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Ciarán Cearbhall
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Pseudo / Pronoms : evy / elle
Messages : 173
Âge : trente-sept ans
Nom rebelle : Bagdad
Nombre de dés : cinq dés eau + un dé terre
Résidence : seattle, au plus près de l'eau
Profession : scénariste spécialisé dans le cinéma surnaturel
Faceclaim : sebastian stan
Pouvoirs/capacités : nymphe lié à l'élément de l'eau, maîtrise également la terre depuis plus récemment
Crédits : inthebleakmidwnter (avatar) adamantium (aesthetic), magma. (code signa), aithusa (crackship)
Disponibilité RP : disponible ◑
Multicomptes : rhea, scylla, daesyn, raina, abraxas, chiara, artemis, sheva & beatriz
Points : 72
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Sam 9 Jan 2021 - 21:44
the road not taken looks real good now

“Sleep in half the day just for old times' sake
I won't ask you to wait if you don't ask me to stay
And the heart I know I'm breakin' is my own
To leave the warmest bed I've ever known”

   

   
Que peut-on dire à celui qu’on a laissé partir ? Comment se présenter à sa porte après des années en sachant tout ce qu’on a brisé ? Ciarán n’avait toujours pas trouvé la réponse. Il marchait lentement, s’arrêtait souvent, régulièrement rattrapé par de vieux fantômes imposants. Difficile d’identifier ce qui dominait dans le maelström qui tempêtait à l’intérieur de lui, pris en étau par sa propre lâcheté et la brûlure qui lui mordait les reins. Il aurait sûrement trouvé la force de ne jamais revenir, si on lui en avait donné l’opportunité. Son amour pour Charlie n’avait d’égal que sa détermination à le protéger – et cela voulait dire l’aimer de loin, il l’avait bien compris. Il s’était attendu à ce que le feu faiblisse, à ce que le temps engloutisse les vestiges de leur histoire jusqu’à ce qu’elle ne soit qu’une épave au fond de l’océan, mais il aurait dû savoir que les braises de l’amour vrai, même enterrées, continuent de brûler. Quand il y pensait, il était de plus en plus difficile de se rappeler pourquoi il continuait de les étouffer, de les ensevelir sous une montagne de fausses convictions et d’affirmations bancales, sous les corps qu’il laissait défiler sur le sien, sous les mensonges qu’il se racontait à lui-même. Cela lui avait pris des semaines pour rassembler son courage, pour trouver la force de choisir la vie de Charlie plutôt que leur histoire, pour se retenir de le toucher avec ses mains de Midas maudites. Ce n’était pas pour craquer maintenant.

Ça aurait dû être une bonne nouvelle. Un grand studio avait déterré son tout premier projet, offert un montant exorbitant pour un scénario peaufiné, plus poussé, avec une voix plus forte. C’était sa madeleine de Proust à lui – ces quelques pages le ramenaient à sa petite vingtaine, à l’ardeur qu’il avait mis à trouver sa voie, à dénicher des histoires là où il n’y avait que des ruines. C’était là qu’il avait rencontré Charlie, au milieu de ces décombres imaginaires que le zouwu avait su reconstruire avec douceur. De tous les entretiens de recherche qu’il avait faits, c’était sa voix à lui qui avait résonné le plus fort. Ironique que la raison pour laquelle il l’avait aimé tout de suite soit également la raison qui le ramène à lui, un fil ténu et fragile entre les mains irresponsables des Parques. Le studio avait insisté pour que le projet porte les couleurs du vétéran, comme si eux aussi étaient tombés sous son charme à travers la caméra et les lignes que Ciarán avait douloureusement écrites. Alors il n’avait pas d’autre choix. Il fallait retourner sur les lieux du crime.

Peut-être était-il reconnaissant d’avoir l’opportunité, au fond, d’avoir une excuse toute trouvée pour le revoir sans que cela soit imputé à sa propre faiblesse. Mais quelque chose se tordait toujours à l’intérieur de lui, un ballet d’entrailles écœurant ; et si la nature saisissait sa propre opportunité pour réclamer ce qui lui était dû ? Et si le destin se riait de lui, sous cape, attendant le moindre faux pas pour faucher la vie de son ancien amour ? Il ne restait plus qu’à espérer que Charlie soit détestable, que sa colère les engouffre tous les deux et que sa froideur rende cette entrevue strictement professionnelle. Mais l’espoir était vain – c’était justement pour sa chaleur, sa profonde gentillesse, ses batailles silencieuses que Ciarán en était tombé amoureux, et les avait condamnés tous les deux.

Le vétéran avait eu l’opportunité de refuser, de l’ignorer – Ciarán avait mis des jours à rédiger l’email, à choisir ses mots, à osciller entre les racines de leur histoire encore solidement enroulées autour de son myocarde et le ton cordial que la situation exigeait. Que peut-on dire à celui qu’on a laissé partir ? Après des années de silence à errer dans la brume en espérant que le diable l’emporte. Comment s’excuser pour son absence tout en gardant la porte soigneusement fermée, de peur de laisser tous les fantômes rentrer ? Charlie avait répondu avec grâce à son brouillon incompréhensible et Ciarán avait passé des heures à fixer les quelques mots en noir sur l’écran blanc, le cœur sec et les yeux gonflés.

Il était à l’heure, au moins. Il lui devait bien ça. C’était la première fois qu’il venait au centre, bien évidemment. Il avait eu vent du projet et de son avancement, mais s’en était tenu soigneusement éloigné. Il savait à quel point cela tenait le zouwu à cœur, et ce que cela devait représenter d’avoir enfin pu ouvrir cet endroit. Alors il marchait vers sa destinée avec révérence, conscient de toutes les histoires qui habitaient le bâtiment et le degré de destruction qui les hantaient. Il arriva finalement sur le lieu du rendez-vous, hésita quelques secondes avant de tourner la poignée. Un, deux, trois battements de cœur et la porte s’ouvrit. La pièce était sobre, sommairement meublée et décorée. Elle aurait pu sembler terne, si Charlie ne l’abreuvait pas de sa lumière, assis sur une chaise en fer près de la fenêtre. Que peut-on dire à celui qu’on a laissé partir ? “Hi Charlie” s’entendit-il dire, la voix légèrement plus grave que d’habitude. Il essuya ses mains moites sur son jean avant d’avancer de quelques pas, certain que les battements de son cœur pouvaient s’entendre depuis l’autre bout du bâtiment. “Long time no see” Enfin, ses yeux croisèrent ceux du vétéran, et comme dans un miroir s’y reflétaient ses propres regrets.

   

   
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Mar 12 Jan 2021 - 23:38

The road not taken looks real good now

Le silence est la plus grosse contradiction que les hommes n’aient jamais inventée.
Il n’est jamais vraiment vide, ne l’est-il pas ? L’immensité de l’eau qui recouvre les mats d’épaves perdues retiennent les murmures noyés, les secrets jamais partagés dans le silence des profondeurs. Les étincelles dans les mains d’amants qui se retrouvent de soir, une seule âme en deux corps, s’écrivant de longs poèmes tactiles sans n’échanger le moindre mot. Des textos envoyés sans jamais de réponse, mots regrettés, souvenirs de fantômes vaporeux disparaissant un peu plus à chaque phrase ignorée. Si c’est un long, lourd silence qui avait pris en otage l’appartement de Charlie ce soir-là, il n’avait rien de vide; rien de silencieux. Il avait eu presque du mal à croire le prénom qui signait l’email, un amalgame de lettres et de syllabes qu’il n’avait plus lu, ni même prononcé, en très, très longtemps. Ciaràn. Dans ce silence incrédule, il y avait eu des battements de cœur douloureux, un petit cillement alors que le Calibri sur l’écran ne devenait qu’une immense tache floue. C’est toujours un choc de se rendre à l’évidence que le château que l’on se bâtit n’est pas fait de pierres mais de cartes, et que chaque tour, chaque poutre n’est qu’une grande illusion, jusqu’à la herse et au pont-levis, jusqu’à la fondation. Un mensonge fragile d’apparence et d’habitude, tenu par le fil ténu de l’absence d’un prénom, la certitude qu’il ne le prononcerait plus que dans ses songes alors que personne ne regarde. Ce prénom qui, d’une simple lecture, lui donnait le sentiment que tout s’écroulait à nouveau; deux pas devant, trente pas derrière.

Il aurait pu simplement décliner. Il aurait pu ne jamais répondre, laisser sa vie tranquille comme elle l’était déjà, guérir petit à petit tout en s’occupant de ses mille et un nouveaux projets qui faisaient taire l’assourdissant silence dans son âme. Ça aurait été si simple, mais l’amour ne l’est pas; et comme un alcoolique, il avait remis le goulot à ses lèvres, ignorant les pièces marquant ses années de sobriété au fond d’un tiroir pour renouer avec sa plus terrible addiction. Quelques phrases simples tapées du bout des doigts, clic, clic, clic. Se laissant avaler, tel toute matière près d’un trou noir, par l’étoile qui lui avait déjà brûlé les ailes. Quelque part en lui, il avait essayé de se raisonner, de justifier de se rapprocher une fois de plus de son amour perdu; peut-être l’avait-il idéalisé, depuis toutes ces années, peut-être que de revoir son visage ailleurs que sur la photographie qui reposait dans son sac lui assurerait qu’il était passé par-dessus leur histoire, qu’il ne ressentait plus rien pour lui. Juste une dernière fois, qu’il avait pensé, ensuite il pourrait vraiment passer à autre chose. Il savait ce que ces paroles présageaient, elles le faisaient toujours, mais le brouillard qui s’épaississait en lui alors que des souvenirs de leur passé ensemble lui revenait violemment l’empêchait de raisonner, le tenait à la gorge, l’empêchait de respirer, le nom qu’il avait tenté d’oublier lui remplissant les poumons d’eau, le noyant dans un amour sauvage jamais enterré.

C’était ainsi qu’il s’était retrouvé assit à son bureau, regardant nerveusement à l’extérieur à chaque minute passante, s’imaginant que chaque voiture qui passait par là était conduite par Ciaràn, s’approchant de lui, et continuant leur chemin au dernier moment avant de tourner dans le stationnement, disparaissant derrière l’horizon. Il aurait dû simplement décliner. Il aurait dû ne jamais répondre. Tordant ses mains dans l’attente de l’heure du rendez-vous qui approchait, il pensait de plus en plus sérieusement à s’échapper par la fenêtre, quitter le centre et cette ville maudite et partir loin avant que les yeux de glace se posent sur lui, sur sa silhouette d’animal blessé, avant que le regard ondin du nymphe ne se rappelle pourquoi il l’avait quitté. Après toutes ces années, Charlie n’en savait toujours rien; il avait simplement assumé qu’autant il avait essayé, il n’était finalement pas une bonne personne. Juste un soldat menant les dégoûtante guerres des autres.
Les secondes s’étiraient alors qu’il entendait des pas approcher, et il crut sentir son cœur s’arrêter lorsque la poignée tourna. Une inspiration. Une expiration. Un frémissement. “Hi Charlie”. Le zouwu se sentir mourir un peu alors qu’il entendait son prénom prononcé par une voix qu’il avait cru ne plus jamais pouvoir entendre. Il serra les dents un peu, faisant brièvement ressortir l’articulation de sa mâchoire, alors que ses yeux vert clair quittaient lentement la sûreté du sol pour remonter les jeans, puis les rebords du caban, puis les manches, et le collet du pull que le nymphe portait avant de s’arrêter sur son visage. Il s’était promis de ne pas faire de scène, de peur de le faire fuir à nouveau; mais vraiment, en ce moment, la seule chose dont il avait envie, c’était de se jeter dans ses bras. “Long time no see”. Le vétéran se racla la gorge, un sourire bienveillant étirant doucement ses lèvres. “Hey. It’s been… a while”. Bien que le sourire soit sincère, quelque chose dans ses yeux lui donnait une saveur triste. Il détourna le regard, incapable de soutenir plus longtemps la vision irréelle qui se tenait devant lui, de peur que Ciaràn lise dans ses pensées et décide de partir, de laisser tomber, encore. Il se leva en poussant doucement sa chaise derrière lui, tentant de calmer les battements affolés dans sa poitrine, et laissa ses pas le guider vers une petite table au coin de la pièce où reposait une cafetière fraîche, quelques tasses propres et divers contenant de lait et de sucre. Il attrapa deux tasses au passage, se retournant un instant vers son invité : “Coffee?”, avant de remplir l’une des deux où était imprimé une phrase clichée en gros caractère, d’y glisser deux sucres et de la tendre au scénariste. Il remplit ensuite la sienne et s’appuya légèrement sur le rebord de la table de sa main libre, faisant un petit signe de tête vers l’une des deux chaises libres devant son bureau, le taquinant doucement : “Go on, make yourself comfortable. I’m not gonna make you just, stand there like you’re some kind of stranger“. Pourtant, n’était-ce pas ce qu’ils étaient devenus, des étrangers ? L’humour l’aida un peu à ravaler sa nervosité et empêcher sa voix de trembler, mais il ne pu empêcher son regard de briller lorsqu’il se posa à nouveau sur ses yeux de glacier, un peu de bonheur, un peu de souffrance.




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Sam 16 Jan 2021 - 21:46
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“Sleep in half the day just for old times' sake
I won't ask you to wait if you don't ask me to stay
And the heart I know I'm breakin' is my own
To leave the warmest bed I've ever known”

   

   
Cela demandait toute son énergie et toute sa concentration pour ne pas s’effondrer, pour ne pas voir le tout dernier éclat de sa volonté partir au loin, foutre en l’air les convictions qu’il avait tenté de reconstruire. Chaque seconde de plus mettait son plan bien huilé en danger. Ça avait toujours été ça son problème ; Ciarán se croyait plus fort qu’il n’était. Un sourire familier, aux accents différents, plus fatigués. Le temps avait passé, emportant tout le droit qu’il avait de savoir pourquoi, de lui demander de lui raconter ces dernières années, les jours sans lui, peut-être avec quelqu’un d’autre.  “Hey. It’s been… a while” Le nymphe se sentit frémir ; sa voix était le dernier élément dont il avait besoin pour réaliser que Charlie était bien là, devant lui. Qu’il était peut-être parti il y a de ça des années, mais que le zouwu était encore là. Peut-être que quelque part, il était parti à temps. Que c’était ça qui les avait sauvés, tous les deux. Il fallait se raccrocher à ça ; Charlie n’était pas mort pendant la guerre, il n’avait pas été victime d’un improbable accident qui aurait fauché sa vie. Ciarán avait renoncé à lui, et il les mains tachetées de noir de la malédiction l’avaient laissé partir. C’était tout ce qu’il avait besoin de savoir, au fond. Que tout cela n’avait pas été en vain.

