne seront pas faciles, mais en abordant la situation ainsi, ça ne pourra être que moins pire. À sa place, tu ne sais pas si tu aurais un tel courage, et c'est bien la différence entre vous deux. C'est encore plus vrai quand tu repenses à votre conversation de l'autre soir. Tout ce que la dragonne a fait, et sa décision de finalement t'en parler. Elle est forte, mais ça ne te donne que plus envie de prendre soin d'elle. Comme pour te faire pardonner ton retard. Pour, à ton tour, faire ce qui semble être le mieux pour elle. C'est dans une moindre mesure, bien sûr. Rien ne sera à la hauteur des sacrifices qu'elle a fait au cours des dernières années. Quoi qu'il en soit, c'est bien ce qui te pousse à lui proposer d'emménager chez toi le temps de sa convalescence. Cette idée est d'abord accueillie par un silence que tu appréhendes avec un certain stress. C'est peut-être en faire trop, après tout... Jude préfère peut-être avoir entièrement son intimité dans une période aussi complexe. La pression de sa paume sur la tienne met fin à toutes tes spéculations intérieures. C'est d'accord. Tu fermes la bouche avant de lâcher un vieux « hein ? » qui serait encore plus gênant. L'idée l'a peut-être surprise, mais... Jude est pour, au final. Immédiatement, tu sens ta poitrine se réchauffer, ne réprimant pas à ton tour un sourire.

Il se transforme même en rire quand la brune évoque sa fameuse plante. C'est un rire autant poussé par ton soulagement, que par la remarque en elle-même, ce qui le rend d'autant plus sincère. Peut-être pour la première fois depuis que vous vous êtes recroisées. « Pour que j'en prenne également soin ? Avec plaisir ! » ajoutes-tu toujours avec le sourire. Tu te souviens que la brune n'a jamais été très douée pour s'occuper des plantes en général. À l'inverse, et même en ayant perdu tes compétences de sorcière botaniste, tu t'en sors toujours très bien. Il parait que les plantes peuvent vous choisir -ou pas, alors c'est certainement ce qui s'est passé ! « On s'en chargera dès que tu pourras sortir d'ici alors. » À nouveau, tu ne vois pas comment Jude pourrait faire seule à moins de payer quelqu'un pour l'aider, ou d'avoir une personne sur place pour le faire. Comme elle a parlé d'y retourner un peu plus tôt, tu supposes que ça ne fait pas partie de ses intentions. En même temps, t'aimerais pas non plus que quelqu'un fouille dans tes affaires en ton absence. « En attendant, je vais tâcher de t'aménager un coin confortable à la maison. Il n'attendra plus que toi. » ajoutes-tu en pensant déjà à ce que tu comptes faire. Déjà, pas question de laisser la convalescente dormir sur le clic-clac. Ta chambre sera plus pratique, avec toutes les autres pièces utiles à proximité. Toi, tu peux dormir partout. L'autre fois, tu t'es bien réveillée sur le sol de tes wc. En pleine forme, qui plus est. Comme quoi, ça doit être un bon remède contre les gueules de bois. « À quoi ressemble ton chez toi ? » demandes-tu ensuite avec une pointe de curiosité. Elle a vu l'intérieur de ton domicile, mais toi, outre ce que tu peux imaginer, tu n'en sais pas plus au sujet du sien. Si tu le peux, avec ce qu'elle te dira, tu essaieras de la faire se sentir chez elle autant que possible. Et de lui donner son espace. Tu ne voudrais pas l’oppresser, ou la rendre triste en étant trop dans ses pattes. La situation sera un peu particulière, mais t'espères ne pas rendre les choses étranges entre vous.

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Jude sourit, « hein » ? c’est tout ce que Dani répondit, quand la brune lui donna son accord. La dragonne avait bien remarqué que son silence de réflexion avait augmenté la tension chez la sorcière. Dani ne s’attendait probablement pas à ce que Jude cède aussi vite. La plante pour briser la glace, c’est quand même avec honnêteté que Jude répondit.


Elle hocha la tête en souriant.


Son regard s’assombrit quelque peu. Elle détestait les hôpitaux. Née à une époque où on allait plus facilement au sanatorium qu’à l’hôpital, la dragonne n’avait que très rarement dû s’y rendre. Si rarement qu’elle ne pourrait même plus citer de la raison de sa dernière hospitalisation. Mais cet air sombre disparu bien vite, quand Jude réalisa que Dani avait dit « on ».

Elle voulait vraiment l’aider à ce point ? C’était complexe pour Jude, pour qui les sentiments n’avaient pas changé. Tout se contredisait chez Dani. Jude se disait qu’elle prendrait ce que la sorcière accepterait de lui donner, sans en demander plus, mais tiendrait-elle le coup ? Jude tourna la tête vers Dani quand cette dernière évoqua son installation temporaire, et Jude ne pu rien dire, seul un sourire témoigna de sa gratitude.  

Sa maison lui manquait, plus encore lorsque Dani l’évoqua. Jude eut un petit soupire nostalgique, elle avait l’impression que ça faisait des lustres qu’elle n’était pas rentrée chez elle.



Et elle l’avait construite elle-même aussi. Bon, elle avait demandé l’avis de professionnels quand même et avait signé des contrats pour le raccordement au réseau, mais le reste… elle se souvenait de ces longues semaines à assembler sa maison. Elle reprit la description plus en détail, la main de Dani dans la sienne, sans se rendre compte que son corps s’était penché un peu plus vers la sorcière. Non, Jude regardait le mur sans le voir, alors qu’elle visualisait chaque recoin de sa maison.


Elle avait mis du temps à rassembler tous les châssis, mais leurs différence rendait l’ensemble presque poétique. Tout était en bois, pour contraster avec le style industriel de sa déco.



Elle ne parla pas de l’énorme place qu’elle avait devant sa maison, où étaient garées les motos qu’elle utilisait le plus souvent, tandis que sa Ford Thunderbird était précieusement rangée dans son garage, pour les jours où elle en aurait besoin. Elle tourna la tête vers Dani.


Sous-entendu pour aller chercher ses affaires, Jude ne se dis pas que c’était peut être ambigu, quand elle ne précisa pas plus que ça.

Vu la complexité de la situation, tu trouves que vous vous en sortez bien. Au fil des rires et des échanges, la tension présente dans la pièce s'est muée en quelque chose de doux, d'agréable, et vos sourires à toutes les deux en sont la preuve. Par pure curiosité, et afin de pouvoir lui aménager correctement un petit espace, t'as donc questionné la motarde sur son propre logement. On dit après tout que le caractère d'une personne peut être représenté par son intérieur, et c'est bien vrai en ce qui te concerne. Tu te demandes si Jude est dans le même cas. Celle-ci ne te fait pas patienter, et évoque dans un premier temps Hallsburg, ainsi que le cadre idyllique que semble offrir son terrain. Pour toi qui a toujours vécu en ville, la description t'évoque presque un air de vacances. Tu comprends aussi que Jude a entièrement construit cette maison, et ça ne t'étonne pas. Elle a toujours été bricoleuse, et cette occasion devait être trop bonne pour ne pas la saisir. « Ça doit être magnifique... et représenter un sacré travail. » réponds-tu tout en essayant d'imaginer l'intérieur au fil de ses explications. La vue doit être vraiment sympa, ou toujours plus que la tienne en tout cas. Le réservoir est bien plus intéressant que l'arrêt de bus situé dans la rue d'en face. En clignant des yeux, tu réalises soudainement que la brune est un peu plus proche qu'avant, mais elle-même ne semble pas le remarquer, trop prise par son explication. Cela te fait sensiblement sourire, mais tu tâches de rester concentrée sur sa description. « Tu éviteras d'utiliser cette fameuse rampe lors de ta prochaine visite, n'est-ce pas ! » Cette fois, tu fais un peu d'humour, avant de hausser légèrement les épaules. « Même avec des efforts, je crains de ne pas pouvoir faire le poids avec ma maisonnette. » À moins de retapisser les murs avec des posters de rivières et d'espaces naturels. Mais clairement, ce serait pire que mieux ! Tu espères simplement que la brune ne trouvera pas l'atmosphère de la ville trop étouffante.

Le regard de Jude croise de nouveau le tien, et elle te fait comprendre qu'elle veut que tu viennes avec elle là bas. Tu lui as plus ou moins proposé un peu plus tôt, peut-être pas d'une façon explicite, mais cela signifie au moins que la décision est déjà prise de ton côté. Après tout, tu ne vas pas la laisser chercher ses affaires toute seule, pas dans son état. Ça te permettra de mettre de véritables images sur la description qu'elle vient de te faire, et... quoi ? L'accompagner doit-il signifier quelque chose de plus ? Tu n'en sais rien, et pour le moment tu n'es pas prête à y penser. Tu te dis simplement que ça ne peut faire de mal. Après tout, tu as bien fait comprendre à Jude qu'après tant d'années, vous ne vous connaissez plus vraiment. C'est peut-être l'occasion d'y remédier.  « Bien sûr, je ne vais quand même pas te laisser repartir seule ! Et puis, ça doit en valoir le coup d'oeil. » souris-tu sincèrement. Tu ne sais pas si c'est la réelle envie de voir tout ça, ou l'occasion de redécouvrir la brune qui t'enchante le plus. Rien que pour la forme, tu pencherais pour la première théorie. « Ceci dit, ça représente un sacré trajet, tu es sûre de vouloir me supporter tout ce temps ? » La question est à nouveau posée avec humour, mais c'est une manière pour toi de confirmer que tout cela lui convient bien. T'as un peu peur qu'elle change d'avis en cours de route, car vous venez de prendre tout un tas de décisions assez rapidement. C'est un peu effrayant, mais puisque tu t'es engagée, tu ne feras pas marche arrière sauf si la dragonne te le demande. « Promis, je ne fouillerai pas dans tes petits tiroirs ! » T'éviteras, mieux vaut ne pas tomber sur ses sous vêtements par mégarde. Ça aussi, vous devrez vous y préparer, si vous comptez vraiment cohabiter un certain temps. Après avoir vécu tant de temps seule, ça risque d'être perturbant au départ.