Il le regarda se mouvoir, comme hypnotisé, incapable d’en dire plus, de choisir les mots qui allaient suivre. Il avait répété, pourtant, avait un minimum prévu histoire de ne pas avoir l’air trop con le moment venu. Mais il avait oublié tous les traits d’esprit, les mots intelligents. Il écrivait pour gagner son pain et rien ne lui venait, rien d’inspiré, rien qui ne puisse se mesurer à la situation, rien qui ne pourrait leur faire oublier pourquoi ils se tiennent là après des années. Ciarán était parti sans explications et revenait sans pouvoir rien lui offrir d’autre que le goût du regret inexprimé. Surtout ne pas se laisser aller.  “Coffee?” Le nymphe acquiesça d’un geste de tête silencieux avant de frotter ses mains de nouveau contre son jean. Si jamais ils devaient se serrer la main, qu’au moins leur premier contact en un peu plus de sept ans ne soit pas désagréable et humide. Il luttait. Il savait pertinemment que c’était pour cela que ses pouvoirs jouaient contre lui avec la fine brume qui recouvrait ses membres ; chaque fibre de son corps luttait contre la tentation de demander à son ancien amant quelque chose de plus fort, quelque chose qui lui permettait de tenir sans tout foutre en l’air. Mais cela faisait dix-huit moi désormais que Ciarán n’avait pas touché à l’alcool, et il était trop reconnaissant d’en être arrivé là pour gâcher tout ça. Surtout devant Charlie – il ne le saurait pas, mais il aurait quand même la déchirante impression de l’avoir déçu, d’être encore moins digne de lui que lorsqu’il l’avait quitté, et ce n’était pas peu dire.

Un sourire nerveux et tendre se dessina sur ses lèvres tandis qu’il observait le zouwu laisser tomber deux cubes de sucre dans sa tasse. Tout ce temps sans lui et il se rappelait encore la manière dont il prenait son café. C’étaient les plus petites choses qui faisaient le plus d’effet ; Ciarán eut la subite envie de se jeter dans ses bras en envoyant valser la cafetière et tout ce qui se trouvait sur cette maudite table.  “Go on, make yourself comfortable. I’m not gonna make you just, stand there like you’re some kind of stranger“. Il obtempéra avec un petit rire étranglé – en ayant la distincte impression que c’était ce qu’ils étaient désormais l’un pour l’autre, et que tout était de sa faute. Rien n’était étranger dans le corps de Charlie, ni dans son visage qu’il a admiré chaque matin pendant des années de félicité, ni dans son corps dans lequel il s’est fondu tant de fois, dans sa voix qu’il entend encore chanter les chansons des A-ha au coin du feu le dimanche soir. Tout dans son corps à lui réclamait tout cela, contenait encore l’empreinte de ce bonheur qu’il avait laissé derrière. Il avait entendu quelque part que les cellules du corps humain se renouvelaient tous les sept ans – ce qui voulait dire qu’il n’avait jamais touché l’homme qui se tenait devant lui. Cette pensée lui brisa le cœur. “Thank you for agreeing to see me. You could have just as easily told me to go fuck myself. It would have served me well“ déclara-t-il après un court instant de silence. Il évita le regard de Charlie en montant la tasse de café fumant à ses lèvres, laissant les secondes s’écouler pour lui laisser le temps de se reprendre. Il n’était pas venu pour ça. Il n’était pas venu pour ça. Pourtant, pouvait-il vraiment faire comme si de rien n’était ? Pouvait-il vraiment commencer à parler de son foutu film sans reconnaître ce qui était en train de se passer, à savoir qu’il était impardonnable de lâcheté ?  

Son myocarde battait fort, si fort qu’il était impossible que Charlie ne l’entende pas. Il ne pouvait pas compter sur les capacités extraordinaires du zouwu pour le calmer, cette fois. Il allait falloir se démmerder tout seul, c’était ce qu’il avait voulu et il fallait s’y tenir. Il n’avait pas le droit de débarquer de nouveau dans sa vie et remuer tout ça. Alors il serait professionnel. Il serait tout ce que Charlie avait besoin qu’il soit – sinon par amour, sur lequel il avait perdu tout droit, au moins par respect. “I’m really lucky that the studio picked this up, I had given up on hope that anybody was going to make something of it. So thanks for making this happen.“ Le destin était cruel de cette manière là – de ressortir des cendres le projet qui avait vu naître quelque chose de si vrai, de si fort, et de forcer celui qui l’avait ruiné à se regarder en face, condamné à contempler à jamais la beauté de ce qu’il avait sacrifié.

   

   
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Mer 20 Jan 2021 - 17:16

The road not taken looks real good now

En lui tendant sa tasse d’un geste un peu tremblant, Charlie avait espéré pouvoir effleurer ses doigts, sa peau qu’il n’avait pu toucher depuis trop longtemps, mais seule la tiédeur de la céramique laissa son empreinte sur son épiderme. La simple idée de ce contact, aussi éphémère et ténu soit-il, avait suffit à accélérer davantage son rythme cardiaque, couper davantage son souffle. Il avait peur, au fond, Charlie. Peur qu’au travers de tous leurs morceaux brisés et éparpillés au gré du vent, perdus dans ses années solitaires, un simple contact ne les rassemble violemment, une tasse de thé brisée puis réassemblée par une force impossible, un retour en arrière qu’il ne saurait contrôler. Ça rendrait tout ça trop réel, trop tangible, et il avait peur Charlie, parce qu’il se sentait déjà dériver au son de sa voix, au fil de ses angles, dans ce parfum resté le même et qui remplissait la pièce d’une indéniable présence. C’est un peu pour ça que, même s’il était appuyé sur la table à café devant lui, il n’arrivait vraiment à le regarder, à regarder ses yeux d’océan dans lesquels il s’était tellement noyé. Le nymphe d’eau avait toujours été tempête pour le zouwu naufragé, l’attirant dans les profondeurs aquatiques avec chaque nouvelle vague, chaque caresse, chaque nouveau courant marin, chaque regard. Aujourd’hui n’était pas différent : il avait peur Charlie, peur qu’un simple contact ne le replonge dans les abysses de leur passion poussiéreuse. Il n’avait pas accepté pour ça, et il aurait aimé se convaincre qu’il était plus fort que ses pensées parasite, que ses vieux sentiments brusquement déterrés, mais il n’en était plus du tout certain. Une seule pensée rugissait dans sa tête confuse; il s’était mortellement trompé. Trompé en se laissant engloutir par les mots de son ancien amour lorsqu’il les avait lus à l’écran, espérant y retrouver un visage n’évoquant plus rien, des mots éteignant les dernières braises dans son ventre : finalement, rien n’avait vraiment changé.

Il y eu un silence. Quelques secondes seulement en réalité, mais une éternité pour Charlie qui n’arrivait pas à relever les yeux à nouveau. “Thank you for agreeing to see me. You could have just as easily told me to go fuck myself. It would have served me well“. La douleur que cachait ces derniers mots n’était pas difficile à deviner, mais le zouwu ne put se résoudre à l’accepter. N’était-ce pas de sa propre faute si Ciarán était parti ? Il s’était imaginé une rencontre plus fluide, moins lourde en émotions. Après tout ce temps, le nymphe avait certainement passé à autre chose, peut-être même rencontré quelqu’un d’autre de mieux. La pensée lui fit l’effet d’un coup de poing, une micro-expression de douleur sur son visage qui disparut aussi vite qu’elle était venue. “How could I“, souffla-t-il pour lui-même entre ses lèvres. Non, il n’aurait jamais pu le repousser. Il lui était lié comme la mer à la lune. Pour le meilleur et pour le pire, peut-importe à quel point ça aurait été moins douloureux, à quel point il essayait de se convaincre qu’il aurait pu faire autrement. La nervosité de Ciarán coulait jusqu’à lui comme une rivière féroce, difficile à ignorer, complexe et teintée de mille autres sentiments flous qu’il n’arrivait à saisir au passage. Il ne savait pas s’il aurait préféré une attitude froide, dénuée de non-dits et de telles émotions qu’il ne pouvait empêcher de l’affecter. Si les zouwus arrivaient à capter les émotions des autres, il était parfois difficile de s’en détacher, si facile de se laisser contaminer. À travers les silences inconfortables, il arrivait même à l’entendre : le battement effréné, douloureusement puissant dans la poitrine du scénariste. Arrivait-il à entendre le sien, lui aussi ? Poussant le sang dans ses veines, dans ses artères, dans ses capillaires ? Ce cœur qui souffrait, affolé par cette vision impossible qui se tenait dans son bureau, comme si rien n’avait changé ? Des images de leurs corps entrelacés lui revint, des souvenirs de ce battement qu’il reconnaîtrait entre mille, le battement effréné rythmant leurs nuits où il avait pu tout oublier, l’horreur, la douleur, la culpabilité entre deux bras, l’oreille collée sur un torse aux sons de tambours. Il fût un temps où ils auraient tout oublié de leurs malheurs quotidiens, où il l’aurait entraîné, juste là sur son putain de bureau, foutre en l’air ces décorations vides et trop sobres, où il l’aurait fait chanter, ce cœur battant…  Mais ce temps était enterré, et seul un léger serrement de poing ne trahi sa frustration grandissante, sa colère contre lui-même et sa faiblesse. Il déglutit. Ciarán était juste là, à quelques mètres de lui à peine, et il lui semblait encore plus loin de lui que lors de son absence. Interdit.

“I’m really lucky that the studio picked this up, I had given up on hope that anybody was going to make something of it. So thanks for making this happen “. Sa phrase lui rappela la raison de sa présence. Il avait fallu tordre le destin, invoquer des raisons professionnelles pour qu’ils se revoient enfin. Il n’était pas là pour lui. Relevant enfin ses pupilles vers lui, la vision de son ancien amant simplement assis sur la chaise qu’il lui avait désignée, la tasse de café à la main et la vapeur du breuvage montant doucement vers cette mâchoire qui l’avait toujours fait chavirer le fit sourire à nouveau. C’était étrange, les émotions : malgré le ballet de colère, de tristesse et de désir qui tournoyait dans ses entrailles, il arrivait encore à sourire. Simplement. Comme il lui avait sourit tellement de fois auparavant, sincèrement, simplement vrai. Il le cacha à moitié dans une gorgée de café amère. Rebondissant aux remerciements du scénariste, sa voix se fût rocailleuse, trahissant ces émotions sauvages qu’il n’arrivait pas à contrôler : il avait toujours été un zouwu quelque peu pathétique. “All these years, and I still couldn’t refuse anything to you “. Il soupira un peu. Il n’avait jamais rien caché à Ciarán, et il n’allait pas commencer aujourd’hui. Autant être honnête. “I’m sorry. It’s just… a lot “. Il se promis qu’il allait l’aider à son meilleur pour son vieux projet, celui qui les avaient fait se rencontrer au tout début, qu’il ne laisserait pas leur histoire l’emporter, mais il ne pouvait pas non plus l’ignorer : ça aurait été une insulte à leur mémoire.





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Dim 24 Jan 2021 - 22:12
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To leave the warmest bed I've ever known”

   

   
Il sentait la chaleur de Charlie dans l’eau que contenait son corps, se sentait irrémédiablement lié à lui, à cette peau qu’il avait embrassée des millions de fois sans jamais y penser, sans jamais la traiter avec la révérence qu’elle aurait méritée. Des mots jetés sans jamais penser qu’un jour le silence les hanterait. Il avait pris l’habitude, il avait pris leur amour pour acquis. Il avait cru que jamais il n’aurait à vivre sans lui. Mais vivre sans lui était mieux que le regarder mourir, songeait-il à chaque fois que sa détermination menaçait de faillir, à chaque fois qu’il se sentait craqueler. C’était plus dur que ce qu’il pensait. A côté de l’attrait du zouwu, ses bouteilles de vodka faisaient pâle figure dans la toile entremêlée de ses addictions. Là, assis devant ce bureau en fer qui les séparait, il se sentait plus loin que jamais. Et le sourire de Charlie était aussi brûlant que la tasse de café qu’il tenait maladroitement entre ses mains. Douloureux, presque. “All these years, and I still couldn’t refuse anything to you.“ Ciarán resta silencieux, incertain de l’attitude à adopter. Une inside joke à laquelle il ne savait pas quoi répondre – Charlie l’entraînait là où il n’avait pas pieds, dans cet océan de regrets qui menaçait de l’engloutir tout entier. Avait-il accepté de le voir par obligation, par le sens du devoir qui avait toujours été le sien ? Ce même sens du devoir qui l’avait poussé à se mettre en danger des centaines de fois, par amour pour les siens ? Était-ce le même sacrifice périlleux qu’il faisait aujourd’hui, pour lui ?

Le nymphe déglutit difficilement. La pensée lui était insupportable – de lui prendre encore quelque chose après toutes ces années, de continuer à lui demander de s’oublier pour lui, de passer au-dessus de son inévitable colère, déception, rancœur, tout ça pour un foutu film ? C’était trop. “I’m sorry. It’s just… a lot.“ Au moins ils étaient d’accord sur quelque chose. Ciarán ne se souvenait même plus de pourquoi ça lui avait semblé être une bonne idée. S’était-il menti à lui-même, convaincu que ce n’était pas un simple caprice pour le voir, le respirer, le toucher ? De qui se foutait-il, exactement ? Un hommage, avait-il songé, c’était un hommage, une boucle bouclée, le début et la fin qui se fondent. Mais ici et maintenant, il se rendait compte qu’il n’avait aucune envie de boucler cette putain de boucle, il voulait rester prisonnier au milieu, dans le creux de l’infini, oubliés des lois et des dieux et de la nature, entremêlé avec Charlie. “I know, I’m sorry too. I… Was this a good idea? Should I just…?” Il leva une main tremblante pour designer la sortie, incapable de sortir sa phrase, trop conscient de son désir de rester le cul solidement vissé sur cette chaise à se repaître de tout ce que son ancien amant voulait bien lui donner.

C’était injuste, profondément injuste, rien ne tout cela n’avait de sens. Le nymphe se méprisait d’être incapable de se tenir à sa décision, de revenir la bouche en cœur en faisant comme si de rien n’était. “I’m not here to reopen old wounds.” Petit hypocrite. N’est-ce pas exactement ce que tu es en train de faire ? “I thought after all this time, you deserved more than any half-assed explanation I could give you so I didn’t want to insult you by giving it to you seven years too late.” Il y avait une sincérité indéniable dans ces mots, autant de vérité que de dissimulation. Il avait espéré échapper à sa propre lâcheté, avait espéré éviter la confrontation, mais ce ne serait pas leur rendre justice. Il était parti sans un mot alors qu’il aurait voulu rester. Mais parfois, on a pas toujours ce qu’on veut dans la vie. Aujourd’hui, il était temps de prendre en compte ce que Charlie voulait – il lui devait au moins ça.  “I know that it was me who put us into this mess, and you don’t owe me anything. If it’s too much, I can leave.” Partir, c’est justement ce qui les a foutus dans cette merde au départ. Partir, tu ne sais faire que ça, de toute manière. Ciarán voulait arrêter de se cacher, être l’homme qui aurait mérité un beau jour de se tenir devant le zouwu. Pourtant, il n’avait pas tenu dix minutes en plein soleil avant de fondre complètement. Il n’avait pas prévu tout ça, il avait déjà écrit l’histoire dans sa tête, et ça ne se finissait pas tout de suite, pas comme ça. Leur histoire méritait mieux que ça.

   

   
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Mar 26 Jan 2021 - 3:06

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Toutes ces années.
Toutes ces années à se retourner dans son lit, à moitié endormi, tendant un bras vers le côté froid des draps et ne serrer que du vide. Toutes ces années à sortir mécaniquement deux tasses de l’armoire le lendemain matin, pour finalement en ranger une avec regret alors qu’il réalisait son erreur. Toutes ces années où il avait continué d’acheter le même déodorant, celui que Ciarán aimait, au cas où il devrait se revoir. Toutes ces années à faire ce détour occasionnel au marché dans la section des bières pour y prendre celle qu’il lui avait fait découvrir, se laisser plus tard goûter des souvenirs liquides alors qu’il taisait ses pensées avec de la musique. Toutes ces petites habitudes et pincements quotidiens que le nymphe avait inséré dans sa vie, et qui ne s’étaient pas effacées avec son départ; une multitude de traces indélébiles qui s’étaient imprimées dans Charlie, impossible de vivre avec, impossible de vivre sans. Les longs mois de thérapie n’y furent pour rien, et malgré les efforts pour passer à autre chose, il avait fallu se résoudre à apprendre à vivre avec son deuil plutôt que de l’effacer. Trop loyal, il n’avait jamais vu d’alternative. Si certains soldats revenus de guerre boîtaient maintenant d’une jambe de bois, Charlie traînait plutôt avec lui son amour perdu en bandoulière, témoignage douloureux mais brutalement honnête d’un passé impossible à enterrer.

Toutes ces années les séparaient encore, là, alors qu’ils n’osaient trop se regarder. Si les kilomètres ne les séparaient plus, leurs cœurs chantant à sept ans d’écart composaient leur paradoxe. Les papillons reposant dans l’estomac du vétéran ne l’avaient jamais vraiment quitté, mais s’ils avaient jadis butiné sur les fleurs d’une histoire jeune, après avoir dormi pendant trop longtemps, ils tressautaient maintenant sur son cadavre. Cognant sans issue contre ses côtes, de plus en plus fort, un essaim qui pourrait bien lui faire exploser la poitrine, remplir la pièce d’ailes poudreuses alors qu’il se perdait dans la présence de Ciarán. À la fois si près, si loin. Il n’avait jamais tenté de s’éprendre de quelqu’un d’autre, ne serait-ce que pour une nuit, mais si ses sentiments hibernaient avec le polaroid interdit dans ses affaires, les yeux ondins posés sur lui ne manquaient pas de lui apporter son printemps. Comme réveillé d’un mauvais rêve, rouvrant ses yeux à un soleil éclipsé, Charlie tombait amoureux une deuxième fois. Encore une fois. Sang cascadant dans des membres refroidis. Brûlure des braises rallumées. Douleur délicieuse. À la fois si près, si loin, il savait que ça avait été une mauvaise idée, un instant de faiblesse dans le fort de constructions mentales qu’il s’était bâti, mais il ne regrettait pas une seconde d’avoir pris cette décision. Les mauvaises décisions avaient une saveur douce-amère et la faiblesse ne lui faisait plus peur. Que dire à quelqu’un qui a déjà tout vécu ? Qui a déjà tout regretté ? Dans un monde constitué de petites douleurs, certaines sont mieux venues que d’autres. Ciarán était l’une d’elles : souvent courant dévastateur le tirant vers la chute dangereuse, aujourd’hui doux filet d’eau sur de vieilles blessures.

À l’aveu soupiré du zouwu submergé d’émotions trop fortes, le nymphe hésita. “I know, I’m sorry too. I… Was this a good idea? Should I just…?” Une main frémissante de tremblements pointée vers la sortie. Charlie laissa son regard glisser vers la porte, suivant la flèche pointée par les doigts du scénariste, revint rapidement sur ce visage qu’il avait jadis tant embrassé. Un raclement de gorge, et il quitta l’appui de la table pour tirer à nouveau sa chaise en fer, s’asseoir devant lui. Ce n’était pas une situation facile pour aucun d’entre eux, se rendit-il à l’évidence. Les émotions qui émanaient de Ciarán étaient aussi chaotiques que les émissions d’une vieille station de radio, variantes, brouillées, et il n’arrivait pas à les décoder, mais il se doutait que peut-importe leur nature, il ne pouvait être indifférent à l’importance du moment qu’ils étaient en train de vivre… Déconcentré par le cœur battant, battant, battant dans la poitrine de son ancien amant, il n’arrivait pas à penser à autre chose, amplifié par la force de son imagination enflammée ou de son empathie surnaturelle, il n’entendait que ça, supplication de se rappeler ce qu’il goûtait, ce qu’il sentait, la texture de sa peau, chaviré par l’idée qu’il pourrait partir encore. Il allait le rassurer, que ça allait aller, qu’il pouvait rester, mais les mots restèrent étranglés dans sa gorge, et le brun enchaîna. “I’m not here to reopen old wounds. I thought after all this time, you deserved more than any half-assed explanation I could give you so I didn’t want to insult you by giving it to you seven years too late.” Charlie avait longtemps essayé de deviner ce qui l’avait fait partir, sans succès, mais il devait lui accorder ce point. Il n’avait pas envie de savoir, vraiment, au fond : comme le lecteur qui hésite à terminer les dernières pages d’un livre, pour que les personnages n’existent à jamais, inchangés, dans un état de suspension littéraire, pour que jamais ils ne s’évaporent, il ne voulait pas mettre le point final sur leur histoire, réservant un mince espoir que tout pourrait s’arranger, qu’il changerait, s’il le fallait, qu’il ferait n’importe quoi pour que Ciarán lui pardonne ce qui l’avait fait fuir. Baissant des yeux coupables vers les mains masculines serrant la tasse qu’il lui avait offerte, il déglutit simplement, acquiesçant doucement. “I know that it was me who put us into this mess, and you don’t owe me anything. If it’s too much, I can leave.” Charlie sentit des palpitations le saisir, à la fois d’anxiété et par anticipation à ce qu’il s’apprêtait de faire. Il ne pouvait pas partir. Pas après tout ce temps, toute cette attente. Pas après toutes ces années. Comment lui expliquer que si le devoir avait une place là-dedans, ce n'était qu'une infime partie de l'iceberg ? Qu'il lui devait bien plus que ce qu'il était prêt à avouer ? ”It’s okay… I’m as guilty as you are”, murmura-t-il. C’était pourri, comme réponse, se disait-il, mais que pouvait-il bien lui dire ? Que pouvait-il bien lui dire, alors que son être entier se consumait sur place, déchiré entre l’envie d’être raisonnable, de ne pas jeter des mois de thérapie à la poubelle, de simplement l’aider avec ce qu’il était venu faire et l’envie de se jeter dans ses bras, d’enfoncer son nez dans son cou, de respirer son odeur qui lui avait tant manqué. Avançant une main tranquille vers celle de Ciarán qui lui avait pointé la porte, il effleura d’abord les doigts tremblants, puis les serra avec toute la douceur du monde; un geste encore empreint de soupirs amoureux et de bienveillance. Il ne pouvait pas supporter de ne pas le toucher, ne serait-ce que de l’effleurer, et seul ce minuscule contact qui à une époque avait été normal et pris pour acquis lui semblait maintenant comme une transgression terrible. ”Please don’t go”. Pas encore, avait-il envie d’ajouter. Pas encore. Dis-moi simplement ce que je dois faire, je ne te décevrai pas, je suis plus fort que ça - des pensées qui le transperçaient, intransigeantes, restées prisonnières de ses cordes vocales alors que pour la énième fois, Ciarán lui coupait le souffle.





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Pseudo / Pronoms : evy / elle
Messages : 173
Âge : trente-sept ans
Nom rebelle : Bagdad
Nombre de dés : cinq dés eau + un dé terre
Résidence : seattle, au plus près de l'eau
Profession : scénariste spécialisé dans le cinéma surnaturel
Faceclaim : sebastian stan
Pouvoirs/capacités : nymphe lié à l'élément de l'eau, maîtrise également la terre depuis plus récemment
Crédits : inthebleakmidwnter (avatar) adamantium (aesthetic), magma. (code signa), aithusa (crackship)
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Sam 30 Jan 2021 - 20:22
the road not taken looks real good now

“Sleep in half the day just for old times' sake
I won't ask you to wait if you don't ask me to stay
And the heart I know I'm breakin' is my own
To leave the warmest bed I've ever known”

   

   
Ils étaient comme prisonniers dans un moment, suspendus en l’air, prêt à s’effondrer au cœur d’une bulle de verre trop fragile. Il y avait l’odeur du passé autour d’eux, entêtante, familière – Ciarán s’en repaissait malgré lui. Les secondes défilaient déjà, trop vite, au rythme effréné du myocarde dans sa poitrine qui se serrait. Jusqu’à ce que Charlie les sauve tous les deux de ses désirs à lui, avec sa voix grave et son ton hésitant.  ”It’s okay… I’m as guilty as you are” Le nymphe resta interdit. Coupable ? Coupable de quoi exactement ? De l’avoir trop aimé, de lui avoir tout donné ? De s’être rendu si difficile à quitter ? Ciarán voulait rire, mais sa gorge était de pierre, de chaux, trop usée d’avoir crié en silence, de revomir les étoiles restées coincées dans sa trachée, souvenirs des petits déjeuners qu’ils avaient partagé entre leurs draps blancs. Après ça, il avait passé des années à rassembler les fragments de Charlie qui lui restaient, éparpillés dans sa mémoire et sous sa peau, pour les recoudre et avoir au moins ça de tangible, quelque chose qui resterait près de lui sans qu’il ne puisse lui faire de mal. Il s’était forcé d’effacer son odeur, le timbre de sa voix, le goût de ses lèvres, l’image parfaite de ses yeux bleus – mais lorsque la main du zouwu effleura la sienne, tout lui revint avec la force d’un train. C’était dangereux, délicieux, dévastateur. Le contact tendre faisait tout remonter à la surface, et Ciarán en voulait plus. En une fraction de seconde, il avait déjà imaginé les tissus déchirés, les douces morsures sur les épaules, la prise sur ses hanches, les souffles courts et mélangés, un ballet qu’ils avaient déjà dansé des centaines de fois avant que le rideau ne retombe pour de bon.  ”Please don’t go” Pourtant, si Ciarán était raisonnable, c’était ce qu’il ferait. Tant qu’il en était encore temps, avant que l’impardonnable n’arrive. Mais il était allé trop loin, il creuserait encore, creuserait sa propre tombe et celle de Charlie probablement mais il n’y avait plus la moindre chance qu’il ne parte avant de s’être fait entendre.

Il retourna la main et emprisonna à son tour les doigts du zouwu entre les siens, un geste familier, instinctif, ferme. Il ne se rendait même pas compte qu’il caressait la chair avec son pouce alors qu’il dardait son regard inflexible sur les prunelles bleutées de Charlie. Bleues comme l’océan, qui lui rappelaient la beauté et la fidélité des vagues qui viennent rejoindre la plage. Constantes, puissantes, passionnées. Comme l’amour qu’il avait encore pour lui. ”There is no world, no universe, no version of this story anywhere in which you are guilty of anything.” affirma-t-il avec la plus grande assurance, découpant les syllabes comme s’il était capital qu’il les entende, qu’il les comprenne, comme s’il était en train de lui révéler le secret de la création de l’univers. C’était une chose d’avoir quitté l’amour de sa vie, de s’être condamné au malheur, d’avoir passé des années dans le noir et la vodka pour anesthésier sa peine. C’était toute autre chose de découvrir que Charlie avait pu penser une seule seconde que même une partie de tout ça était de sa faute. Il était parti avec la certitude que à terme, le zouwu s’en remettrait, qu’il saurait voir Ciarán pour ce qu’il était : un type paumé qui ne méritait pas son amour. Qui ne méritait pas qu’on risque sa vie pour lui. Il aurait préféré que Charlie hurle, qu’il le chasse, qu’il lui dise qu’il lui avait brisé le cœur et qu’il ne pourrait jamais lui pardonner. Tout, plutôt que d’entendre que quelque part, il se blâmait pour ce qui était arrivé. ”Is this what you think? That you somehow did anything to make me leave? Cuz’ I’ll be damned if I let you believe that you had anything to do with my cowardice and fucked up way to protect you.” Il n’était pas venu pour rouvrir d’anciennes plaies, il l’avait dit et il l’avait pensé. Mais s’il fallait guérir l’infection avant de recoudre, alors il ferait n’importe quoi.