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La description de sa maison donna le mal du pays à Jude. Son foyer lui manquait,  son café du matin face au lac embrumé lui manquait. Les levers de soleil sur la plaine quand elle se levait aux lueurs de l’aube avant d’aller ouvrir son garage. Meme la plante à moitié morte dans le coin de son salon lui manquait. Savoir qu’elle y retournerait bientôt la soulageait quelque peu, considérant que ça ne serait qu’un passage avant de retourner chez Dani.

Quoi que, maintenant qu’elle y pensait, un fond d’elle était probablement contente de passer sa convalescence chez la sorcière, même si cela restait un peu… Gênant ? L’exclamation de Dani la fit rire.

Répondit Jude en rigolant. Elle haussa les épaules alors. La petite maison de Jude était bien différente de celle de Dani. En même temps  l’une convenait à la ville et pas l’autre. Du souvenir que Jude en avait, celle de la sorcière était bien correcte ! La dragonne ignorait pourquoi elle avait insisté pour que la sorcière l’accompagne jusqu’à Hallsburg. C’était loin, et si Dani avait autre chose à faire ? Elle avait définitivement une montagne de trucs prévus. Et soudain un poids s’envola du cœur de la dragonne lorsque Dani accepta.
Elle voulait déjà s’imaginer la sorcière devant chez elle, dans sa maison, adossée à l’ilot central de la cuisine, regarder le lac comme Jude le faisait.

Non, Jude devait se calmer. C’était un acte de générosité de la part de la sorcière d’accepter de prendre soin d’une dragonne infirme pendant plusieurs mois. Rien de plus. Elles iraient à Waco, Jude ferait ses affaires et retourneraient ici, en deux bonnes gentilles colocs sans aucune ambiguïté supplémentaire. Cela rassurerait l’hôpital de savoir que Jude n’irait pas loin .Elle avait déjà l’intention de ne pas se rendre à ses visites de contrôles, elle qui supportait si peu les hôpitaux. Alors au moins si quelque chose n’allait pas…. Ça serait rapide et plus facile que d’aller au centre de soin de Waco et tout leur expliquer.

Jude rit encore, oubliant petit à petit la situation plus que désagréable dans laquelle elle se trouvait grâce à la présence de Dani à côté d’elle. Plus secrètement ,elle se salua d’avoir séparé les fringues du reste… Heureusement, le dressing de la dragonne était au rez de chaussée à côté de sa salle de bain. Histoire d’éviter de demander à Dani d’aller fouiller elle-même. C’était pas plus mal.


Plus pour passer du temps avec la sorcière que pour oublier les bruits incessant et l’odeur de désinfectant de cet hôpital. Elle se dit qu’au moins, quit à être bloquée ici, elle pourrait essayer de profiter un peu de la vie animée de la ville. Dans la mesure où son fauteuil ne la priverait pas de tout. Peut être qu’elle pourrait même aller voir Dani chanter ? Elle rougit à l’idée, mais ne dit rien.

Tu savais au fond de toi, que l’euphorie du moment laisserait place à des émotions un peu plus stressantes. Aux côtés de Jude, dans cette chambre d’hôpital, tu avais la sensation que rien ne pourrait mal tourner. Passer quelques mois à héberger ton ex que tu n’as pas vu depuis des décennies, quoi de plus normal ? Mais même pour quelqu’un comme toi, l’appréhension n’est pas inexistante, même si tu n’as pas l’intention de l’avouer à la dragonne. Après votre petite série de décisions irréfléchies, vous avez un peu discuté. De tout et de rien, de sa convalescence, du voyage à venir… et finalement, une infirmière est venue vous faire comprendre que l’heure des visites était terminée. Vous vous êtes saluées de manière un peu gênante à vrai dire, car aucune de vous ne savait tellement quoi dire ou quoi faire. Mais ça ne t’a pas paru grave sur le moment. Peut être que vous en rirez ensemble dans quelques temps. En tout cas, Jude a promis de t’appeler lorsqu’elle saura quand elle sera libérée de l’hôpital. Une part de toi espère qu’elle t’appellera même avant ça, tandis qu’une autre souhaiterait que la première n’existe pas tout simplement.

Tu rentres chez toi à pied, empruntant le même chemin qu’à l’aller. Et bizarrement, cette intuition suivie ne te laisse pas le même sentiment d’accomplissement que d’habitude. En allant à l’hôpital, tu ne savais pas trop ce qui t’attendait. A présent, la situation est toujours un peu la même : tu ne sais pas ce que vous réserve l’avenir. Tu sais juste qu’il est à vos portes, et qu’il ne vous reste qu’à l’embrasser pour vivre tout ce qui vous attend. Tu ne vas pas t’en ronger les ongles, mais l’idée va rester dans un coin de ton esprit jusqu’au jour J. T’es trop vieille, du moins spirituellement, pour t’encombrer de théories catastrophes en lien avec la venue de la dragonne. Vous verrez bien, et au pire, des solutions peuvent toujours être trouvées.

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