N’importe quoi. Voilà ce qu’il avait fait, songea-t-il en se mordant les lèvres, réalisant les mots qui lui avait échappé. Charlie n’allait pas laisser passer ça, c’était certain. Il avait toujours refusé de lui révéler les détails de sa malédiction, car sachant très bien ce qu’il lui aurait répondu, il avait fait si attention, avait dissimulé la vérité avec tant de talent. Et par manque d’entraînement, dans un coup de chaud, il avait lui-même soufflé la bourrasque qui ferait trembler le château de cartes.


Your shaky hands that won’t meet mine
They say to heal you just need time
You’ve always been a flight risk
I really thought that we could do this
The air was cold and so were you
A tragic love in shades of blue
One for the future, two for the past
A cursed love story can never last


   
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CIARLIE ◑ the road not taken looks real good now Empty Re: CIARLIE ◑ the road not taken looks real good now

Mer 3 Fév 2021 - 2:37

The road not taken looks real good now

Le monde avait cessé d’exister autour d’eux. Le stationnement derrière la fenêtre poussiéreuse et sa bonne vieille Ford Bronco 1989, le couloir aux photographies larmoyantes et leurs visages précieux, les médailles commémoratives, les échos des témoignages dans les grandes salles vides. Les rues humides de Lake City où se reflétaient les feux de circulation le soir, Seattle et sa Space Needle, la vue depuis leur ancien appartement lorsqu’ils grimpaient sur le toit, verre de vin à la main. Les commerces, les tournants, les statues et monuments que l’on apprend à connaître par cœur, la pluie qui lave les pleurs. Tout ça avait disparu, momentanément, alors qu’un vétéran et un scénariste voyaient leurs histoires improbables se fracasser à nouveau l’une contre l’autre dans un tout petit bureau. S’ils se levaient pour partir chacun de leur côté comme ils l’avaient déjà fait, des gestes qu’ils avaient sans doute l’un et l’autre rejoué sans cesse en esprit telles les deux mêmes notes sur un vinyle brisé, s’ils ouvraient cette porte pointée du doigt, sans doute ne s’ouvrirait-elle que sur du vide. Un vide intersidéral, intergalactique, interunivers, où le temps n’existe plus, et les seuls signes de vie pour des années lumières sont lui et lui, deux êtres blessés et aimants, prisonniers de leur bulle sur leurs chaises en fer, prisonniers d’une attraction douloureuse dans une salle trop petite pour contenir leurs hurlements silencieux; contemplés de loin par les supernovas et les cruels tissus du destin.

Les premières apparences de la visite de Ciarán ressemblaient de plus en plus à une excuse pitoyable de l’univers pour les rassembler, une blague morbide d’un être omniscient se délectant de leurs cœurs saignants et leurs élancements affamés. Mais Charlie ne croyait pas en Dieu. N’y croyait plus, serait bien plus juste. Il avait trop vu d’horreurs, trop de morts inutiles. Les mauvaises personnes comme les bonnes, personne n’échappait à la faucheuse sous le regard vide d’un fusil. Il fût une époque où il aurait voulu croire, trouvant un caractère divin aux souffles entre deux plis de draps, aux souvenirs partagés, aux regards complices échangés mais tout cela lui avait été arraché brutalement quelques jours avant son dernier déploiement. Si l’univers se plaisait de les voir ainsi à nouveau confrontés, Charlie ne savait plus où donner de la tête. Partagé entre l’acide culpabilité de ne pas avoir donné assez, de n’avoir su satisfaire la personne qui comptait le plus au monde pour lui, et la chaleur de cette paume pressée contre la sienne, la douceur de ce pouce caressant sa peau travaillée par le soleil. Seul ce petit contact le faisait frissonner, secouant toute la surface de son épiderme comme autant de petites vagues sur l’océan de ses regrets. Privé de contact depuis tellement longtemps, la peau de Ciarán et le regard solide qu’il déposa dans ses yeux envoya valser de vastes paysages entre les murs de son crâne. Des paysages de mers furieuses aux rocs téméraires, de phare solitaire gardien des brumes. ”There is no world, no universe, no version of this story anywhere in which you are guilty of anything”. Les sourcils du zouwu tressautèrent alors qu’il n’arrivait pas à assimiler les paroles versées à lui. Il avait passé les sept dernières années à se lever chaque matin avec le poids de sa tristesse honteuse pour lui courber les épaules; croire que ça aurait pu être autrement lui semblait impossible. Il ne comprenait pas ce que le nymphe essayait de dire. Il serra presque imperceptiblement ses doigts dans ceux de Ciarán, un tressautement incrédule, un tremblement anxieux. ”Is this what you think? That you somehow did anything to make me leave? Cuz’ I’ll be damned if I let you believe that you had anything to do with my cowardice and fucked up way to protect you.” Sa voix avait une intonation grave et sérieuse, la mélodie d’un reproche avec de trop douces paroles. Charlie ne savait où regarder, luttant contre l’envie de baisser les yeux, de se soustraire au bleu perçant du regard de Ciarán comme il l’avait fait en 2013. S’il n’avait pas tenu sa main, elle aurait sans doute tremblé, et il ferma son autre poing sur ses cuisses pour en ignorer les tressautements. Il ne comprenait pas. Comment se convaincre que toute sa réalité, tout son monde était faux ? Un horrible rêve bâtit sur de fausses croyances ? Dans quelle version de leur univers n’avait-il rien à se reprocher dans cette histoire ? Les cils du médic papillonnèrent un peu comme ses lèvres qui ne savait que dire, à la fois nerveux et bouleversé. ”I-I… I don’t understand”. Il aurait voulu lui dire de se taire, il aurait voulu se boucher les oreilles pour ne rien entendre de tout ça qui le replongeait dans des doutes infinis, ces doutes qui l’avaient tenu éveillé toutes ces nuits à essayer de donner un sens à la disparition de son plus grand amour. Il aurait voulu que cette culpabilité, cette certitude d’avoir fait quelque chose de mal reste bien rangée dans les cases de son esprit, non-dérangée, parce que sans cette douleur, toutes les dernières années perdaient de leur logique, de leur vérité, leur ordre. Mais il n’aurait jamais pu se résoudre à lui dire de cesser de parler, cesser d’entendre cette voix qui avait perdue de son authenticité au fil de ses songes et qu’il retrouvait brutalement, et au fond de lui, sa soif pour l’honnêteté le forçait à chercher à comprendre, à creuser ce que Ciarán venait de lui révéler. La question qu’il posa fût teintée de douleur, sa voix comme sur le point de casser.  Il ne lui lâcha pas la main; il sentait qu’il en avait besoin, pour continuer. ”Why leave? Why leave, if not because of me? What we had…”. Il prit une pause, brisa enfin leur contact visuel qui commençait à lui peser. Les yeux intenses du nymphe lui donnait le vertige, comme ils l’avaient faits tellement de fois auparavant. ”What we had, it was unique. I always figured that I must have done something wrong, very, very wrong for you to disappear. Why else?”. Son ton était dénué de colère. C’était la voix d’un homme fatigué, résigné, mais tout en lui criait, hurlait l’amour qu’il lui portait encore, comme une seconde peau dont il était impossible de se débarrasser. Ses émotions confuses tourbillonnant dans sa poitrine ne s’éclaircissaient pas, s’épaississant de seconde en seconde avec une confusion des plus totales, une douleur qu’il avait porté avec lui depuis trop longtemps et un désir sauvage qui le consumait, enflammé par le contact de sa peau sur la sienne. Oh, Ciarán. Toi, de tout le monde, devait le savoir mieux que personne : le marin tombé amoureux de l’océan ne peut que s’y noyer.


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Dim 7 Fév 2021 - 18:52
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“Sleep in half the day just for old times' sake
I won't ask you to wait if you don't ask me to stay
And the heart I know I'm breakin' is my own
To leave the warmest bed I've ever known”

   

   
Il se souvenait parfaitement du jour où il était parti. Une matinée de printemps, la rosée du matin salie par les cendres de la guerre. Il s’était levé comme un automate, la boule au ventre. Charlie n’était pas rentré depuis trois nuits – le nymphe ne vivait qu’au rythme des vibrations de son téléphone, des nouvelles trop rares d’un amant qui faisait de son mieux pour lui écrire mais qui devait se battre. La guerre allait empirer. De nouveaux soldats rejoignaient les différents fronts, plus de carnage chaque jour, plus de perte. Comme un fantôme, la porte du réfrigérateur ouverte pour y chercher du lait et un peu de courage. Chaque seconde passée à fixer l’intérieur au rétroéclairage était une seconde où la Faucheuse poursuivait Charlie de ses assiduités. Impossible de détourner le regard alors qu’au lieu des condiments, c’étaient des grenades qu’il imaginait, et lorsqu’il laissa tomber le carton de lait qui se renversa par terre, c’est le sang de Charlie qui en jaillit et se répandit autour de lui, grand océan carmin de sa propre culpabilité. Il était resté des heures, assis dans le carnage, à suffoquer et sangloter, gorge serrée et yeux gonflés. Il devait être courageux – arrêter de porter les œillères qu’il chérissait tant et qui lui avaient permis de continuer à vivre la tête dans la sable. Le moment était venu. C’était facile. Il n’avait même pas à dire au revoir. On lui mâchait le travail. Il s’était relevé, avait épongé le lait et les regrets. Il avait pris son temps pour rassembler ses affaires, tout mettre dans un sac, les ressortir et les plier trois fois, espérant que Charlie allait rentrer, le trouver, le supplier de rester, et qu’il serait obligé de craquer. Il n’aurait pas trouvé la force de partir après l’avoir regardé dans les yeux. Mais le zouwu n’était pas rentré. Et après une journée passée à tuer le temps, il n’avait plus eu d’échappatoire – partir c’était sauver leurs vies. Mais alors qu’il s’était apprêté à fermer la porte de leur appartement, il avait cru entendre les murs lui crier de rester.

Il lui devait tout. Il lui devait tout et il avait gâché sa vie. Même partir, il n’avait pas su faire ça correctement. ”I-I… I don’t understand”. Ciarán peinait à maintenir leur contact visuel. Sa voix était douce – lui rappelait la chaleur de l’alcool, sa propre forme d’addiction, plus raffinée que la dernière. Avant Charlie, le nymphe n’avait jamais su qu’il était possible d’aimer autant. Jamais su que les étoiles auraient une saveur si particulière ; le goût du miel et de l’ambition, des flammes et de la détermination, de la peur panique de la solitude. Jamais su que l’extase était si sucrée, si brûlante et traverserait tout son corps comme la foudre d’un ancien dieu. Charlie ne comprenait pas. Et à ce moment-là, Ciaran perdait de vue sa propre détermination, toute la légitimité de ses funestes raisons. ”Why leave? Why leave, if not because of me? What we had…” Spécial. C’était spécial. On croit toujours que personne dans l’histoire de l’humanité ne s’est aimé comme on s’aime mais parfois on sait que c’est la vérité. Je n’ai pas oublié. Touche-moi. Je connais tes cicatrices et tes doutes, je sais comment tu penses, les lignes tracées sur tes paumes. Je me sens si seul sans toi. Touche-moi, touche-moi encore. ”What we had, it was unique. I always figured that I must have done something wrong, very, very wrong for you to disappear. Why else?” Ciarán voulut sourire sans trouver la force d’actionner les bons muscles. Ligne tordue sur ses lèvres comme un navire qui ignore l’aiguille qui pointe nord et qui fonce droit vers l’iceberg.

Pourquoi ? Parce que Charlie l’a aimé quand il se détestait. Il l’a aimé les matinées d’été avec les caresses de la lumière sur leurs visages et les oreillers, il l’a aimé à l’aube, ivres et laissant des marques rouges d’amour sur leurs peaux, il l’a aimé les jours de silence qui semblaient n’avoir aucun sens, il l’a aimé lors de ses nuits les plus longues, langues chassant la solitude et les tourments. Parce que Charlie lui a tout donné, et qu’il faut qu’il vive pour que quelqu’un d’autre lui rende tout cet amour sans que Ciarán ne puisse le ruiner. “Because I wasn’t good for you. It wouldn’t have ended well, and I couldn’t risk it.” Il a pensé à tout, passé en revue toutes les éventualités. Rester près de lui en tant qu’ami. Mais ils n’auraient pas pu être amis – ils se seraient aimés jusqu’à en mourir tous les deux. Ils se seraient battus, se seraient étreints jusqu’à se fondre. Le nymphe se serait blâmé jusqu’à en être malade et ils n’auraient jamais été amis. L’amour n’est pas raisonnable. Il est violent, tout dans le sang, qui pulse et hurle sous sa peau, intimant ceux qu’il a condamnés à réaliser son délicieux et criminel dessein.  “I’m like poison, seeping underneath your skin and through your veins. You don’t realize it until it’s too late. I wanted to stay. I… I really wanted to stay.” Sa voix se brisa sur l’aveu, la confession étranglée trop évidente et pourtant pas suffisante. Ciarán aurait voulu que le monde implose au petit matin, que l’apocalypse s’abatte sur eux, qu’elle leur donne quelques heures à s’aimer sans scrupules et sans peur et sans limites. “It was never you. It was me all along – I’m the one who’s cursed.” Il y avait encore une porte, à l’arrière de son esprit, une porte ouverte comme un trou béant dans son âme. Une porte qui hurle comme les murs de son appartement, qui supplie pour être enfin refermée, qui prie pour le retour de l’être aimé.


   
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Mar 2 Mar 2021 - 21:07

The road not taken looks real good now

Il se souvenait parfaitement du jour où il était rentré. En uniforme, son sac et ses multiples écussons sur le dos, le sourire aux lèvres de pouvoir partager un petit repas avec son amoureux avant de repartir. Il n’avait pas vraiment eu le droit, après tout il était en déploiement, mais leur appartement était si près… connaissant bien son supérieur avec qui il avait eu l’occasion de fraterniser en Afghanistan, il n’avait suffi que d’offrir quelques sketchs de son journal en échange de sa liberté pour un soir. Des pages un peu brunies couvertes de traits grossiers de graphite, des visages et des paysages qu’il avait gravés pour ne pas les oublier. Des pages à l’odeur de café renversé, au textile imprégné du sable et des rires des camarades perdus. C’est ainsi, le cœur heureux et quelques dessins en moins qu’il avait tourné la clé du bout des doigts, franchi cette porte qui ne manquait jamais de le transporter dans un monde plus doux que celui qu’il laissait sur le tapis d’entrée. Il avait appelé doucement, fier de sa surprise, impatient de voir les yeux de glace s’illuminer, impatient de le serrer dans ses bras, toujours un peu trop fort; mais seul le silence lui avait répondu. Ses bottes cirées l’avaient mené vers des pièces familières, les mêmes qu’il traçait le contour en esprit avant de s’endormir, mais ces pièces familières n’étaient plus que souvenir. Éventrées, vidées de ce qui leur donnaient toute leur vie. Il se souvenait de la fenêtre restée ouverte, les rideaux translucides soulevés dans un soupir las, le lit nu, sans couette ni oreillers. Les tiroirs vides. Il avait erré longtemps, comme un fantôme dans cette maison qu’il ne reconnaissait plus, fixé les photographies encore aimantées sur le réfrigérateur. Envoyé une cascade de textos non-desservis auxquels il connaissait déjà la réponse. Assis devant le téléphone pendant des heures, à attendre qu’il sonne, à attendre que la petite lumière du répondeur s’illumine. Le silence de leur appartement lui volant sa voix, lui volant ses pleurs, lui volant ses mots comme on lui avait volé Ciarán, il s’était simplement roulé en boule tout habillé dans ce lit qui était jadis le leur, attendant que la nuit passe comme un mauvais rêve. L’aube ne lui avait rien redonné, et il était parti, lui aussi, les larmes prises au travers de la gorge.

Charlie pris conscience qu’il serrait sa main beaucoup trop fort. Un regard rapide sur ses jointures blanchies, sur ses doigts crispés, et il se dégagea de l’emprise du scénariste dans un petit mouvement coupable. Cette conversation, ils auraient dû l’avoir sept ans auparavant. Les événements lui rentraient dedans avec la force d’un train, trop rapides, trop soudains, étranges après tellement d’années passées à souffrir. Le sourire à demi tordu du nymphe ne trompait personne; il souffrait, lui aussi. Le vétéran aurait voulu fermer les yeux, faire disparaître ce visage si parfait, faire disparaître cette main qu’il aurait voulue partout sur sa peau assoiffée, faire disparaître cette odeur qui n’avait pas changée et qui l’enivrait plus que n’importe quel spiritueux. Mais il était bien là. Toujours là, une constante qui l’avait tellement souvent replongé dans les abysses de son esprit confus et triste à chaque fois que cela faisait un peu trop longtemps qu’il allait bien. Une constante qui le faisait rêver, parfois, en regardant le va-et-vient des vagues, lorsqu’il se demandait s’il les regardait, lui aussi. Tout revenait vers lui, toujours. Ça n’aurait jamais pu en être autrement. “Because I wasn’t good for you. It wouldn’t have ended well, and I couldn’t risk it ”. Ses sourcils se froncèrent de douleur un court instant, mais il se força à garder une expression neutre. Soldier it on, Charlie. La même habitude qu’il travaillait à effacer chez ses clients, cruelle ironie. Il s’était toujours imaginé qu’une telle rencontre aurait pu l’aider à trouver un sens dans tout cet amas d’incertitudes et de doutes. Combien de temps passé à se perdre dans ce qui aurait pu être ? À imaginer leurs répliques, assis dans la douche, à pleurer d’impuissance et mêler ses larmes discrètes à l’eau dans le drain ? Ça ne ressemblait à rien à ce qu’il s’était mentalement préparé pour, et le sens continuait de lui filer entre les doigts. Les paroles du scénariste ne faisaient aucun sens, et les scénarios extrapolés se compétitionnaient dans son crâne douloureux. “I’m like poison, seeping underneath your skin and through your veins. You don’t realize it until it’s too late. I wanted to stay. I… I really wanted to stay ”. Le zouwu secoua la tête en négation, échappant à tout prix au regard de son ancien amant. Les pupilles perdues dans son café refroidissant, il détaillait les bulles de mousse à la surface, le dégradé de marron tourbillonnant au centre. Tout pour se soustraire à ces mots-poignards, à ces excuses qu’il ne voulait pas entendre, à la culpabilité qui se déversait de l’être qu’il avait aimé comme un dégât de lait sur le carrelage de la cuisine. La voix de Ciarán se brisa, et il sentit son cœur se fendre. Pourquoi ? La question se répétait sans cesse sur ses lèvres muettes, incapable de prononcer quoi que ce soit. Pourquoi partir si tu voulais rester ? Pourquoi nous condamner à ça ? On était si heureux. On était si heureux… “It was never you. It was me all along – I’m the one who’s cursed”. Une pointe de colère le transperça à ces derniers mots, noyée dans le torrent de sa douleur. Les commissures de ses lèvres tremblèrent, et il se leva brusquement, secouant la tête doucement comme pour chasser les centaines de pensées qui ne cessaient de l’assaillir, chasser les émotions du scénariste qui débordaient sur les siennes. “Shut up”. Sa voix était rocailleuse, un grondement bas d’animal blessé qu’il regretta aussitôt qu’il fût prononcé. Il passa une main dans ses cheveux et soupira, répétant plus doucement, en tournant son regard vers la fenêtre, loin de lui. “I-I’m sorry, just, stop talking”. Il ne voulait pas de ça. Il ne voulait pas d’excuses à demi prononcées, de mystères enrobés de miel. Il ne voulait pas de fausses vérités ou de mensonges blancs pour sauvegarder son âme douloureuse. Il avait eu sept ans pour se raconter des mensonges, il avait dépassé cette étape. Il rangea ses mains tremblantes dans ses poches, évitant toujours ce regard qu’il ne savait plus comment supporter. “I need to know the truth. You didn’t come here for this, and I’m sorry. But I need closure. I need to know. Don’t tell me you weren’t good for me, that’s not for you to decide. It’s not just that“. Il renifla, ravalant les larmes qui menaçaient de tomber du coin de ses yeux humides. “I just… Was there someone else? “. Pourquoi tout abandonner, si ce n’était pas pour quelqu’un d’autre ? Pourquoi tout planquer leur vie à deux s’il n’avait pas meilleur ailleurs ? Il n’avait plus le droit de lui en vouloir, après tout ce temps, mais il devait savoir. Son cœur battait dans sa poitrine à lui en faire mal; déchiré entre la douleur de ces sept ans solitaires et cette envie si furieuse de le prendre dans ses bras, de l’embrasser à en oublier son nom, d’effacer de leurs mains tout ce mal qui empoisonnaient leurs âmes. Triste, en colère, et toujours éperdument amoureux. Au fond, rien n'avait vraiment changé.



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Pseudo / Pronoms : evy / elle
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Âge : trente-sept ans
Nom rebelle : Bagdad
Nombre de dés : cinq dés eau + un dé terre
Résidence : seattle, au plus près de l'eau
Profession : scénariste spécialisé dans le cinéma surnaturel
Faceclaim : sebastian stan
Pouvoirs/capacités : nymphe lié à l'élément de l'eau, maîtrise également la terre depuis plus récemment
Crédits : inthebleakmidwnter (avatar) adamantium (aesthetic), magma. (code signa), aithusa (crackship)
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Dim 7 Mar 2021 - 18:05
the road not taken looks real good now

“Sleep in half the day just for old times' sake
I won't ask you to wait if you don't ask me to stay
And the heart I know I'm breakin' is my own
To leave the warmest bed I've ever known”

   

   
La fracture, soudain. Les mots de trop, la vague qui engloutit le sable. Ciarán regarda le zouwu se lever sans ciller, sans trembler. Il se souvenait soudain, et son propre égocentrisme le prit à la gorge. Ce n’était pas seulement lui qui menaçait de s’écarteler lorsqu’il pensait à ces choses-là, c’était Charlie aussi. Charlie qui pouvait lire en lui, qui recevait ses émotions aussi sûrement que les siennes. Et c’était trop. “Shut up” L’ordre résonna contre les murs, claqua dans l’air, et tout en Ciarán se tut. De honte, de regret. De subite compréhension aussi. Même son cœur semblait plus hésitant à battre, de peur de perturber le silence assourdissant entre les deux hommes. “I-I’m sorry, just, stop talking” Pas besoin d’être un empathe pour ressentir la colère qui émanait du zouwu, et c’était un soulagement, d’une certaine manière. Ciarán préférait la colère, il la connaissait bien, il était à l’aise avec, il avait nagé dedans jusqu’à se noyer. Il aurait dû se faire haïr dès le début, c’aurait été tellement plus simple mais il n’y avait pas pensé, l’idée lui aurait sûrement été insupportable, voir le regard chaud de Charlie se transformer en dédain, en animosité, aurait-ce vraiment été mieux ? Pour lui, peut-être. Mais le nymphe était encore égoïste, même aujourd’hui.

Ils ne parleraient pas du scénario, c’était trop tard. Ciarán aurait dû le savoir – peut-être qu’il le savait à vrai dire, peut-être que s’il avait le courage de regarder en face ses failles et ses désirs, il aurait pu admettre que sa nouvelle mission tombait un peu trop bien, qu’il était un peu trop heureux qu’on lui donne une excuse, quelque chose pour se déculpabiliser d’y retourner, de revenir foutre en l’air la vie de son amant. Mais il s’était trop pris au jeu, il était tombé amoureux du déni comme il était tombé amoureux de Charlie – et lui, il ne l’avait jamais quitté. “I need to know the truth. You didn’t come here for this, and I’m sorry. But I need closure. I need to know. Don’t tell me you weren’t good for me, that’s not for you to decide. It’s not just that“ Les yeux du nymphe restaient résolument plantés sur sa tasse de café désormais froid, comme s’il espérait tomber au fond, le dos voûté et l’esprit embrumé. Il avait honte. Il avait tellement honte. D’avoir pris cette décision seul, d’avoir choisi la facilité du départ sans le moindre mot, sans lui laisser une chance de le retenir. Il ne pouvait pas continuer à se draper dans ce qu’il pensait être le mieux – il n’était pas Dieu. Il avait arraché le destin de l’homme qu’il aimait plus que tout au monde sans même lui expliquer pourquoi. Et toutes les bonnes intentions du monde n’y changeraient rien. “I just… Was there someone else?“ La tête dans les mains, coudes creusant un trou sur ses cuisses, Ciarán étouffa un rire. Dans sa prison de culpabilité et de ressentiment, il n’avait jamais considéré une hypothèse aussi triviale. “No.” Il répondit tout simplement, la voix étouffée par le tissu du tee-shirt contre lequel son nez frottait presque à force de pencher la tête pour s’y cacher. “There was never anyone else.” Il savait que l’explication devait venir, que c’était inévitable, que Charlie lui avait donné des années de répit pour que la graine de courage bourgeonne, pour qu’il ait finalement la force de lui expliquer, de le libérer des hypothèses et de l’incertitude.

Ciarán se leva à son tour, pour trouver dans le sol et dans le poids de son corps un peu de contenance. C’était à lui de parler, de trouver les bons mots, de cracher enfin le morceau qui l’étouffait, qui obstruait sa trachée et son cœur depuis qu’il avait claqué cette putain de porte sept ans auparavant. Briser le silence, recoller les pièces du miroir. “When Caelan and I reunited with Casey and our parents, we… We discovered something. I didn’t tell you at the time because it was my cross to bear.” La voix était d’outre-tombe, bien conscient que la confession venait trop tard, qu’il lui parlait d’une époque révolue et que non content de l’avoir quitté il lui avait aussi caché la vérité. A sa connaissance, personne d’autre ne savait. C’était intime – c’était un fardeau qu’ils partageaient à trois, une ombre noire qui les unissait et qui les séparerait aussi. Mais avant ça, ils vivraient. “They told us the real reason they had to give us up when we were born, and it wasn’t about the money or our powers, like we thought. Turns out we’re cursed, all three of us.” Nouveau petit rire sans joie. La difficulté venait maintenant – et si Charlie ne le croyait pas ? S’il croyait que le nymphe inventait une excuse de toutes pièces, un conte pour se justifier et de dédouaner du mal qu’il lui avait fait ?

Ciarán eut du mal à continuer. Après tout, une partie de cette histoire ne lui appartenait pas – mais ses frères lui pardonneraient, il le savait. Il était plus dur de trouver les mots, lui qui ne les avait jamais formulés à voix haute avec quiconque d’autre. Il y avait une grâce dans le silence, dans l’attente – parce qu’aucun mot ne pouvait illustrer le maelström qui tempêtait derrière les yeux du nymphe. “Nature was angry at our mom for choosing a lead dragon over her duties as a nymph, so we were revenge. Casey, Caelan and I are all fated to die, in different ways.” Ciarán se souvint soudain de cette citation du Portrait de Dorian Gray, posé sur sa table de chevet du temps où Charlie et lui vivaient ensemble. Behind every exquisite thing that existed, there was something tragic. Peut-être cela expliquait-il leur fin – après tout, peut-on s’attendre à ce que l’extase dure sans douleur ? “Casey will succumb to his quest for power. Murder. Caelan is condemned to watch the two of us die while he survives, helpless, through anything thrown at him, then die alone. And I…” Ciarán ne savait pas laquelle de leur malédiction était la pire. Ils en avaient souvent ri, pour ne pas en pleurer. “My one true love will die, and grief will send me over the edge into suicide.” Il se retourna enfin, traçant des pas hésitants à travers la pièce pour rejoindre Charlie qui était toujours dos à lui, face à la fenêtre. Il se plaça derrière lui, n’osant le toucher, n’osant imprimer son corps contre le sien comme il l’avait déjà fait tant de fois.

Les mots étaient sortis. Le secret n’était plus et pourtant il ne se sentait pas soulagé pour autant. Il aurait cru sentir un poids quitter son corps, quelque chose se dénouer à l’intérieur. Mais rien n’avait changé. Il arrivait trop tard, il avait déjà tout perdu, tout ravagé. Il ne méritait aucun honneur pour une vérité crachée sept ans après les faits. Mais puisque tout était révolu, alors il pouvait se permettre cette dernière folie. “I loved you, so, so much. I was completely and hopelessly in love with you. And I knew that this meant putting you in danger. I couldn’t watch you die because of me.” Il s’était cru chevalier, en plus. Il avait pensé le sauver, commettre le sacrifice ultime pour le plus grand bien – mais ça ne lui avait pas coûté qu’à lui. Etrange, cette manière dont il ne se rendait compte de cela qu’aujourd’hui, nourri de la chaleur émise par le corps du zouwu. Il avait décidé du sacrifice pour Charlie aussi. “So I left.” Sa voix se brisa enfin aux pieds de son amant, au milieu d’excuses non prononcées et de fantômes de mots d’amour susurrés dans la pénombre.

   
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Dim 14 Mar 2021 - 16:02

The road not taken looks real good now


TW ; description/allusions tentative de suicide

La colère lui brûlait l’œsophage, transpirait de ses mains réfugiées dans ses pantalons, sortait de ses poumons à chaque expiration trop courte. Le regard flânant par-delà la fenêtre qui peinait à contenir leur histoire. Ils débordaient, tous les deux, comme des barrages trop pleins après une pluie torrentielle. Se fissurant sous la pression, des fuites d’eau perçant le béton des apparences, des ordres de se taire aboyés comme un chien de l’armée, comme un spectre sorti tout droit de ses songes en uniforme. Les dogtags reposant sur sa poitrine lui semblèrent soudainement trop lourds. Le regard flânant par-delà la fenêtre, fuyant la petite guerre qui ravage son cœur, pendant que derrière lui, le silence tombe comme sur les champs de bataille au petit matin. Ce n’est vraiment que ce qu’il est, tout ce qu’il est, il s’en rend compte : un soldat, une machine à détruire. La colère qui le consume, il l’a ressentie avant. La colère de l’impuissance, celle qui donne envie de se jeter dans le combat sans regarder en arrière, de perdre son désespoir dans un autre sentiment plus fort, plus apte à la survie. Le feu pour purger l’horreur. I wanted to stay. Il répète les mots de Ciarán silencieusement, sur le bout des lèvres, sans même s’en rendre compte. Il goûte l’odeur de l’hypochlorite de sodium qui remonte dans son crâne, un rappel qui ne l’a jamais vraiment quitté depuis son réveil à l’hôpital. Toutes ces années à écrire dans sa chair tout ce qu’il n’avait pu faire pour le garder près de lui, toutes ses erreurs, toutes les fois où il n’avait pas été assez, toutes ces fois où il s’était endormi au bout de ses larmes dans un lit glacial, toutes ces fois où il était passé sur les ponts de Seattle avec ce frémissement au bout des bottes, cette impulsion de passer par-dessus bord pour en finir pour de bon, parce que même la première fois, il n’avait pas réussi à faire ça correctement. Toutes ces nuits à errer dehors dans les ruelles, déchiré entre la vie et la mort, à se retrouver complètement saoul au poste de police parce qu’il hurle sa rage à qui veut bien l’entendre. You wanted to stay. Yet you didn’t. Il voudrait se retourner, tout renverser, retourner ce bureau où le scénariste est assis, briser ces tasses ridicules et recouvrir le sol de leur céramique comme du sang solide, arracher les photos et les affiches inspirantes sur les murs. Il se changerait en ours, de cette nature et ces pouvoirs qu’il déteste, il marquerait les murs de ses griffes pour y écrire sept ans perdus, il rugirait à en faire trembler les fondations. Mais il ne bouge pas, Charlie, il reste immobile et il retient son souffle comme si ça pouvait empêcher cette colère dévastatrice de se déverser par ses poumons. Parce que Ciarán étouffe un rire dans son dos. Et entre deux pulsations cardiaques, il se rappelle pourquoi il l’a attendu.  

Ce n’était jamais à lui qu’il en avait voulu. Il ne pouvait pas. Il n’aurait pas pu.
Sa haine du monde, de son identité, des gestes qu’il avait posés. Sa haine de son uniforme, des armes à feu, des fonctionnaires qui l’avaient envoyé en enfer. Tout ce qui l’avait arraché à lui, cette vie qui avait laissé Ciarán partir, et tout son amour dans ses bagages. La traînée de sang que son myocarde avait laissé sur le sol de leur appartement vide, de leur chambre à coucher jusqu’à la sortie, parce qu’il n’avait jamais pu se résoudre à cesser de l’aimer, qu’il s’était retrouvé soudainement sans plus rien, un trou fumant dans les côtes. Ce petit rire gêné lui rentre dedans, l’assomme un peu, et son hémoglobine circule à nouveau. Il n’avait pas pu lui en vouloir, tout comme il n’avait jamais pu se débarrasser du polaroid dans son sac, tout comme il s’était jeté tout le blâme dans l’incompréhension et le silence radio de l’homme qu’il aimait. Parce que Charlie était un soldat, et les soldats sont loyaux. “No. There was never anyone else.” Le zouwu avait fuité, il avait craché l’histoire qui lui débordait par toutes les pores, mais maintenant il n’était que silence, ses yeux bleus un peu mouillés s’accrochant résolument aux contours de la rue dehors. C’était à Ciarán de se laisser percer, sept ans en retard. Il entendit le grincement aigu de la chaise repoussée et le froissement des vêtements du scénariste qui se levait à son tour, serra les dents à s’en faire mal. Il y avait eu un certain confort dans la certitude que tout était de sa faute : c’était là-dessus qu’il avait basé le reste de sa vie, qu’il s‘était reconstruit, morceau par morceau, avec ses victoires et ses défaites, avec ses hauts et ses bas, les fonds de bouteilles de bière et le soleil sur Seattle et la fourrure de sa chienne-louve. Puis le courriel était venu, son amour avait poussé la porte, et le sol s’était dérobé sous ses pieds pour le faire tomber dans ses eaux inconnues et effrayantes. Son torse lui faisait mal, distendu sous un amour sauvage refusant de s’éteindre, distendu sous la colère d’avoir perdu tellement de temps, de vivre cette vie qui ne cessait de le renvoyer au fond. “When Caelan and I reunited with Casey and our parents, we… We discovered something. I didn’t tell you at the time because it was my cross to bear.” Il soupira, secoua la tête à nouveau dans une main qui vint s’appuyer sur ses yeux et son front. Le nymphe craquait de mots, de phrases, de vérités qui n’avait jamais été siennes de lui cacher. Le vétéran lui avait toujours tout dit sur lui, des détails futiles jusqu’aux secrets les plus intimes, et toute cette histoire dissimulée lui faisait l’effet d’une trahison brûlante. Il ne dit rien, écoutant simplement, les mains toujours dans ses poches, seul un léger tremblement pour traduire sa colère, pour traduire le poids du passé et les flammes de son amour ravageur. Les émotions de Ciarán se fracassaient sur lui, vagues d’un océan en pleine tempête, imposées à lui comme s’il n’avait été qu’un vulgaire radeau dans les flots. Lui tourner le dos rendait le tout un peu plus supportable, comme si ne pas le regarder arrivait à assourdir ce qu’il percevait de lui. “They told us the real reason they had to give us up when we were born, and it wasn’t about the money or our powers, like we thought. Turns out we’re cursed, all three of us.” Au tour de Charlie d’étouffer un rire amer, en même temps que le nymphe. Il aurait voulu croire à une blague, un canular, mais il savait que ce n’était pas le cas, la voix derrière lui beaucoup trop sérieuse, beaucoup trop interdite. Maudits ? Ils étaient tous les deux surnaturels, des créatures issues de légendes et de contes humains depuis des millénaires, et pourtant Charlie n’était pas sûr d’avoir déjà cru à l’ésotérique. Est-ce que c’était vraiment possible ? Il ne croyait même pas en Dieu, et pourtant, même s’il n’avait pas envie de le croire, il savait reconnaître la vibration de la vérité au fond des cordes vocales de son amant. Il y eu un court silence, dans lequel ils auraient bien pu y glisser une éternité. Un fracas chaotique des constellations qui s’étiraient dans leurs cœurs saignants. “Nature was angry at our mom for choosing a lead dragon over her duties as a nymph, so we were revenge. Casey, Caelan and I are all fated to die, in different ways.” Charlie se sentit se fracasser un peu plus à chaque nouveau mot prononcé, l’écho projeté par les murs comme une pression terrible sur son être. Il revoyait ses amis mourir dans l’Afghanistan désertique derrière ses pupilles dilatées, et soudainement, il sentait ce destin morbide des fantassins étirer ses bras terribles jusque dans la pièce pour se saisir de son ancien copain. “Casey will succumb to his quest for power. Murder. Caelan is condemned to watch the two of us die while he survives, helpless, through anything thrown at him, then die alone. And I…” Il revoyait les trois frères ensemble, il y a longtemps, des rides de rire au coin des yeux, les blagues qu’ils se lançaient, les repas qu’ils avaient parfois partagés tous les quatre. Les imaginer mourir semblait si irréel. Si faux. “My one true love will die, and grief will send me over the edge into suicide.” Coup de poing au ventre. Voiture folle soulevant le corps en travers de la route. Craquelure dans le verre trop chauffé. Poudre à canon et explosion. Le souffle coupé, Charlie n’arrivait pas à parler. Ça ne pouvait pas être vrai. Ciarán ne prendrait pas sa vie. Ça ne lui ressemblait pas, c’était impossible. Si quelqu’un avait à prendre sa vie entre eux deux, ce n’était pas son nymphe. C’était tellement d’informations en si peu de temps, tellement d’impossibilités dans un si petit espace. Les malédictions n’étaient pas pour eux, ça n’avait jamais été pour eux, ils n’étaient que des gens ordinaires, pas des protagonistes des films que le scénariste écrivait. Il entendit des pas se déplacer jusqu’à lui, beaucoup plus près, juste derrière. Il pouvait presque sentir le souffle dans son cou. “I loved you, so, so much. I was completely and hopelessly in love with you. And I knew that this meant putting you in danger. I couldn’t watch you die because of me.” Il avait mal, tellement mal, déchiqueté par sept ans de solitude, écartelé dans une ironie innommable, brûlé au premier degré par le malheur et le désir de toucher l’être qui se tenait juste derrière lui, de le prendre dans ses bras, de lui dire que tout irait bien, de l’embrasser, partout, de lui faire comprendre avec rage et amour à quel point il lui avait manqué, que rien ne pourrait l’empêcher de l‘aimer. Le nymphe ne savait pas qu’il avait déjà failli prendre sa propre vie, qu’il y avait repensé une deuxième fois, et une troisième, et des centaine de fois après ça. Que si la voisine du bas n’avait pas pensé à venir cogner dans son appartement alors qu’il était au sol et qu’il convulsait, que les secours n’avaient pas été appelé, il serait sans doute mort tout seul, mort de solitude, mort de son absence. L’ironie lui fendait le cœur en quatre. Ils s’étaient aimés, si fort, trop fort, et maintenant ils en étaient là.

“So I left.”

La voix brisée de Ciarán termina de le casser. Un dernier silence s’installa entre eux, entre le dos de Charlie tourné vers la fenêtre et le souffle du scénariste projetant un vent de non-dits et de regrets derrière son crâne. “And yet, here you are”. Le ton du zouwu tergiversait entre le sarcasme et la contemplation, animé de colère et d’amour trop grand, de tristesse et de déni. Il se retourna enfin, plongeant son regard dans celui, orageux et électrique, de l’homme qu’il avait aimé, qu’il aimait encore avec toute la force des éléments. “What if you never knew? What if we just loved each other as we were meant to?”. Il avait envie de lui dire, égoïstement, de le poignarder avec la vérité que c’est ce même départ qui avait failli le faire basculer de l’autre côté. Mais ce serait injuste, alors il tut sa pensée. Certaines vérités étaient destinées pour un autre jour. Il avança d’un pas vers le nymphe dans sa colère, réduisant un peu plus la distance entre leurs corps hurlants. “Was it worth it? All this pain? ‘Cause fuck, there was an infinity of it”. Un nouveau pas vers l’avant. Ils se frôlaient presque. Charlie tremblait. “I could die tomorrow. We don’t get to decide when we go. What if I just walked out of here, in the street, just to prove you wrong? Pulled the trigger? Drowned under a bridge? What good would be your curse then?”. Un autre pas. Il avançait, automatiquement, vers le nymphe, un pas de soldat qui ne s’arrêterait même pas si le ciel lui tombait dessus. Sa colère lui donnait envie de le consumer, de s’élever au-dessus de lui, de l’aimer avec brutalité et vérité, de leur faire oublier la prophétie et les années effacées, d’embrasser cette contradiction intérieure du peuple qui l’avait rejeté, le zouwu provocateur et grondant. Son nez touchait presque le sien, retenu uniquement par le feu des mots qui lui arrachait la langue. “I love you. You can’t do anything to erase that. I’d die a hundred times over if it meant I could be with you, even for a single minute. And if you love me, if you truly love me, you’ll live. You’ll live and you’ll prove destiny wrong”. Il y avait une certitude terrible dans ces mots, dans cette phrase qu’il aurait voulu hurler mais qu’il murmure. Il est à quelques millimètres de l’embrasser, d’envoyer cette prophétie se faire voir, et rien au monde ne pourrait le convaincre du contraire : s’il devait mourir pour l’aimer, il le ferait. Il ne voulait pas d’une vie sans lui, et si c’était le prix à payer… il était prêt.




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Pseudo / Pronoms : evy / elle
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Âge : trente-sept ans
Nom rebelle : Bagdad
Nombre de dés : cinq dés eau + un dé terre
Résidence : seattle, au plus près de l'eau
Profession : scénariste spécialisé dans le cinéma surnaturel
Faceclaim : sebastian stan
Pouvoirs/capacités : nymphe lié à l'élément de l'eau, maîtrise également la terre depuis plus récemment
Crédits : inthebleakmidwnter (avatar) adamantium (aesthetic), magma. (code signa), aithusa (crackship)
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CIARLIE ◑ the road not taken looks real good now Empty Re: CIARLIE ◑ the road not taken looks real good now

Ven 26 Mar 2021 - 21:13
the road not taken looks real good now

“Sleep in half the day just for old times' sake
I won't ask you to wait if you don't ask me to stay
And the heart I know I'm breakin' is my own
To leave the warmest bed I've ever known”

   

   
Ciarán ne s’était pas senti si vulnérable depuis des années. Sans surprise, à vrai dire, parce que c’était trop facile de se perdre dans des corps qui n’étaient pas celui de Charlie, trop facile de fermer les volets pour ne pas voir le jour, prétendre que la nuit n’est jamais tombée sur son amour et qu’il a encore la chance de rattraper ses conneries. Mais le soleil s’était levé depuis longtemps, et avec lui la honte, les regrets. La certitude aussi, la certitude d’avoir raison, poison qui s’insinuait dans ses veines et brouillait son sang. Pénombre, vodka, chuchotements, gémissements, hurlements, bris de verre et larmes – rien n’avait su effacer la voix de Charlie, son odeur si particulière, le son de son rire. Le nymphe était parti, avait tout emporté avec lui avec une naïveté déconcertante, comme s’il était possible de se faire haïr juste en claquant la porte, comme si on pouvait corriger ses erreurs avec une gomme grandeur nature, comme si ça n’avait rien voulu dire, tout ça. Mais ça voulait tout dire et il n’arrivait pas à croire qu’il avait été aussi stupide. Stupide de partir, stupide de revenir. A quoi bon sacrifier quand on revient quémander ? A quoi bon partir quand on n’a pas la force de s’y tenir ? “And yet, here you are” Oui. Oui il était là quand même, tripes sorties et cœur en bandoulière, regrets tellement marqués sur la face qu’ils n’avaient pas pu honorer la raison de sa présence. Même pas foutu de faire ça bien, il avait fallu qu’il lui fasse mal jusqu’au bout.

Il aurait préféré que Charlie reste tourné, c’était plus facile de se confesser à son dos comme on avoue ses péchés au clergé à travers cette petite trappe qui masque la honte, qui dissimule les remords et les plis de bouche tordus. Mais ses yeux le transperçaient désormais – il savait. Son amour savait, et non seulement il était parti comme un lâche, mais en plus il lui avait menti pendant sept ans, l’avait laissé penser que tout était de sa faute. Rien n’était rattrapable – s’il implorait son pardon à genoux pendant des décennies, ce ne serait jamais suffisant. “What if you never knew? What if we just loved each other as we were meant to?” Son calme le glaçait. Quand Ciarán avait appris la vérité, il avait tempêté, il avait hurlé. C’était Casey, qui avait pourtant le destin le plus violent, qui l’avait pris dans ses bras et l’avait forcé à s’arrêter, qui avait comprimé l’air au point que les sanglots ne sortent plus, qui l’avait réchauffé, bercé. Mais Charlie en avait vu d’autres, Charlie avait contemplé la mort de près, il ne se laissait pas détruire si facilement. Le nymphe ne pouvait pas imaginer un scénario dans lequel il n’aurait pas su – c’était la seule chose qui avait protégé Charlie pendant la guerre, leur sacrifice, sa connaissance de leur avenir funeste. Mais ses convictions s’amenuisaient, au fur et à mesure que le zouwu se rapprochait. “Was it worth it? All this pain? ‘Cause fuck, there was an infinity of it” Ciarán aurait voulu répondre oui. Il voulait hurler, encore, parce que c’était ce qu’il savait faire de mieux, parce que c’était la seule chose qui masquait les doutes ; s’il criait assez fort, alors il pouvait se convaincre. Charlie était vivant, ça valait bien ce qu’ils avaient traversé, non ?

Il fallait tenir, il fallait tenir putain de bordel de merde. Charlie tremblait, et Ciarán tremblait aussi, et il ne pouvait s’empêcher d’y penser. Il n’avait jamais été doué pour contenir ses émotions, pour se réajuster. Seul son amant avait ce pouvoir-là. Il ne se battait jamais pour le contrôle ; il n’en avait aucun. Mais il était si près, si près, il aurait été si facile de le toucher, de l’empoigner, de s’entrechoquer. Mais il était comme paralysé par le regard que Charlie lui lançait. “I could die tomorrow. We don’t get to decide when we go. What if I just walked out of here, in the street, just to prove you wrong? Pulled the trigger? Drowned under a bridge? What good would be your curse then?” Il voulait le faire taire, plaquer sa main contre sa bouche, l’implorer de ne pas provoquer le destin. Il ne pouvait pas avoir fait tout ça pour rien, la pensée lui était insupportable. Il ne pouvait pas avoir rêvé de sa peau, de ses yeux, de son torse pendant sept ans pour que le hasard les défie, pour que Charlie le défie. Il ne savait pas quoi répondre – la peur prit le dessus, soudainement. Les tripes qui se nouent, le cœur qui s’arrête. Ne t’approche pas, je vais te tuer, doucement mais sûrement. Il faut que tu vives. “I love you. You can’t do anything to erase that. I’d die a hundred times over if it meant I could be with you, even for a single minute. And if you love me, if you truly love me, you’ll live. You’ll live and you’ll prove destiny wrong” Ciarán allait craquer. Il fallait partir avant que l’eau s’infiltre, avant de se noyer, avant de le noyer. Il n’avait pas dit ‘je t’aimais’, il avait dit ‘je t’aime’ et ça lui écartelait le cœur autant que ça le réparait, une douce et merveilleuse agonie au goût de l’enfer.

Ça avait l’air tentant. Il aurait pu dire oui. Il aurait pu dire à la Nature d’aller se faire foutre, d’envoyer paître le destin et cette épée de Damoclès qui pesait sur leur tête. Il pourrait l’embrasser, là maintenant, il pourrait arracher ses vêtements et embrasser sa peau, se perdre en lui, lui susurrer l’équivalent d’années de mots d’amour retenus, verser la Mer Morte en larmes sur ses joues et vivre. Vivre un jour, deux jours, une semaine, un mois. Mais il faudrait le voir mourir. Et comme ce jour funeste où il avait rassemblé ces affaires, il en était toujours incapable. “I won’t. You don’t get it.” Charlie ne pouvait pas comprendre, il ne pourrait jamais comprendre parce qu’il partirait en premier. Il n’aurait pas à subir l’irréparable déchirure de l’âme sœur amputée, d’errer comme un fantôme en sachant que la meilleure partie de soi réside désormais dans les limbes, entre les souvenirs et les inachevés, comme un cimetière d’espoirs. “The thought of remaining in this world without you is unbearable enough… But to know that I was the one to blame? How could I dare to breathe?” Ciarán ponctua sa phrase d’un nouveau rire sans joie. Il se sentait criminel avant même d’avoir commis l’irréparable – et peut-être même que c’était déjà trop tard, qu’il était allé trop loin. Il avait tout gâché sept ans auparavant, et il gâchait tout aujourd’hui. Y avait-il pire ironie ? Pourtant, ses mains trouvèrent le chemin comme elles l’avaient déjà tracé cent fois. Et c’était une connerie, mais Ciarán ne faisait que des conneries, tout le monde l’avait bien compris. Depuis le temps. Toucher ses épaules, une dernière fois, frôler sa mâchoire, le métal de ses dogtags savamment dissimulées. Farandole éternelle de péchés à commettre qui dansaient dans son estomac, dans ses yeux. Ne craque pas, fais un putain d’effort si tu veux ressortir d’ici en un seul morceau.

Les mains retombèrent, comme une larme qui quitte la joue pour s’écraser au sol. “And even if I could somehow live with myself, I can’t erase the last seven years. The damage I’ve done… I can’t fix it. I would give anything to fix it but I can’t. And I made it worse by telling you all of this.” Ciarán destructeur, Ciarán empoisonneur, Ciarán meurtrier. Si Charlie l’aimait au point d’en mourir, il mettrait un point d’honneur à l’aimer au point de le forcer à vivre.

   
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Sam 10 Avr 2021 - 18:04

The road not taken looks real good now


Mémoire musculaire.
Larynx violoncelle désaccordé, tripes vernies pleines des mémoires des concerts passés. Rugis dans son ventre une mélodie différente de celle murmurée du bout des dents, à demi-mot, mémoire musculaire violente et interdite à portée de doigt, deux souffles plus loin. Face à face comme avant, yeux dans les yeux, deux océans membranaires s’entrechoquant entre les désirs et les mots, l’amertume et la colère. Si Charlie n’est que tison et flammèches, le calme chauffé à blanc de ceux qui n’ont plus rien à perdre, Ciaran est ouragan, tempête tropicale et grêle glaciale tout à la fois, habitudes d’autrefois collant à sa peau comme l’odeur des amants sur les draps et phrases murailles pour lui en bloquer l’accès; mais le zouwu déchu voit à travers les mots, car son langage n’est point verbal, linguiste des secrets que l’on cache au fond des cœurs et des brûlures physiques des émotions titanesques. Insupportable culpabilité, brûlants souvenirs, besoins criants qui transpercent le voile de leurs retenues, devant Charlie ne se tient plus le scénariste mais l’amour jamais oublié et toute sa douleur, et tous ses regrets, et toutes ses conneries, et toute les saveurs particulières des émotions qui dansent derrière ses yeux. Saveurs qu’il avait tant de fois tenté de regoûter les yeux fermés, avec pour seule réponse l’écho frénétique de son propre sang à ses oreilles, la platitude connue de ses propres élancements sentimentaux. C’était à la fois douloureux et exaltant, de subir avec tant de facilité, sans pudeur, les étendues empathiques offertes à lui par un fantôme de son passé revenu le hanter, mais pas un frémissement dans son visage, pas un reflet de la tempête invisible qu’on lui envoyait; seul vibrato de la note finale, ses mains tremblantes au fond des poches. Le silence qui s’installe entre leurs corps trop rapprochés ne s’étire que le temps de quelques expirations, mais au fond de lui, le soldat connaît déjà par cœur le discours que l’on s’apprête à lui offrir. Il ne délaisse pas la glace de ses iris, mordant dans son regard comme un animal blessé, alors que coule de ses yeux humides la détermination obstinée du fantassin. “I won’t. You don’t get it.” Il ne devrait pas, mais un sourire bref s’étire sur ses lèvres. Un sourire furieux, brûlant, le sourire de celui qui en a vu bien d’autres et qui refuse de croire que la bataille est terminée. Bien sûr qu’il comprend. Il comprend ce que c’est d’avoir peur de l’avenir, d’en être terrifié, il comprend la douleur de perdre parce que si Ciaran n’était pas mort, il lui avait imposé la mort de leur relation, la mort de leurs baisers, la mort de leurs « je t’aime » et la mort qui lui collait dessus comme une seconde peau. Celle qui rôdait toujours à l’arrière de sa tête, celle qui l’attendait derrière toutes les portes, qui le regardait dans les ombres, celle racontée par ceux qu’il s’efforçait d’aider. Ciaran avait été le battement d’aile de papillon qui crée des ouragans et des tsunamis. Pourtant le zouwu le laisse parler, curioisté morbide de contempler ses espoirs noyés un peu plus profond, patience de faire naître en lui un nouvel homme de fureur passionnée qu’il n’a que guère connu. ”The thought of remaining in this world without you is unbearable enough… But to know that I was the one to blame? How could I dare to breathe?” Oh, ironie, ironie, ironie. Je serais mort de toute façons.  Mort d’amour plutôt que de contes pour enfants. Un autre rire sans joie s’échappe de la gorge violoncelle de l’homme devant lui, et il voudrait l’imiter, mais il se retrouve encore souffle coupé, privé de ses mots, seule la brûlure insupportable des émotions du nymphe en superposition pour faire chanter ses cordes. Mémoire musculaire, ils étaient trop près, la chaleur de leurs deux corps s’entrechoquant comme autrefois, la saveur de la douleur et de la colère et de la confusion pour l’intensifier. Mémoire musculaire, les mains de Ciaran sur lui, il ne peut s’empêcher d’être morbidement satisfait : leur juste place, près de lui, près de son vieux cœur qui bat si fort. Mémoire musculaire, sur ses épaules, tintement de dogtags, angle de la mâchoire. Charlie ne croit pas aux contes de fées : le chaperon rouge est une bitch, Rapunzel est Stockholm, Alice est droguée, et la foutue prophétie du nymphe n’est qu’une histoire. Mémoire musculaire, leurs cœurs parlent davantage que leurs langues, et le zouwu ne peut que se contempler se mouvoir, sans l’avoir vraiment réfléchi, mût par sa colère et le cerveau rendu fou par le désir de Ciaran qui se délave sur le sien, mût par son espoir et son amour, une décision rapide et réflexe comme celle des addicts qui cherchent mécaniquement la bouteille. Il s’approche, encore, tandis que les mains tant rêvées retombent, des paroles vagues s’écrasant avec un fracas aquatique dans ses oreilles vrombissantes. “And even if I could somehow live with myself, I can’t erase the last seven years. The damage I’ve done… I can’t fix it. I would give anything to fix it but I can’t. And I made it worse by telling you all of this.” Charlie ne voulait plus entendre. Des mots, des mots, des mots, mais il ne ressent que sa chaleur sur sa peau, il ne ressent que sa chaleur dans son crâne, et il voudrait effacer tout ce qu’ils s’étaient dit, il voudrait effacer la culpabilité de son ancien amant, son insupportable culpabilité, il voudrait effacer de sa mémoire cette vulgaire fable qui les avait séparés, qui tentait de les convaincre qu’ils étaient impossibles. Et s’ils l’étaient vraiment, impossibles, il voulait l’aimer une dernière fois, céder à cette violence qui pompait du sang réchauffé dans ses veines à vif, lui dire au revoir comme ils ne l’avaient jamais pu. Sa propre main, large, chaude vint trouver sa place sur un torse aux contours presque oubliés, un ordre plutôt qu’une demande. Cherchant une réponse dans le bleu pâle de son regard, un accord, son pouce venant trouver un chemin qu’il avait trop tracé juste sous son pull, les frémissements d’une peau qui lui avait trop manqué. Cette fois, ces mots qu’il répète ne sont que murmurés, une demande plutôt qu’un ordre, une supplication d’oublier momentanément ces tourments qui les terrassent depuis trop longtemps. “Shut up. Just shut up…”
I’ll love you until you hate me, just for today, just for now, for all the kisses, the years and the goodbyes that we missed, I’ll love you until you hate me, I’ll love you until you hate me.



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Lun 26 Avr 2021 - 23:09
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Il y retournait, comme la vague retourne à la mer.

Charlie l’avait aimé tempétueux, il l’avait aimé les jours d’orage et de maelströms. Il l’avait aimé à marrée basse, il l’avait aimé en été, caressé mille fois son écume, goûté son sel. Il avait su comprendre les torrents, les apprivoiser parfois, les admirer souvent. Il avait su plonger sans jamais perdre pied, sans jamais la peur de se noyer. Homme à la mer, homme à la mer. Combien de navires Ciarán pouvait-il encore détruire dans ses flots ? Combien de coques savamment construites, combien de gouvernails solides, combien d’étendards fiers allait-il encore noyer ? Celui-là portait son nom. C’était le château de sable que Charlie avait érigé tant bien que mal, grain après grain, pour rebâtir ce qu’il avait décimé. Mais la marée montait de nouveau, dévastatrice et empoisonnée, elle emporterait tout sur son passage. Le sable perdrait sa forme, ferait basculer le sablier pour qu’à nouveau sur la côte on compte les jours entre le calme et le tsunami qui partirait, inéluctablement, et qui reviendrait, inexorablement. Parce que la vague retourne à la mer, et Ciarán retourne à Charlie.

La main qui se colla à son torse était chauffée à blanc, brûlante de leurs plus sombres péchés, des derniers restes pourrissants de sa volonté. Main adorée, main vénérée, main cent fois agrippée et plaquée contre l’oreiller. Continue, Ciarán. Donne-toi une bonne raison de te détester. Quand tu te serviras ton verre ce soir, t’auras tout gagné, tu sauras qui blâmer. “Shut up. Just shut up…” Il obtempéra. Que peut-on dire à celui qu’on a laissé partir ? Tous les mots semblaient vains, vides, vaincus. La confession venait trop tard, elle avait perdu sa saveur au fil des années, elle avait perdu son sens et son espoir. Ciarán arrivait trop tard au rendez-vous que son cœur avait fixé. La nuit était d’ores et déjà tombée, qu’importe le nombre d’étoiles qu’il foutrait dans le ciel pour les illuminer.

Il se tenait devant son amant comme on se tient au bord d’un précipice, les yeux dans l’océan. Stood on the cliffside screaming ‘give me a reason’. Don’t want no other shade of blue, but you. No other sadness in the world would do. Il suffirait de rien, d’une pauvre bourrasque, d’une vibration dans la terre. Il suffirait de rien pour qu’il ne trébuche, se fracasser contre les rochers les plus doux et les plus meurtriers de l’histoire, là en bas de la falaise de regrets qu’il a construite. “I’ll do anything” souffla-t-il, la voix rauque, à peine audible. N’importe quoi, pourvu qu’il puisse lui pardonner un jour. D’être parti, d’être revenu, d’exister. De tout gâcher. D’espérer. Qu’il lui pardonne de l’avoir trop aimé, de ne pas l’avoir aimé correctement, de l’avoir aimé trop tard. De ne pas l’avoir trouvé avant, d’avoir perdu des années et des années sans la saveur de sa peau, sans la mélodie de son rire à ne pas savoir qu’il existait quelque part et qu’il fallait le trouver. Une question de vie ou de mort, il aurait dû chercher. Il regrettait chaque seconde cendrée passée à ignorer la présence du zouwu sur cette terre aride, seul oasis dans un désert suffocant. Aujourd’hui, après avoir tout asséché, il avait encore l’audace d’espérer secrètement qu’il pleuve de nouveau.

Est-ce que ça avait encore du sens, tout ça, au fond ? Y avait-il quoi que ce soit dans ce bas monde qui justifie la distance qui les séparait ? Un souffle, à peine, même pas un battement de cœur. Mille raisons, mille nuits passées à intellectualiser, à se rassurer, à se fracasser les cordes vocales contre les fenêtres pour se persuader d’avoir fait le bon choix. Mille listes de pour et de contre, mais pour quoi ? Ciarán se sentait pantin, du destin et de sa propre stupidité. Il avait essayé d’orchestrer, essayé de peindre les couleurs de la vie sur le tableau d’un peintre damné. Midas des cendres dans la nuit la plus noire de l’été. “Just tell me what to do” Le nymphe sondait le regard du vétéran en quête de réponses, en quête d’absolution. Pardon pour tout ce que j’ai fait, pardon pour ce que je m’apprête à faire. Je suis l’instrument de notre histoire, fais-moi danser sur les pages, je tatouerai notre amour rouge sur blanc avec tout ce que je t’aime encore. Les mains de Ciarán remontèrent, incertaines, derrière la nuque chaude, tirant jusqu’à appuyer front contre front, une supplication quasi divine. Il lui avait enlevé tout pouvoir, tout choix, avait pris le gouvernail entre ses mains maudites et les avait dirigés tout droit vers la tempête, jusqu’au naufrage. Il s’était fait capitaine d’un navire coulé, tous les trésors du monde dans les cales, inaccessibles et oubliés. Il s’en remettait à Charlie, puisque lui-même ne faisait jamais les bons choix. Pour cette fois-là, au moins. Un moment qu’ils paieraient cher, un moment fugace d’éternité, un moment inestimable. Il lui devait bien ça.

   
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CIARLIE ◑ the road not taken looks real good now Empty Re: CIARLIE ◑ the road not taken looks real good now

Mar 25 Mai 2021 - 19:08

The road not taken looks real good now


Ils restaient là, à se regarder en chien de faïence entre deux battements, deux gonflements de poumon. La main de Charlie sur le torse de son amant comme s’il attendait qu’elle s’y imprime, peinture ocre pour qu’il ne l’oublie plus jamais, un appel au souvenir lancé dans l’univers, main sur peau telles les marques sur les parois de la grotte de Lascaux. Ils n’osent bouger davantage, tous deux sur le point de briser une interdiction qui prend aux tripes, suspendus dans un moment qui s’éternise et pourrait fuir à tout instant, à tout faux mouvement. Charlie s’en fout de briser les règles de l’univers, il éteindrait toutes les étoiles et fracasserait le tissu de l’espace-temps si ça pouvait lui laisser encore quelques moments avec l’homme qu’il n’avait jamais cessé d’aimer; mais il sent la retenue, il sent toute l’hésitation dans ce regard plongé dans le sien, brûlure de glace sèche qui ne cesse de se déverser dans le bleu de leurs iris. Il attend l’accord, il attend l’approbation dans les frémissements de son amant, frissonnant d’hypothermie alors que le feu salvateur ne l’attend qu’à quelques pas. Toutes les années à attendre de le retrouver se pressent dans ces quelques secondes de silence, et il les revit une à une, sept fois 365 jours d’espoir douloureux et obstiné entre deux tics tacs d’une montre.   “I’ll do anything.” Le regard du soldat s’accroche à ces lèvres qui murmurent, cette voix rauque qu’il entend à peine. Et pourtant il l’entend. Bruyante comme le tonnerre, claire comme le chant du clocher qu’il n’espérait plus voir sonner. Ce n’est pourtant qu’un soulagement partiel qui déferle dans ses veines fondantes, car dans les bas-fonds de son cœur saignant, subsiste encore les étincelles de sa vivace colère et de son désir hurlant. Then stay. Soldier on and fucking stay. Mais ce n’est pas à Ciaran d’être un guerrier. C’est un parti que Charlie a pris lui-même, de renoncer aux doux bras de la mort pour vivre et souffrir jusqu’à la fin, jusqu’au dernier pas, jusqu’à la dernière coupure de barbelés dans le no man’s land de leur histoire écorchée. “Just tell me what to do.” La chaleur des mains du scénariste remonte, hésitante, jusqu’à la nuque de Charlie pour s’y appuyer, rapprocher leurs fronts dans une prudence essoufflée. Une partie de lui hésite à se décoller, exprimer cette violence sourde qui gronde en lui et lui déchire toute la chair morceau par morceau, le laisser penaud tout seul au milieu de la pièce et lui tourner le dos comme on lui avait jadis fait. Un désir de justice, de vengeance peut-être, un moyen de lui faire comprendre la douleur dans laquelle il avait été laissé si longtemps, dans laquelle il se noyait encore. Un désir d’ignorer son brassard à la croix rouge et de laisser crever l’ennemi au fond de son trou d’ogive parce qu’il l’a fait saigner de ses balles. Mais, vraiment, il ne pourrait jamais. Ce n’était pas lui. Ciarán était son drapeau, son étendard, et il mourrait avant de devoir l’abandonner à la froideur de la tranchée; parce que si Charlie était soldat, il était avant tout médic, et les médic épongent les hémorragies, réparent, cousent les plaies. Il était sa terrible addiction, sept ans gravés sur une pièce noire de péchés, et lorsque leurs fronts se touchent, pression d’une main spectre sur sa nuque, la pièce est lancée à nouveau dans les airs, hasard du destin qu’ils ne leur reste plus qu’à tenter de réécrire.  Ses lèvres s’approchent de celles du nymphe, leur peau fatiguée, éraflée par une malédiction doucement rapiécée avec un baiser d’une douceur surprenante, guérie l’espace d’un instant, de quelques minutes, quelques heures peut-être, monstre Frankenstein des cadavres qu’ils ont tous deux laissés en marge de leur route commune.

Dès l’instant où leurs lèvres se touchent il sait qu’il ne pourra plus jamais s’arrêter. Il avait presqu’oublié qu’il avait soif et redécouvre l’eau salvatrice d’une oasis, d’une étendue verte et bleue dans le désert de sa souffrance. Tant pis si on ne voulait plus de lui, s’il dégoûtait, s’il choquait : Ciarán lui devait un au revoir, et il prenait ce qui lui était dû sans retenue. Sa propre main délaissa le torse pour venir s’appuyer sur le coin de sa mâchoire, caresser du bout du pouce ces cheveux sombres à la texture des poèmes oubliés. Il lui donnerait un ordre, oui, peut être le dernier à jamais avant qu’ils n’embrassent cet abîme d’incertitudes étincelantes.  “Let me love you just one last time.” La voix grave du zouwu ne supplie pas. Elle vibre d’un calme étrange, l’acceptance de toute cette fureur et de toute cette tristesse profonde qui se mêle à ses désirs fuyants. Cette main qui s’était réfugiée sur le tracé de son visage descend jusque dans son dos, au creux de ses reins, sa juste place. Il presse Ciarán contre son corps brûlant, un peu trop fort peut-être, alors que ses sens surnaturels le testent, alors qu’il respire ce parfum qu’il n’avait jamais oublié, celui qu’il achetait toujours au même endroit et celui qui restait en dessous, l’odeur de sa peau, l’odeur de ses envies. Il voudrait fusionner avec cet homme qu’il n’a jamais cessé d’aimer, pas un seul instant à travers toutes les tempêtes, tous les ouragans que la vie lui avait jetés dessus. Fusionner à sa chair, connecter leur rythme cardiaque, partager le sang qui hurle dans leurs artères. Son autre bras vient débarrasser le dessus du bureau qui leur faisait dos d’un revers de la main brusque, les documents qui y reposaient s’envolant de leurs fines ailes de papier pour leur laisser place alors que l’une des tasses roula dans un cliquetis sur le côté, renversant un reste de café froid sur le sol telle une grosse larme brune qui n’attendait que le bon moment pour percer. Il le soulève et l’assis sur le rebord, une poigne fermée si serrée sur son pull qu’il ne sait pas s’il arriverait à le lâcher. « Laisse-moi t’aimer une dernière fois ». Les mots sortent tout seuls, en français qu’il n’avait plus parlé depuis trop longtemps, un murmure tremblant à son oreille alors qu’il se presse encore plus fort contre ce corps assis de force sur le bureau. Il avait trop attendu. Tout sens de contrôle lui échappait, à coups de doux tremblements, de souffle à demi retenus, un doigt du milieu à l’univers qui les regardait sans doute d’un œil sévère, prêt à faire pleuvoir sang et insectes d’une apocalypse divine sur leurs deux têtes chaudes.  Et avec un désir teinté de cette attente trop longue il conquit cette terre interdite. Qu’importe s’il devait hurler sa solitude pour toujours lorsqu’il repartirait; enfin, sept ans plus tard, il lui aurait dit au revoir.




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CIARLIE ◑ the road not taken looks real good now Empty Re: CIARLIE ◑ the road not taken looks real good now

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